contexte

Le jour de la Grande Division naissent quatre factions : une dictature basée sur les principes de l’Institut qu’on avait connu ; une communauté qui fonctionne sous forme de vote et de code pénal ; un groupe retrouvé piégé dans le bunker ; et une anarchie qui s’est ancrée en pleine Nature. Des tensions, étincelles existants déjà avant la Grande Division et la Révolution, ont fait naître une ambiance de guerre froide entre les factions. L’Institut Espoir n’existe plus, mais cette ambiance survivaliste, à qui l’emportera sur l’autre prend racine.

Il ne reste plus que l’Espoir. +

staff

Elizabeth

Margaret ; Rose
admin graphisme/codage

Donatien

Eizenija ; Solveig
admin administration

Aeden

Katerina ; Jessy ; Béryl
bébé modo

who ?

no dcs here
job
163 membres

0 pts

7 membres

0 pts

162 membres

35 pts

58 membres

0 pts

AraatanForum RPG Mono no Aware
Timeline : Printemps 2021
Le deal à ne pas rater :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à -50% (large sélection)
Voir le deal

InvitéInvité
Lun 18 Juin - 20:29
Steven regarda sa montre. 11h58. Les portes du réfectoire n’allaient pas tarder à ouvrir mais pour l’instant elles étaient toujours closes. Lui était déjà à l’intérieur, prêt à prendre son service de surveillance entre 12h et 13h. Les employés de la cantine s’activaient pour mettre en place les derniers éléments avant l’arrivée des patients. Il se fit la réflexion qu’ils étaient un peu en retard aujourd’hui. Cependant, comme l’heure était l’heure et que l’Institut avait la ponctualité comme règle d’or, il ouvrit les portes à midi pile tandis que le personnel finissaient ses préparatifs à la hâte. Il trouvait ça un peu ridicule, ce n’était pas une minute ou deux qui allaient nuire au bon fonctionnement de l’Institut mais bon, pour s’être déjà fait remonter les bretelles par ses supérieurs, il acceptait désormais de prendre les ordres au pied de la lettre. Après tout, son job à lui, c’était d’exécuter les ordres, pas de les discuter. Il s’écarta légèrement pour laisser passer les jeunes qui s’avançaient calmement, prenant leur plateau en faisant la queue. Une journée comme les autres. Il remit en place sa cravate noire, vérifia que son oreillette tenait bien en place et se positionna à côté de l’entrée, l’air sévère, les mains dans le dos, comme on le lui avait appris.
Cela faisait à peine dix minutes, et il s’ennuyait déjà. Les surveillances des repas, c’était pas son truc. Il ne s’y passait jamais rien. Enfin, il ne se passait jamais grand-chose dans l’Institut, ce n’était pas comme lorsqu’il était au sein de l’armée en Syrie où il fallait rester tout le temps sur ses gardes, c’était une zone de conflit et ce n’était pas le cas de cette île, du moins pas vraiment, et regarder des gamins manger, ce n’était pas passionnant. Au moins, dans la cour, il pouvait les observer jouer au foot, s’amuser un peu… C’était déjà plus divertissant. Mais heureusement, il avait trouvé la parade… Il activa discrètement son oreillette qu’il avait branché en bluetooth à son portable, lançant un opening d'animé. En ce moment, il était retombé dans une période de J-pop mais il devait y avoir quelques morceaux de métal qui devaient encore se promener dans sa playlist, vestige de sa période du mois dernier. Malgré l’air entrainant qui résonnait dans ses oreilles, il ne laissait rien transparaître, continuant à afficher l’air dur et concentré qu’il enfilait aussi facilement qu’un masque à force d’habitude mais son esprit était ailleurs. Il n’entendait même pas les bruits de couverts qui commençaient à retentir dans la grande salle.
Une demi-heure plus tard, alors que la musique continuait à défiler, des éclats de voix se firent entendre. Steven ne le remarqua pas tout de suite, surtout qu’elles étaient montées crescendo dans le fond de la pièce. Il y dirigea son regard. Deux patients s’agitaient. Bah. Il n’avait pas envie de s’en mêler. Après tout, c’était beaucoup trop calme ici pour une cantine. C’était des jeunes, c’était normal qu’ils fassent du bruit. Dans sa propre jeunesse il n’avait jamais fréquenté une école qui n’était pas bruyante, surtout au moment des repas, et pourtant il en avait connu plus que la plupart des gens, et de très bien cotées en plus. Ils avaient bien le droit à un peu de liberté, surtout après ce qu’il s’était passé… Il allait donc se contenter d’augmenter le son de sa musique lorsque son regard fut de nouveau attiré par les deux patients. Ils en venaient aux mains.
Steven soupira discrètement. Son doigt hésita encore quelques instants sur le bouton du son avant de déplacer à regrets sur le bouton on/off.

- Oh la ! On se calme ici !

