Accroupi, Cap serrait les dents. Cette petite enquête lui rappelait bien trop une précédente, ça lui donnait la nausée. Il déballa un Werthers – l’un des rares bonbons qu’on pouvait trouver sur l’île, merci mademoiselle Dessanges – pour faire passer le goût âcre qui lui montait dans la bouche. Il avait envie de faire demi-tour mais il savait qu’il ne le ferait pas.
Il n’avait plus le choix.
Pour Dèlys.
Il s’était remis aux preuves. Il pensait depuis un moment et cet après-midi-là, il avait franchi le cap. Franchi le Cap. Ah ah.
Il fallait commencer simple. Et le plus simple pour l’heure, c’était de voir si les informations qu’il avait en sa possession étaient toujours à jour. Or, les informations qu’il avait récoltées avaient servie à la tentative d’évasion de sa sœur. D’où la répugnance. D’où la nausée.
Le système électrique, c’était parfait. Le Génie lui avait suffisamment répété les éléments essentiels pour la Révolution. Contrôler l’alimentation électrique de l’île en faisait partie. Pour pouvoir le contrôler, il fallait savoir où il était et comment y accéder. Logique.
L’avantage, c’était qu’il pouvait faire son repérage sans trop de risque. Il n’y avait rien de louche à ce qu’un patient se promène dans la forêt non ? Il ne faisait pas assez beau pour croiser beaucoup de monde mais pas assez moche pour qu’il ait l’air d’avoir une bonne raison de braver la météo.
Le véritable enjeu, ce serait de voir s’il pouvait pousser jusqu’à la lisière du Bâtiment. S’il trouvait comment provoquer une panne à l’administration… Ca ce serait vraiment utile.
Pour l’heure, il marchait juste tranquillement, les mains dans les poches à la recherche de la borne électrique qu’il savait devoir être juste au bord de la cour, à peine entré dans les racines. Il espérait qu’elle serait toujours là, ce serait un bon point de départ.
Et il réfléchissait à comment annoncer au Génie ce que la Cannibale lui avait raconté au sujet d’Adèlys…
Pour Adèlys
Il ne fallut pas longtemps à Alexander pour trouver la borne électrique. Elle se trouvait exactement où il en avait le souvenir. Il s’agit de la borne électrique qui alimente le bâtiment principal, désolidarisée de celle qui alimente le bâtiment annexe.
Elle est fermée par un gros cadenas à chiffres pour permettre au personnel de faire des roulements afin surveiller qu’elle ne nécessite pas l’entretien d’un électricien et de l’ouvrir facilement sans risquer de perdre la clé.
Il s’agit d’un cadenas à 4 chiffres et aucuns indices ne semblent permettre de connaitre ledit code. Peut-être faut-il faire un tour chez la concierge ou dans le bâtiment secondaire pour en savoir plus ?
Elle semble encore en état de fonction. On peut le supposer au léger bourdonnement qui semble se dégager de la borne.
Ne pas penser à ça. Le passé, c’était le passé. Lore, ce p’tit Caïd, n’aurait pas aimé qu’il se morfonde encore et encore sur son sort.
Un ronronnement régulier émanait de la machine, indiquant son état de marche. Il avisa un cadenas à code. Regarda aux alentours. Personne en vue.
Il ne connaissait pas le code, mais une fois, au collège, il avait oublié celui de son casier. Il savait qu’il pourrait le trouver avec un peu de temps, en faisant rouler les nombres et en sentant le jeu dans la mécanique. Si la barre métallique bougeait, même sans s’ouvrir, c’était qu’au moins l’un des nombres affiché était le bon. La vraie question, c’était est-ce qu’il allait courir le risque de se faire surprendre ?
Ses doigts coururent sur les numéros. Oui. Il était temps de prendre des risques. Il commença à faire rouler les anneaux et à vérifier la tension du blocage de mécanisme minutieusement.
Dans les premières secondes, toute son attention était concentrée sur son environnement, à l’aguet d’un son ou d’un mouvement qui puisse indiquer que quelqu’un approchait.
Pourtant, une partie de lui commença bientôt à divaguer. Il ne pouvait quand même pas laisser un post-it au Génie.
