La nuit avait toujours été une source d'inspiration pour Ryota. Petit déjà, il s'était pris d'une passion à regarder les étoiles, à s'allonger des heures dans le jardin à distinguer ces petites lumières blanches dans le ciel. A l'époque, il avait fait de nombreuses peintures représentant le ciel nocturne, se rendant compte qu'il y avait des milliers de façons de le peindre malgré son apparente simplicité. Avec l'âge, cette passion n'avait pas tarie. Ryota avait cependant était privé pendant un temps de ses longues observations, à l'époque où les couvres-feu étaient de mise à l'Intitut. Il n'avait jamais réussi à braver l'interdiction, en partie parce qu'il n'était absolument pas discret et qu'il se serait fait repérer à la moindre tentative. Il avait donc pris son mal en patience, impatient de pouvoir s'allonger de nouveau sous les étoiles et de les observer autrement que derrière une fenêtre sale.

Sa sœur dormait déjà alors qu'il sortit de leur cabane mutuelle. Il n'allait pas la réveiller pour ça. Il avait laissé un mot sur la table de la pièce principale, c'était amplement suffisant. Miya détestait être réveillée en pleine nuit, surtout si c'était pour qu'on lui dise ce genre d'infos. Elle se serait sûrement mise à grogner, ou pire, lui dire de ne pas sortir parce que c'était trop dangereux, et le jeune peintre ne se sentait pas d'avoir ce genre de mise en garde. Il aimait sa sœur de tout son cœur et était reconnaissant qu'elle veuille prendre soin de lui, mais il était tout à fait capable de décider ce qui était bon pour lui ou non (du moins, la plupart du temps). On oubliait parfois que c'était lui, l'aîné de la famille. Dison qu'ils se protégeaient mutuellement, les deux... mais que Miya avait un côté bien plus autoritaire.

L'air de la nuit était vrai, Ryota se remercia d'avoir pris un blouson. Il n'allait pas de plaindre, au moins, il ne pleuvait pas comme la veille. Du mauvais temps ne faisait pas du bien aux articulations de Ryota, déjà bien mal en point, ni à sa santé en général, alors il prenait soin de rester confiné chez lui quand il pleuvait ou neigeait. Il avait appris à ses dépens que mettre sa santé en danger ainsi était loin d'être la meilleure solution pour son bien-être. Pour la pluie, ce n'était pas un soucis, mais il aimait beaucoup la neige, son esthétique, et devait parfois lutter contre ses envies de sortir.
Mais ce soir, il faisait bon, et le violet comptait bien en profiter un maximum.

« Juste un peu, ça ne devrait pas être long » se murmura-t-il à lui-même.

Armé de sa lampe torche, Ryota avança lentement dans le Village. Il avait une très mauvaise vue de nuit et du mal à s'orienter, alors, il tâcherait de ne pas trop s'éloigner. Il aurait l'air bien idiot s'il se perdait dans son propre Village, après tout, et il n'avait pas spécialement l'envie de tourner en rond pendant des heures pour retrouver son chemin.
A sa grande déception, le ciel était couvert. On n'y voyait quand même quelques étoiles, mais pas assez à son goût pour trouver de l'inspiration pour un tableau. Il était quelque peu déçu, mais décida quand même de continuer sa route. Il sentait qu'il avait suffisamment d'énergie pour une balade nocturne, ça lui ferait du bien.

Au bout de quelques pas, une silhouette familière apparut dans son champ de vision. Le jeune peintre ne parvint pas tout de suite à déterminer de qui il pouvait s'agir, mais il n'y avait pas milles solutions quant à l'identité de la personne. En s'approchant, non sans faire un sacré boucan mine de rien en marchant, Ryota fini par reconnaître Alysson. Bien sûr, que c'était elle, se dit-il, c'était évident maintenant. C'était leur gardienne de nuit, et avec sa pathologie, il n'y avait de toute façon qu'à cette période qu'elle sortait. Il baissa sa lampe torche vers le sol. Il n'était pas persuadé que la lumière d'une dynamo puisse faire du mal à la jeune fille, mais de toute façon, il préférait ne pas lui mettre en pleine figure.

« Oh, bonsoir, Alysson ! Comment vas-tu ce soir ? »

Il n'avait aucun problème à lui parler. Les deux jeunes gens étaient amis, après tout, et ce depuis quelques années déjà. Ils avaient déjà eu l'occasion de traîner plusieurs fois ensemble à l'époque de l'Institut. Lui qui se couchait tard, ça lui avait fait plaisir de trouver quelqu'un avec qui discuter et passer de temps après l'heure du coucher. Une amitié s'était donc créée entre les deux, amitié qui avait survécu jusque là. Ils n'avaient pas tout le temps l'occasion de se voir au vu de leur horaires décalés, mais comme ce soir, ça arrivait de temps en temps

« J'ai voulu sortir voir les étoiles » dit-il, la mine un peu dépitée « mais il y a beaucoup trop de nuages... Je trouverais un sujet de peinture plus tard... quoi qu'il en soit... quoi de beau ? Ça fait quelques jours qu'on ne s'est pas croisés. »