Il avait traversé la salle en moins de deux, séparant les deux bagarreurs, d’une main chacun. Puisque la situation l’exigeait, il fallait laisser sortir le dragon.
Anonymous
InvitéInvité
Mar 26 Juin - 18:12

Un repas calme ? Lol


              Après avoir localisé un bon endroit pour de me débarrasser des résidus qui m'encombraient, j'avais saisie la main de Naito pendant que nous nous approchions du réfectoire. Contrairement à quelques temps précédemment, il n'avait plus besoin de veiller à mon équilibre mais son contact me rassurait néanmoins. Nous passions le trajet à discuter joyeusement de tout et de rien; m'étant habitué à la vivacité de sa voix lorsque nous abordions les sujets qui le passionnaient le plus, je trouvais un certain enchantement à l'écouter s'extasier gaiement.
Une délicieuse odeur commençait à peine à s'engouffrer dans le détroit, allant jusqu'à éveiller ma famine. J'entendais mon estomac grincer avidement, visiblement déjà ignare de sa nausée matinale. Hâtant légèrement le pas, j'invitais mon camarade à se faufiler entre deux passants afin de pénétrer dans la cantine; aussi étonnant que cela puisse paraître, notre retard ne nous avait pas coûté pour autant d'être les derniers arrivés. Les patients s’agglutinaient dans leurs chemises blanches, plateaux en main, comme des perles s'alignant le long d'un fil que quelques gardes fermaient avec conviction. Ceux-ci demeuraient encrés comme des statues au regard froid, terrés à chaque recoin de la salle. Au cours des années, je m'étais fait(e) à cette impression constante d'être observée, et ce comme chacun des résidents. La plupart de ces surveillants avaient l'air tellement immuables qu'il m'arrivait de vouloir les approcher, rien que pour notifier une quelconque trace d'humanité dans leurs iris; mais leur prestance attisait définitivement quelque chose de beaucoup trop intimidant, empêchant même les plus intrépides à aller les interpeller amicalement.
Un réflexe que j'avais acquis de mes plusieurs années d'otage dans cet Institut m'aurait poussée à instinctivement chasser deux places émancipées, où moi et mon partenaire de vol pourrions reposer nos ailes; seulement aujourd'hui, le contexte était assez différent et ce n'était pas un corbeau qui emboîtait fidèlement mes pas, mais une petite chauve-souris encore incapable de voler. Cela étant plus fort que moi, je ressentais une sorte d'anormalité, et me faisait soudain plus goulu de dénicher la présence de Soma dans les environs plutôt qu'à combler ma faim ou boire les paroles de la noctule blessée.
Appel de l'instinct l'obligeant, je l'avais repérée d'une seule œillade, comme si nos âmes étaient liées ou que sa silhouette bicoloriée arrivait constamment à se démarquer de la foule. Assit au fond du self, près des fenêtre. Comme à l'usuel au final, sauf que cette fois-ci, il était seul.
Je m’efforce d'abreuver mes poumons d'un peu d'air alors que la culpabilité s'emparait de moi. Il n'aurait aucune raison de m'en vouloir si je m'excusais de mon ajournement, pas vrai? Soma ne m'avait jamais démontré de rancune jusqu'à présent, en aucune occasion. Même enchaîner les faux pas n'empêcherait jamais cet ange au plumage sombre de voir le plus beau en moi, et c'était quelque chose qui me captivait assez chez lui. A mes yeux, le fait qu'il n'existait personne de plus bienveillant sur terre était une réalité; et le présenter à Naito était comme apporter à ce dernier ma plus puissante bénédiction. J'étais certain(e) que la présence mature et apaisante de cette corneille allait lui apporter autant qu'elle a pue m'enrichir, sans me soucier de ce à quel point cette croyance pouvait s'avérer naïve.
Tirant de nouveau son bras pour qu'il prenne ma suite, je débutais une approche vers la table de mon vieil ami; l'idée d'aller attendre pour de la nourriture s'étant subitement éclipsée de mes songes. Sur le moment, cela me paraissait plus attrayant d'aller le saluer avant, histoire de lui signaler notre présence. J'avais bien pensé au fait que ce détour puisse importuner ma compagnie, mais de toute manière, Nai m'avait signalé ne pas être plus affamé que ça de son côté. Nous nous étions ramenés ici d'avantage afin de le rencontrer que pour déjeuner, en vérité.
Le tout en nous glissant entre les divers personnes qui entravaient notre trajectoire, je continuais ma conversation avec le fameux vampire d'un ton assez enthousiaste. L'excitation de regagner mon âme sœur se sentant jusqu'à ma voix.

"D'ailleurs Naito, c'est quand que tu comptes me dessiner?"

Je tournais vite-fait un visage rayonnant de malice dans la direction du jeune brun. J'étais très impatient(e) de le voir à l’œuvre; tout comme celles d'Anacha, les esquisses de ce garçon rayonnaient d'un réel talent. J'avoue que la dernière fois que quelqu'un m'avait griffonnée, je ne savais absolument pas où ranger ma gratitude tant elle était grande; à présent, elle gravite au dessus de mon lit, accompagnant la plupart des œuvres que moi et Soma nous échangions avec amusement au bord d'un balcon.

C'était les dernières paroles que j'eus le temps de lui souffler avant d'arriver au même niveau que la personne qui nous attendait. Sans que ça me surprenne, j'observais de plus près Soma se goinfrer d'assiettes garnies plantureusement, comme s'il souhaitait compenser un vide à l'âme. Il a toujours été un grand mangeur, contrairement à moi, grignotant sans cesse des portions de moineau. Il faut dire que certains ont beau lui accorder des éloges, je trouvais que la cuisine de cet hôpital était d'une fadeur sans nom. M'attabler ici-bas me rendait très nostalgique de mon pays natal, mais mon corbeau ne semblait pas s'encombrer de tels état-d'âmes; il mangeait, c'est tout. Quand sa complexité me fascinait, il m'arrivait parfois d'envier la manière dont il s'épargnait les prises de têtes pour des futilités.
Lui souriant avec la douceur que je lui adressait toujours, mes pupilles pétillaient déjà d'affection alors qu'elles constataient son avancée bien entamée sur son repas. Je souhaitais lui demander s'il nous avait attendus depuis longtemps, prêcher son pardon si nécessaire, mais la réponse de la chauve-souris derrière moi me coupa dans mon élan. Lui accordant posément mon attention afin de réagir à sa rétorque, je remarquais ce à quel point mon cœur ne pouvait être plus apaisé que par ces deux présences à mes côtés.  