« Coucou, t’as passé une bonne journée ? Au fait, la Cannibale – je veux dire Ophelia – m’a dit qu’elle avait trouvé une chambre dans le bâtiment avec un fauteuil roulant ensanglanté. Tu te souviens des doutes qu’on avait à propos de ce cinglé d’Elpida et du départ d’Adèlys ? Des bisous. »
Il ne pouvait pas décemment faire ça. Pourquoi est-ce qu’Ophelia était venue lui dire ça à lui ? Elle l’avait vraiment mis dans une situation délicate.
Pour Adèlys
Alexander trouva le premier numéro du code relativement vite «5 », enfin, c’est ce qui lui semblait. Malheureusement, sa technique pour trouver la suite du code ne semblait pas probante, la barre métallique du cadenas ne semblait plus vouloir bouger. Peut-être était-ce dû à son état ? En effet, à force d’être arrosée par la pluie et de subir les intempéries extérieures, elle était un peu rouillée et plus difficile à manipuler qu’un cadenas neuf. Si cette rouille pouvait être considéré comme une malchance dans le cas où l’on essayait d’ouvrir ce cadenas en cherchant son code, elle pouvait aussi signifier qu’en temps voulu, l’utilisation d’un outil pourrait suffire à forcer ce cadenas.
Il n’y avait toujours personne à l’horizon, mais un vigile finirait par passer dans le coin. Il restait peu de temps à Alexander pour tenter quelque chose au niveau de ce cadenas.
Il abandonna l'idée d'ouvrir la borne. Prendre des risques, ce n'était pas non plus être imprudent et tôt ou tard, quelqu'un risquerait bien d'arriver. Mieux valait qu'on ne le surprenne pas avec le cadenas dans les mains. Il s'agenouilla, faisant mine de refaire le lacet de ses baskets, cherchant à voir si la terre lui permettrait de voir par où se dirigeait les câbles. Il savait qu'il y avait peu de chances, les câbles étant certainement enterrés profondément.
C'était dur, mais il faudrait pourtant bien le dire au Génie. Il méritait de savoir ce qui était arrivé à Adèlys. Pour qu'il puisse contribuer à éclaircir l'affaire. Pour lui rendre justice. La venger si nécessaire.
Le problème, en plus du manque de délicatesse de l'apprendre par écrit, c'était justement que ce-dit écrit constituerait une preuve au cas où il tomberait en de mauvaises mains. Il ne pourrait pas prendre le risque de le laisser en évidence sur son bureau pour qu'il le voit. Il faudrait le mettre ailleurs. Mais où pourrait-il le mettre de façon à ce que seul le Génie puisse tomber facilement dessus ?
Il se releva, ayant terminé son observation. Il allait changer de méthode. Il devait y avoir un personnel spécifique qui s'occupait de la maintenance électrique. Et ce personnel devait bien avoir une carte. Il allait jeter un oeil du côté de la conciergerie de l'aile X, là où il était le plus légitime à se trouver.
Pour Adèlys
- Dites ! Ou allez vous comme ça, jeune homme ?
Il est sûr qu’à cette heure-ci, il ne devrait pas voir se promener de mioches dans les couloirs. Il s’était déjà fait drôlement secoué par la hiérarchie récemment, il tenait à son job. Mais bon, ce gosse avait peut-être une bonne raison.
Il vit de loin qu'il y avait un vigile devant la porte qu'il devait emprunter pour la conciergerie. Ouch. Il fut tenté de faire demi-tour mais ça aurait certainement été encore plus louche : il l'avait sûrement déjà vu aussi. Il continua donc son chemin, espérant qu'il ne dise rien et...
- Dites ! Ou allez vous comme ça, jeune homme ?
Raté. Bon. Il allait devoir improviser. Il s'arrêta et prit son air le plus innocent possible.
- Je cherchais quelqu'un pour m'aider m'sieur. J'ai la porte de ma chambre qui coince et j'arrive plus à entrer.
Le bon côté de ce mensonge, c'était qu'il n'en était pas vraiment un. Sa porte coinçait de plus en plus, il l'avait encore constaté ce matin. En réalité, en forçant un peu elle s'ouvrait mais si le vigile voulait vérifier, il aurait de quoi se mettre sous la dent. Tout au pire, il passerait pour un faiblard incapable et ça, il n'avait pas assez d'égo pour s'en sentir affecté, contrairement au Génie.
- J'pensais qu'à la conciergerie, je pourrais trouver quelqu'un libre pour venir voir. Ajouta-t-il pour faire bonne mesure.
Le "libre" n'était pas innocent. C'était plutôt pour rappeler à ce type qu'il était sûrement en service et que ça ne servait à rien qu'il se déplace lui-même pour ce genre de problème.
Pour Adèlys
- Je cherchais quelqu'un pour m'aider m'sieur. J'ai la porte de ma chambre qui coince et j'arrive plus à entrer.
Le vigile hocha la tête. Il ne savait pas si quelqu’un se trouvait à la conciergerie, mais ça ne pouvait pas faire de mal que le gamin aille voir. Il pourrait toujours signaler son numéro s’il se passait quelque chose là-bas. Et il avait faim, il voulait aller récupérer un petit truc sympa à manger à la cafet, avant que les mômes ne débarquent.
- J'pensais qu'à la conciergerie, je pourrais trouver quelqu'un libre pour venir voir.
Il eut un sourire presque paternel. Il l’aimait bien décidemment le petit.
- Ok petit, et si tu ne trouves personne à la conciergerie, vient me trouver du côté du bâtiment du personnel, je viendrai voir ce que je peux faire.
Alexander pu donc continuer sa route et constata que la porte de la conciergerie ne semblait pas fermée… Quel chanceux !
- Ok petit, et si tu ne trouves personne à la conciergerie, vient me trouver du côté du bâtiment du personnel, je viendrai voir ce que je peux faire.
Le "petit" confirma son impression. Il devait avoir un vague air qui lui faisait penser à un de ses gamins ou neveux ou quelque chose comme ça. En tout cas, ça l'arrangeait bien. Cap lui offrit un sourire éclatant de gratitude et de naÎveté.
- Merci beaucoup m'sieur ! J'oublierais pas !
Ah que non il n'oublierait pas. Parce que le "m'sieur" venait de lui fournir une excuse parfaite pour aller fureter du côté du bâtiment du personnel, endroit où il risquait d'avoir de sacrés ennuis s'il était pris. S'il pouvait y passer aujourd'hui, il pourrait toujours fournir ce graal de la porte coincée et de la proposition d'aide.
Il se dirigea donc vers la conciergerie. La porte était entrouverte. Il y glissa un oeil : personne. Une aubaine. Par contre, si le concierge n'avait même pas pris la peine de pousser la porte contre, c'est qu'il n'avait pas l'intention de partir très longtemps. Il fallait faire vite.
Il entra et ouvrit quelques tiroirs au hasard. Il ne savait même pas ce qu'il cherchait au juste. Un plan ? Le code du cadenas ? De l'outillage électrique ? N'importe quoi ferait l'affaire du moment qu'il ne se faisait pas attraper.
Pour Adèlys
Il ne semble pas y avoir trace du code du cadenas dans les tiroirs cela dit. Il doit être ailleurs. Peut-être sur l’ordinateur qui trône sur le bureau du concierge ? Ou encore sur l’un des nombreux post-it qui sont collés de manière désordonné sur la porte de l’armoire situé à sa droite.
Il parcourut le mode d'emploi des bornes, essayant de retenir un maximum d'informations. Ca aurait probablement mieux fonctionné s'il avait pu appeler le Génie mais il ferait avec sa tête à lui. Il ne voulait pas prendre le risque de les emmener mais... Il se mordilla la lèvre inférieure. Il ne savait pas trop pourquoi mais une petite voix lui soufflait d'emporter le multimètre et les fusibles. Et tant qu'à emporter ça... Il pouvait aussi bien emporter le mode d'emploi non ? Il jeta un oeil dans l’entrebâillement de la porte. Il ne voyait personne et le couloir était silencieux. Est-ce qu'il allait tenter sa chance ?
Il inspira un grand coup et planqua le contenu du tiroir dans l'élastique de son pantalon. Autant on ne voyait pas les papiers, autant le multimètre et les fusibles ne résisteraient pas à un examen visuel longtemps. Il faudrait qu'il s'en débarrasse vite.
Il jeta un oeil rapide aux post-its dans l'espoir de trouver une derrière info intéressante avant de sortir de la pièce. Il devait trouver une cachette pour son larcin et vite. Pas sa chambre, c'était trop impliquant. Il avait une autre idée en tête. Retourner du côté de la borne électrique qu'il avait visitée précédemment. Là, il pourrait trouver un endroit pour tout cacher et si jamais quelqu'un tombait dessus, il pourrait toujours penser qu'un agent d'entretien tête-en-l'air l'avait oublié là. Dans tous les cas, personne ne pourrait relier cette trouvaille à lui. Quant à la disparition... Il comptait ensuite se précipiter vers le bâtiment du personnel pour retrouver son vigile. Il lui dirait que le bureau était fermé et de cette façon, il aurait un alibi.