Code by Joy


HRP:
Anonymous
PROWLER NaitoMembre du Village
Mar 26 Juin - 18:40


Un repas calme ? Lol



Dire que tout ce qui c'était passé avait été comprit et ranger en tant que souvenir serait mentir. Mon cerveau avait un peu de mal à comprendre tous les détails mais j'avais au moins compris l'essentiel. Le fait qu'il tenait ma ma main ne me dérangeait pas plus que ça. Étant tactile c'était même agréable et m'aidait à me concentrer sur la réalité, comme un lien me retenant en dehors de ses pensées qui m'attiraient et me piégeaient si souvent. Oui... comme un lien avec le monde réel.

C'était comme ça que je m'étais retrouver à suivre patiemment Swann dans les couloirs tout en discutant joyeusement avec lui. Le petit cygne était vraiment sympathique et j'étais heureux de m'en être fait un ami. Enfin..... je pouvais bien le considérer comme un ami n'est-ce pas ?

C'est au bout de quelques minutes, qui pour une fois me semblaient très courte, qu'on avait finalement atteint cet endroit nommé communément cantine. Je me fis d'ailleurs la réflexion que ça devait être la première fois que j'y étais arrivé rapidement et sans me perdre.... C'était un bon point ! Bien que je doutais être à nouveau capable de cet exploit si je n'étais pas accompagné. Oui, même au bout de 2 ans j'arrivais encore à me perdre à cause de ma distraction.

L'odeur de nourriture atteignit mon odorat et je me retins de grimacer. Oh, pas que la nourriture ici soit désagréable, au contraire. Mais actuellement mon estomac ne réclamait pas de nourriture et la simple pensée de manger me retournait l'estomac. Si j'avais eu faim, cela aurait été différent oui. Mais tentons de rester concentrer pour une fois !

Il y avait toujours autant de monde en ce lieu. Ce n'était pas quelque chose que j'aimais ou non mais ça restait.... perturbant, lourd.  Mon regard s'était également posé sur les gardes. La première fois que j'etais venu je les avais pris pour des statues. Bon... le fait que j'étais à moitié dans les vappes à cause de la perte de sang la première fois que j'avais mis les pieds dans cet endroit jouait beaucoup aussi je suppose.

Swann se remit à me tirer et je me laisse donc entrainer sans résiter. Il devait avoir trouvé cet personne sachant donner des ailes. L'impatience mêlée à la joie de faire une nouvelle rencontre, et d'avoir peut-être un nouvel ami, faisait s'effacer petit à petit cette voix de mon instinct. À quel moment une rencontre pourrait-elle présenter un danger hein ? Jamais. De plus, la joie présente dans les yeux émeraudes du petit ange à la mention de cette personne suffisait à m'apaiser et me dire que ça devait être un être génial.
Sa voix me sortit, pour la énième fois depuis notre rencintre, de mes pensées.

"D'ailleurs Naito, c'est quand que tu comptes me dessiner?"

L'excitation dans sa voix et son visage rayonnant de malice me fit sourire. C'est vrai. Je lui avais promis ce dessin ! Et je le ferais avec joie d'ailleurs.

"Et bien... tu n'as qu'à repasser dans ma chambre quand tu es dispo pour que je puisse le faire, comme je t'ai promis !" répondis-je joyeusement

On était arrivé prêt de cette personne durant ma réponse à sa question. Je tourne donc mon regard bleu, étudiant le personnage si précieux aux yeux du petit ange.




Codage par Libella
PROWLER Naito
Image : Un repas calme ? Lol Photo_10Fiche personnage : [url=]fiche personnage[/url]Espace personnel : [url=]espace personnel[/url]Groupe : Le VillageDate d'arrivée à l'Institut : 03/03/2016Age : 22
InvitéInvité
Mer 27 Juin - 2:30
Le sang coulait à flot, créant des rivières, des ruisseaux, des lacs miniatures. Faisant courir sa source dégénérée sous mes genoux, salis contre le sol. Les mains tendues devant moi, je recueillais l’averse écarlate au creux de mes paumes, observant avec une fascination morbide l’hémoglobine s’engouffrer dans chaque replis de ma peau. De mes empreintes. Je relevais la tête, uniquement pour me retrouver face à la bouche béante d’un canon.

PAN




Je bondissais hors du lit dans un tourbillon de draps et d’oreiller, mon corps paniqué heurtant le sol maladroitement en tentant de se redresser sur ses pieds, en vain. Je me retrouvais comme un faon blessé à ramper vers le coin le plus proche de la pièce pour m’y blottir, des larmes chaudes coulant le long de mes joues. Encore emprisonné de mon rêve, je sentais néanmoins la brume se dissiper peu à peu, tandis que l’on me berçait de murmures.

Fini... tu n’es pas mort… dommage…

Mon pyjama collait à ma peau, trempé de sueur, mais je n’arrivais pas à lacher ma couverture, m’y enveloppant comme si ma vie en dépendait, au cœur d’un blizzard impitoyable. On frappa à ma porte.

L’infirmière entra, accueilli par mon regard terrorisé. Venait-elle finir le travail ? Mais elle ne sembla pas se préoccuper de moi, se contentant de poser l’habituel plateau sur ma table de chevet. Deux minuscules gobelets, contenant ma médication du jour. La porte se referma doucement, me laissant seul avec mon angoisse évanescente.  Je me levais lourdement pour aller engloutir les quelques cachets d’un geste machinal et sorti de la chambre avec mes habits de la journée pour rejoindre les douches.

Je glissais dans les couloirs comme une ombre, ne souhaitant qu’une chose ; la sensation de l’eau chaude sur ma tête, chassant les dernières brumes de ce rêve devenu bien trop récurrent. Il m’avait laissé un gout âpre dans la bouche, et une nausée latente qui ne me quittait pas. Les idées tournaient, encore et encore, dans ma tête et mon ventre. Le son, les cris. Je rendais mes tripes dans le premier toilette à ma portée. Mais mon estomac, vide, ne me rendit que les cachets avalés à la va vite il y a quelques minutes. Je les regardais sombrer au fond de la cuvette puis partir avec la chasse d’eau dans un monde meilleur.

… tricheur, tricheur, tricheur….


Devais-je le signaler au médecin le plus proche ? A l’infirmière ? En qui avoir confiance. Je ne voulais pas davantage d’intéraction avec le personnel. Je les voulais tous loin de moi. Loin de nous. Je devais retrouver ma bougie, mon ange de raison, et la journée se passerai comme toute les autres. Sa seul présence me suffirait.

Les cheveux encore humides, le teins rosé et les cernes creusées, je m’arrêtais devant la porte de Swann, entrouvrant le battant avec douceur, sans me préoccuper de frapper. La chambre était vide, en cette heure avancée de la matinée. Dissimulant ma déception de ne pas le trouver allongé sur son lit, contemplant les dessins accrochés sur son mur, je me dirigeais vers le réfectoire. Nous n’avions pas pu dormir ensemble cette nuit, et j’avais besoin de rattraper ce temps que j’estimais perdu. Tout mon être, mon âme, mon corps, réclamait sa présence et la vision de sa chevelure, de son visage. Le contact de ses doigts sur les miens. C’était un tourment que j’avais apprivoisé, identifié, une douce douleur au diaphragme à chaque fois que mes pensées volaient vers elle. Ce qui était pour ainsi dire systématique. J’étais accro à ma mésange et à tout ce que son être si lumineux me faisait ressentir. Où était-il ?

Mes yeux parcourait la salle de restauration, habitué à accrocher le regard verdoyant de l’être aimé. Mais rien ne les retint, si ce n’est les visages ternes et tristes des autres patients venus se réunir à l’heure du déjeuner. Mon ventre gargouillant me dicta d’aller chercher de quoi le sustenter en attendant l’arrivée imminente de mon amie, car tous les jours nous nous retrouvions ici pour manger ensemble.
Je fis glisser mon plateau de plat en plat, acceptant docilement les cuillerées de légumes variés et de viande que les cantinières servaient à la louche dans les plats. J’avais pris l’habitude de tendre mon assiette un peu plus longtemps que les autres élèves pour en avoir davantage, surtout lorsque y avait de la purée de pomme de terre au menu. Je la mangeais toujours en dernier comme une récompense.

...petit goinfre...Demande plus de desserts... Elle le regarde ....bizarrement


J’allais finalement m’installer à une place près de la fenêtre, avec vue sur l'entrée, de manière à pouvoir faire signe à Swann lorsque arriverait. Mais les minutes passaient et la lumière n’entrait pas. Mon cœur avait des soubresauts à chaque nouvel arrivant, chaque éclat de voix. Mais mon ange factice ne se montrait pas. J’avais peu à peu cesser de manger, préférant enfoncer les dents de ma fourchette dans le bois de la table. Y laissant des marques. Des griffures. Mes yeux parcourait la populace. S’attardant sur les gardes, statues silencieuses et implacables qui surveillaient tout nos rituels quotidiens. Celui-là me fixait trop. Celui-ci aussi, avait eu un regard insistant. Savaient-ils qui j’attendais ? Savaient-ils que j’allais finalement attendre en vain ? Ils savaient.

…qui il … attend… pathétique… Qu’il te plante là ?…
Proche, toute proche, au creux de mon oreille. Claire et limpide comme une onde.

Ce n’était pas normal. Il devait forcément être arrivé quelque chose. Cela ne lui ressemblait tout bonnement pas. Son médecin, ce psychopathe… Avait-il dérapé une nouvelle fois ? L’avait-il… J’imaginais ce maniaque et son arme à feu, penché au dessus de la silhouette fine et diaphane de..

Où est Swann ? Ils le savent ; Ils le diront pas.  Si tu savais. Dans cette salle…

J’enfonçais les dents de mon couvert sous l’ongle de mon pouce, de plus en plus loin. La douleur couvrait sa voix, son sifflement. Il n’était rien arrivé à mon trésor, il ne lui arriverait jamais rien, il n’était pas destiné à dépérir ici, ni maintenant ni jamais. Je me passais une main sur le visage, y déposant même une petite claque sur la joue, et entamait de force mon bol de purée. Je n’avais pas le droit de me laisser tourmenter. Je ne l’avais plus, depuis que j’avais trouvé mon petit paradis en sa personne. Encore un peu de patience, et je pourrai me laisser glisser dans la douceur de son regard et m’abandonner à ses caresses tendres. Et tout irait mieux. Les visages des gardes redeviendraient humains, et je n'imaginerai plus aucun scénario.