Après un dernier regard aux post-its, il sortit de la pièce dans l'intention d'exécuter son plan.
Pour Adèlys
Alexander aurait pu le rater s’il n’avait pas tenté un peu plus tôt de forcer le code du cadenas, mais il remarque parmi les post-it, une série de 5 chiffres. Est-ce le code qu’il recherche ? En tout cas cette série commence par un 5 alors c’est possible. 53102. Mais rien d’autre d’indiquer nul part. Il pourra tenter le code sur le cadenas, on ne sait jamais. Des bruits de voix un peu plus loin dans le couloir peuvent cependant l’alerter. Il lui reste très peu de temps pour quitter la conciergerie avant que quelqu’un n’arrive jusque là. Heureusement, Alexander avait été vif et se dirigeait déjà une nouvelle fois vers la borne.
Il put cacher ces trouvailles dans un buisson épais à proximité de la borne. Il tenta le nouveau code, mais celui-ci ne semblait pas fonctionner. Définitivement, ce cadenas semblait lui résister... Il ne lui restait plus qu'à aller jeter un coup d'oeil à la borne électrique du bâtiment du personnel...
Il traversa la forêt replantée en courant à moitié et en répétant en boucle le numéro pour le mémoriser. Il ne ralentit le pas qu'arrivé devant le Bâtiment, histoire de ne pas avoir l'air trop transpirant et essoufflé, donc louche.
Son vigile bonne étoile n'était pas en vue pour l'instant. Il entreprit donc de fureter aux alentours. Ce qu'il cherchait, c'était bien évidemment la borne électrique du Bâtiment. S'il la trouvait, ce serait un sacré avantage. Encore plus si par bonheur, le code qu'il avait découvert permettait d'y avoir accès sans casse. Il cherchait donc, des yeux seulement pour ne pas paraître trop louche dans un endroit bourré d'empêcheurs de tourner en rond.
Pour Adèlys
Alexander n'eut aucuns mal à trouver la borne électrique, toute proche du bâtiment principal. Aucuns vigiles ne semblaient trainer dans les environs. Le champ était libre. Et en plus, comme si cela ne suffisait pas, le code qu'Alexander pu essayer sur cette borne ci marchait effectivement ! Il avait donc accès au panneau électrique du bâtiment principal.
Le visage de l'adolescent prit soudain une allure plus grave. Il venait de saisir l'importance de sa découverte pour la Révolution. Avoir accès à l'alimentation électrique du Bâtiment ! Quelle chance inespérée ! Il ne fallait pas tout gâcher maintenant.
Il referma le tableau et le verrouilla de nouveau, prenant soin de remettre les chiffres dans une position incorrecte pour qu'on ne se doute pas qu'il avait été ouvert. Il ne prendrait pas plus de risques pour aujourd'hui. A être trop gourmand, on risque de tout perdre, comme on dit au poker.
Il s'éloigna et finit par aller à l'entrée du Bâtiment pour demander aux vigiles si son nouvel ami n'était pas dans le coin. Il n'avait trouvé personne à la conciergerie et sa porte était toujours coincée. Si en le voyant arriver, ils avaient eu l'air méfiant, son petit numéro de gamin naïf semblait fonctionner. Bientôt, le vigile dont il avait un peu abusé vint au devant de lui et le raccompagna devant sa chambre où il s'attela à débloquer la porte. Cap put enfin s'affaler dans son lit après un dernier sourire et un merci rayonnant. Il culpabilisait un peu d'avoir utiliser ce type de la sorte mais il était convaincu d'une chose : il venait de faire une découverte qui s'avèrerait peut-être capitale.
Pour Adèlys
Le vigile aide Alexander à débloquer sa porte. Rien de suspect à signaler à sa hiérarchie. Tout ce fini bien
CONSEQUENCES :
- La preuve est positive
- Alexander possède des fusibles
- Il a le code du cadenas du panneau électrique du Batiment du personnel.
- Le vigile aime bien Alexander et cela pourrait jouer dans le futur
- Le concierge remarquera la disparition des fusibles mais pensera que c'est l’œuvre du technicien électrique, par mesure de précaution, il changera tout de même le code... Mais celui du bâtiment des patients.