Comme de fait exprès, la lueur de ma morne vie entra dans la pièce cependant que je jetais désespérément un énième coup d’œil à l’entrée. Un poids énorme sembla quitter ma poitrine tandis que je ne détournais plus mon regard, la regardant fendre la foule pour venir à moi. J’avais toujours su qu’il n’était qu’en retard, que les gardes se fichaient pas mal de ma présence et qu’il allait bien. Je le regardais venir dans ma direction, son visage si familier, si doux, me couvrant de toute la tendresse du monde, détendant mes muscles d’une simple œillade. Mais quelque chose me attira mon attention, effaçant légèrement le sourire accueillant que je lui adressais. Il n’était pas seul, et au creux de sa main, la main d’un autre que moi. Un autre qui lui emboîtait le pas pour venir à ma rencontre. Il s'agissait d'un garçon, avec des cheveux bruns en bataille et des yeux d'un bleu sombre, mais je ne pris pas le temps de bien l'observer, car déjà ma vue se brouillait à leur approche. Mon visage, qui s’était fendu d’un sourire soulagé en voyant apparaître ma mésange, se ferma soudain dans une expression neutre. Mon regard effectuait des aller-retours entre leurs doigts entrelacés et l’expression enjouée de Swann. Tout ce temps où je l’avais perdue, elle l’avait passé... avec lui ?
Sa voix, toujours caressante à mes oreilles, me parvint. Mais ses mots n’étaient pas pour moi. Moi qui m’en languissait depuis des heures et des heures. Suivit de la voix du nouveau venu, que je trouvais immédiatement agaçante pour une raison obscure. Je n'avais jamais vu sa dégaine étrange dans les couloirs jusqu'à présent. Mais d'où est-ce qu'il sortait?

"D'ailleurs Naito, c'est quand que tu comptes me dessiner?"

Pourquoi le regardait-elle comme ça ? Cet air sur son visage, cette bienveillance, je voulais qu’elle soit mienne, et mienne uniquement. Je voulais être le seul à avoir le droit de dessiner ses traits parfaits, même de ma plume immonde, sous la forme d’oiseaux blanc décrépis et hésitants. Avait-il ce talent que je n’ai pas ? Allait-elle préferer ses oeuvres à  mes pliages idiots? Je ne pouvais m’empêcher de fixer encore et toujours leurs mains, sentant la jalousie ramper, remontant le long de ma colonne comme un frisson malveillant et glacial.

"Et bien... tu n'as qu'à repasser dans ma chambre quand tu es dispo pour que je puisse le faire, comme je t'ai promis ! »


Sa chambre ? Alors ils s’y terraient depuis tout ce temps…ils ont dormi ensemble, cette nuit
Et toi qui l’attendait.. dechet, déchet



Je sentis mes joues chauffer, et la colère sourde s’emparer de mes mouvements.  Je me levais de ma chaise, laissant le dossier choir bruyamment sur le sol. L’attention des autres élèves se porta soudainement sur notre trio, mais je ne voyais plus personne. Je ne voyais que ces doigts entrelacés, ces sourires, ces regards que je voulais miens, et miens uniquement. Je m’avançais, menaçant. Je fixais ses yeux bleus, occultant totalement Swann de mon champ de vision. De manière inconsciente, j’imaginais peut-être que si je ne le regardais pas, alors il n’était pas vraiment là non plus. Pas là pour assister au spectacle que je m’apprêtais à lui offrir. Mais je ne pouvais pas lutter contre cette envie irrépressible qui s’était emparer de moi, effacer cet air insouciant de la face de ce type.  

"Je me suis inquiété. Je...C'est un nouveau? Et tu le suis dans sa chambre?" marmonnais-je à l'intention de ma mésange, entre mes dents serrées. En face de moi, cible de mon regard noir: toujours cette tête de bien-heureux. Comme si une telle proposition n'avait rien de bizarre venant d'un type tombé du ciel. Ou alors je ne le voyais que maintenant qu'il avait débarquer dans mon petit monde avec un grand coup de savate dans la porte.

il sait qu’il va l’avoir pour lui et pas toi
pas toi
pas toi
pas toi


"Pourquoi tu me regarde comme ça? Tu crois que je ne vois ton petit jeu?"


Regarde-le qui se moque et toi qui ne fait rien

Attrapant le poignet du voleur de bougie pour rompre ce contact qui me rendait fou, je séparais leurs mains; et d’un geste violent et maîtrisé lui tordait le bras dans le dos. J’avais perdu les commandes, et tout partait à vau-l’eau. Dans un recoin de mon cerveau, on me soufflait que j’avais raison, que c’était la chose à faire. Qu’il fallait protéger l’innocence de mon ange. Je n’étais plus qu’une boule de jalousie et de colère, souhaitant la disparition de ce rival, de cet artiste qui voulait me voler ma lumière et l’enfermer dans sa chambre. Mais son sourire suffisant, je pouvais l’effacer, je ne laisserai jamais personne me la dérober.

« Déconne pas avec moi. Je surveille. » lui murmurais-je au plus près de l’oreille.

Grondant de rage, je me décalais d’un pas et le fit basculer, obligeant son visage à atterrir dans mon assiette de purée où j’allais l’y maintenir. Tout mon poids dans son dos et le bras tordu derrière lui, il ne pouvait pas se défaire de mon emprise. Je maintenais sa tête dans la mixture avec mon coude, sentant l’adrénaline affluer dans mes veines et le plaisir primitif de dominer un rival. L’action n’avait duré que quelques secondes, mais déjà les voix s’élevaient autour de nous, et je sentais des mains sur moi tenter de me faire lâcher  sans succès


- Oh la ! On se calme ici !
tonna soudain une grosse voix, juste derrière moi, couvrant les ricanements du diable sur mon épaule.

Une grande main se referma sur mon bras et m’obligea à lâcher prise, non sans me débattre farouchement. Je ne voulais pas le laisser partir, je voulais qu’il comprenne qu’il n’avait pas le droit de toucher ses cheveux, pas le droit de le regarder, pas le droit de l’emmener dans sa chambre…dans son cocon. Car il fallait qu’il reste près de moi, c’était vital. Mais quelqu’un d’imposant se tenait désormais entre moi et ma proie, me maintenant fermement à distance. Je reconnu celui que les élèves surnommaient « Le Géant ». Un Garde. Comme un sceau d’eau glacée, son intervention balaya la paranoïa qui avait voilé mon regard, et je le fixais, incrédule, et soudain apeuré des conséquences de mes actes. Je venais de replonger, de faire mal à un camarade...seulement cette fois, on ne pouvait pas m’expulser et me renvoyer chez moi avec un mot et une punition. Non, ici, les punitions étaient…  

Mon regard se reporta instinctivement sur Swann, comme un marin rechercherait son phare en plein tempête.
Je ne voulais pas être sanctionné.


HRP:
Anonymous
InvitéInvité
Dim 1 Juil - 18:14
Le regard de Steven balaya les trois gosses qui se tenaient face à lui, analytique. L’un avait plongé la tête d’un autre dans son assiette de purée, si bien que son visage était couvert de la mixture jaune. Avec son expression ahurie en prime, le vigile s’obligea à détourner le regard de celui-ci. C’était un spectacle beaucoup trop drôle mais comme il ne pouvait pas se permettre de rire… Il aperçut donc furtivement le deuxième garçon qu’il tenait par le col changer d’expression. Dans son regard, c’était comme si un voile s’était levé. Lui-même avait l’air de ne pas comprendre ce qu’il lui avait pris. Allons bon. Une psychose ? C’était le genre de chose qui arrivait ici. Mais maintenant que cette impulsion folle s’était calmée, Steven prit le parti de les lâcher tous les deux, leur faisant confiance pour ne pas recommencer. Il attrapa une serviette et la fourra dans les mains du gamin malmené.

- Allez, essuie-toi petit. Ce n’est que de la purée.

Puis il avisa le troisième, ce gamin dont il était difficile de déterminer le genre et la lumière se fit. Il se disait bien en regardant celui aux cheveux noirs qu’il l’avait déjà vu quelque part. Maintenant, en les ayant tous les deux dans le même champ de vision il savait pourquoi. C’était ces deux gamins qu’ils voyaient parfois dans le couloir de leur aile alors que le couvre-feu était tombé. Ils passaient furtivement dans le couloir pour rejoindre la chambre de l’un ou de l’autre, croyant probablement qu’il ne les voyait pas. Raté. Mais bon. Il ne disait rien. C’était des gamins, lui aussi quand il était en internat il grugeait souvent pour aller faire n’importe quoi avec ses camarades. Et puis avec ce qu’il s’était passé… Il ne pouvait pas leur en vouloir de ne pas vouloir dormir seuls.
Il les observa un instant en silence. Ca le gonflait d’avance de faire ce qu’il allait faire. Ils étaient pas méchants ces mômes. Un peu turbulents mais ils avaient aussi des problèmes dont il fallait tenir compte. De problèmes qui expliquaient leur présence ici. Et puis, il ne lui était rien arrivé de particulièrement grave, à celui qui s’essuyait encore le visage. Mais bon. Les règles étaient les règles. Et s’il pouvait laisser passer les excursions nocturnes puisqu’il était le seul à les remarquer, il pouvait difficilement ne pas appliquer les sanctions alors que trois de ses collègues avaient assisté à toute la scène…

- Prenez votre plateau tous les deux et suivez-moi.
Dit-il en désignant du menton la sortie.

Il croisa le regard d’un de ses collègues, dans un coin de la salle, échangeant silencieusement avec lui. Il hocha la tête. Oui, il pouvait y aller. Oui, il pouvait s’occuper des zouaves avant qu’il ne leur prenne l’envie de recommencer leurs conneries. Etre trois pour surveiller, c’était largement suffisant. Ils pouvaient encore mater les potentiels rebelles. C’était ce qu’il lisait dans les yeux de son collègue. Il lui rendit sobrement son hochement de tête tout en songeant que décidemment, certains de ses collègues ne comprenaient rien aux ados.
Il se retourna vers ceux qui posaient justement problème. Ils se jetaient des coups d’œil entre eux, visiblement pas très à l’aise.

- Bon, vous vous dépêchez ?

Puis il remarqua enfin que Y74 n’avait pas de plateau. En même temps puisqu’il avait déjà mangé… Non Steven. Non. Ne pas rire on a dit. Il l’envoya donc chercher son plateau repas, tout en gardant un air sérieux sur le visage, peut-être un chouilla trop forcé, se mordant l’intérieur des joues pour ne pas pouffer comme un imbécile. Cela ne seyait pas à sa profession et à son professionnalisme.

- D'ailleurs, toi aussi tu devrais aller te chercher un plateau si tu ne veux pas avoir de problème comme tes camarades. Ajouta-t-il une fois plus calme à l'intention de X54.

HRP:
Anonymous
InvitéInvité
Mar 17 Juil - 22:32

Un repas calme ? Lol


             
"Et bien... tu n'as qu'à repasser dans ma chambre quand tu es dispo pour que je puisse le faire, comme je t'ai promis !"

J'avais opiné poliment. Griffant avec nervosité la pointe de mon majeur avec l'ongle de mon pouce, mon autre main se resserrait sur celle de Naito. A croire que les mots restaient en attente de mes songes, envisageant la possibilité que Soma puisse nous suivre. En vérité, j'aurais préférée considérer le concerné autrement que dans un sursaut.
La chute de sa chaise avait ravagé d'une traite ma paix intérieure, juste le temps qu'il s'approche dangereusement de nous, le pas lourd et ferme, le visage assombri plus que d'ordinaire par la cascade ténébreuse qui jonchait sa tête. Un silence anxieux avait engloutit la salle, auquel je me fondais, totalement happé par les vibrations âpres de sa voix.

"Je me suis inquiété. Je..."

Ma vision s'accrochait soudainement à mes souliers quand une couleur rosée favorisait mes joues. Intimidée, mes excuses toutes préparées s'étaient condamnées au fond de ma gorge; j'étais comme un(e) enfant n'osant répondre après s'être fait grondé, notifiant avec confusion de ne pas être le/la plus stressée. J'avais déjà connu mon corbeau sous tension mais, à ce moment, la haine et le doute semblait le corrompre à l’excès.

"C'est un nouveau? Et tu le suis dans sa chambre?", sa longue silhouette dominait ma noctule de quelques centimètres. L'oiseau le perforait de son regard noir, ayant abandonné toute douceur pour trancher autant qu'une lame. "Pourquoi tu me regarde comme ça? Tu crois que je ne vois ton petit jeu?"

Les doigts de Naito quittèrent les miens brutalement, manquant de me faire basculer vers l'avant. Il poussa un râle de douleur qui réclama promptement mon attention et fit se tordre mon crâne en direction de la scène. Un bras violenté et cloué dans son dos par la prise ferme du garçon que je pensais connaître plus que quiconque, j'observais ses traits se crisper pendant qu'on lui intimait quelque chose à l'oreille.
Etait-ce juste...réel? Je n'arrivais pas à comprendre ce qui se profilait devant mes yeux, mon regard jonglant entre chacun de mes deux amis, écarquillé au possible. J'avais la sensation désagréable que quelque chose m'échappait, mais n'avais pas le temps de m'y attarder.
D'un croassement irascible, quelques foulées avaient suffi à la corneille afin d'écraser la tête de son adversaire contre la porcelaine d'une assiette. Mon palpitant fit un bon fulgurant à la phonation des couverts ayant glissés de la table, recouvrant à elle seule les influences étouffantes du brouhaha naissant. Réagissant à l'instinct, bondissant de ma position, j'ai saisie fermement Soma par l'un de ses bras durant la pulsion beaucoup trop malsaine qu'il s'acharnait à assouvir.

"Ian!", hurlais-je d'un octave qui m'allait peu.
"Oh la ! On se calme ici !"

Je ne savais pas par quel moyen cet adulte avait soudainement apparu, mais alors que ses paroles bourdonnaient gravement au milieu du réfectoire, il avait l'allure du prophète qui avait séparé la mer en deux. Il faut dire qu'avec la carrure qu'il pavanait, même le plus intrépide des caïds serait du genre à baisser la tête.
Vu que sa poigne semblait suffire à contrôler les accès belliqueux de mon corbeau, j'entamais un certain recul, croisant mes bras et les pressant fermement contre l'angoisse qui gonflait mon estomac; de quoi faire revenir ma nausée au galop.


La seule présence de ce qui semblait finalement être un agent de sécurité ordonnait au tumulte de se tasser au stade de murmure. Je ne savais plus où ranger mon esprit, n'osant réellement croiser les paupières en amandes du garde s'étant planté comme un poteau au milieu de notre trio. Ni celles de Naito, masquées par la purée; comme si je ne pouvais pas assumer ma part de responsabilité à son supplice. Mais le pire, c'était d'avoir à éviter l'image de son bourreau; les yeux de mon corbeau hurlaient, suppliaient pour une réponse. Malgré la culpabilité que m'évoquaient ses appels taciturnes, je restais caché derrière un rideau de cheveux d'argent, sans me résoudre à en sortir. Mes iris n'avaient pas à lui offrir cet amas d'impuretés qui germait en moi; une apogée d'effroi, d'anxiété, de peine, de honte, de colère, de déception. Le tout autant dissimulé par une puissante déroute que par la chute de ma frange blanche.
Mes doigts s'occupaient farouchement à creuser la peau de mon avant bras. J'analysais sans y penser les pavés du carrelage froid qui portait nos chaussures, remarquant que le grand gaillard restait muet; sûrement encore dans l'attente que chacun puisse retrouver ses esprits avant de rudoyer.

"Allez, essuie-toi petit. Ce n’est que de la purée."

Brièvement, j'avise Naito se voir attribué d'un chiffon avant de me sentir lorgnée à mon tour. Je ne savais pas pourquoi ce gars là me dévisageait; j'avais bien tenté de lui rendre cette attention timidement, mais il n'y avait rien à faire. Une hostilité latente pour l'autorité de ce bâtiment s'était développée en moi depuis le jour de la Grande Sanction, et la simple idée que de considérer la présence d'un de leur membre au milieu de notre querelle me faisait grincer des dents. Au moins, celui-ci avait le mérite d'avoir apaisé les tensions sans trop monter dans les tours.
Pour l'instant.

"Prenez votre plateau tous les deux et suivez-moi."

"Suivez-moi"...
"Suivez-moi"?
Mais pour aller où?

Comme réveillé du cocon dans lequel je m'étais séquestré, mon dos s'est subitement déplié pour essuyer les regards inquiets de mes deux camarades. Je craignais que le vieux ne sévisse, même si c'était inévitable.  Patient ou non, docile ou non, je ne pouvais pas accorder ma confiance à des individus dont j'ai témoigné au crime public; chacune des terreurs nocturnes que Soma et moi partagions, existaient pour nous rappeler ce à quel point cet Institut a sombré dans la folie...et il était hors de question que je laisse quiconque mettre mes amis en danger.
Le tambour de ma poitrine s'était affolé de sorte à me déstabiliser, le calme ambiant s'étant lui aussi retourné contre moi. Et comme si ça ne suffisait pas, la voix du surveillant se souleva elle aussi pour me pousser à agir;

"Bon, vous vous dépêchez ?" Il commanda à la chauves-souris d'aller rejoindre la file d'affamés derrière nous, d'un sobre signe de la tête, avant d'ajouter à mon égard; "D'ailleurs, toi aussi tu devrais aller te chercher un plateau si tu ne veux pas avoir de problème comme tes camarades."

Je guignais d'un œil défiant le cerbère et ses grands airs, définitivement attaqué par la tournure de sa phrase. Le "moi" du passé aurait sûrement baissé la tête de manière pacifiste,  mais la "moi" actuelle avait juste un crâne aussi lourd que son cœur, en plus d'être sous émétiques et totalement déboussolée par la suite de contextes violents et improbables dont elle subissait le spectacle. Posant finalement mes pupilles sur le jeune brun aux oreilles percées, je constatais ce à quel point il hésitait à s’exécuter avant m'en approcher et de venir le retenir par l'une de ses épaules. Un faible sourire s'était difficilement étiré entre mes joues. Un sourire profondément contrit.
Qu'il me pardonne ou non de ce qui venait de se produire; j'avais dis que je resterais à ses côtés et je tiendrais parole.

"Non, désolé." affichant une mine moins assurée, j'évitais l'adulte du regard avant de me justifier, mon ton n'assumant que maladroitement mon insolence. "Nous sommes malades. Nous n'avons pas faim."

Mes yeux questionnaient ceux de Naito, à la recherche de son approbation, avant de survoler ses cheveux basanés. Ils finissent par atteindre ceux des autres juges sans vie, postés à chaque recoins de la pièce; ces trois là avaient beau donner l'air de rien, je sentais leur aura me piquer le dos jusqu'à m'en voir perturbé.
Oui, je le prévoyais déjà arriver, le grand bonhomme aux yeux bridés; les repas à la cantine étant obligatoires, c'était bien la pire occasion pour faire grabuge.
La main qui enserrerait l'épaule de mon ami avait cessée son œuvre pour revenir se poser à sa place initiale; les bras croisés contre mon torse, mon allure était aussi fermée que celle d'une adolescente en plein caprice.

"Et puis, je...c'est de ma faute, ce qu'il vient de se passer..."

...je crois.
Finalement, j'étais parti zieuter dubitativement mon oiseau, sans avorter une pointe de peur lorsque nos iris caressèrent un contact. Ça en devenait difficile d'imaginer ce à quel point mon esprit, taraudé de mille et une questions, était pourtant si apaisé il n'y a qu'à peine quelques instants.

Qu'est-ce que...Comment je devais interpréter son geste? Pourquoi avait-il fait ça? Est-ce que Naito était l'un de ses ennemis? Mais, je l'aurais sue, non? Et puis, j'avais la sensation qu'il s'adressait à un inconnu alors...
Ou bien, était-il affolé que je sois allé dans sa chambre, en réalité? Etait-ce mon retard? Est-ce qu'il me punissait indirectement?
Qu'est-ce qu'il s'est passé aujourd'hui pour que je le retrouve dans un tel état?
Etait-ce sa maladie?
Mon corbeau n'est pas comme ça...

Soufflant du nez, j'eus vite fait de me concentrer de nouveau sur mon principal interlocuteur, l'expression empreinte d'amertume. Peu importe quel diable avait pris l'aviateur d'origamis, je restais celui/celle qui avait réunis ces deux éléments contraires dans la même pièce.

"Je suis plus concerné par cette histoire que Nai-...Enfin...Y74. Il ne mérite pas d'avoir des problèmes à ma place. Alors c'est moi qui devrait vous suivre."

Mes paupières étaient basses pendant que je fixais en coin les pieds de la noctule, priant intérieurement pour qu'elle coopère. C'était mieux ainsi; après courte analyse, cette histoire n'impliquait définitivement qu'un problème entre Soma et moi. Le fait qu'il ait eu à subir tout cela s'avérait injuste et désolant; de plus, s'il y avait une personne qui devait emboîter le pas de mon corbeau en toute circonstance, c'était moi.

Sur ces mots, mes poumons se déversaient lourdement dans l'atmosphère, déjà bien chargée malgré tout.

Code by Joy
Anonymous
Contenu sponsorisé
Revenir en haut
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum