18 avril.

Le soleil n’était pas vraiment au rendez-vous. Le jeune homme regardait le monde de la fenêtre de sa chambre, repensant à beaucoup de choses, à sa discussion avec Ruhiel mais surtout celle avec Donatien. Etait-ce une manigance pour le faire revenir vers lui ? L’ancien médecin lui avait tout de même proposé de revenir au bunker avec Katerina et leur enfant à naître alors que l’écossais venait de lui avouer qu’il avait désobéit à tous ses avertissements ; l’amour, le sexe, entre autre.
Nevrabriel tressa ses cheveux dans ses réflexions afin d’occuper ses mains, mais aucune de ses interrogations intérieures ne trouvait de réponses.  Cela en plus de ses interrogations sur sa relation avec son épouse. Il avait l’impression d’aller droit dans le mur concernant son entourage. Mais s’il était certain d’une chose, c’était qu’il ne retournerait pas au bunker, pas avec cet animosité qui régnait entre lui et les femmes qui y résidaient. Encore moins si Lucy n’y était pas. Et de toute manière Katerina refuserait de le suivre… ce qui était assez ironique vu que lui avait tout abandonné pour elle, elle serait surement incapable de faire la même chose même si sa santé de la retenait pas. Le jeune homme devrait peut-être lui poser la question au détour d’une fausse plaisanterie ? Mais était-il certain de vouloir connaitre la réponse ? Ceci était une autre histoire.

Nevrabriel remonta tout ses cheveux pour les attacher en un chignon, trouvant qu’ils commençaient à arrêter de pousser à causes des pointes abimées. Les faire couper allait devenir urgent mais il n’avait pas confiance aux mains des autres pour cela, sauf peut-être de Lucy. Il devait penser à le lui demander.

Le jeune homme alla vers sa veste rangée dans l’armoire et fouilla dans ses poches pour trouver le cadeau que Donatien lui avait offert. Même si l’ancien médecin avait demandé une partition sur les fleurs, ses fleurs, cela touchait tout de même l’écossais. Devrait-il les jouer à son ancien mentor un jour ?

Pourquoi avait-il autant de questions ?

Nevrabriel soupira avant de prendre sa veste, replier les partitions pour les remettre dans sa poche. Il prit ses clés, son canif, un stylo, le lacet d’Ophelia, enfouie le tout dans ses poches et quitta les lieux. Sur le chemin, le jeune home regarda les arbres qui avaient retrouvé leurs feuilles. Il regarda les fleurs qui poussaient à leur rythme. La vie continuait, les gens changeaient, en bien apparemment vu que Donatien avait montré un visage sentimental et humain que Nevrabriel ne lui connaissait pas, apparemment Jessy était impatient d’être père.
Les gens changent …
D’autres se dévoilent …
Nevrabriel changeait, il le sentait. Mais il ne changeait pas en bien. Il sombrait lentement dans une lente mélancolie. Il se sentait trop abimé à l’intérieur. Il n’avait jamais parlé de sa relation chaotique à Lucy mais il avait l’impression que cette fois elle pourrait comprendre. Maintenant qu’elle avait tiré un trait sur son amour pour lui, elle pourrait pleinement l’entendre parler de Katerina. Elle ne lui donnerait pas de conseils s’il ne voulait pas les entendre, elle ne ferait pas en sorte de l’abimer davantage si elle savait par quoi est-ce qu’il était passé ces derniers temps, pourquoi est-ce que les expressions de son visage étaient devenues avares et paresseuses.  Mais il n’était pas sûr de le lui avouer pour le moment. Il avait l’impression qu’avouer ses inquiétudes rendraient la rupture imminente et ce n’était pas ce qu’il voulait, pas encore.

Nevrabriel arriva finalement à la porte de son amie. Il toqua, l’attente l’aida à réfléchir, encore. Aujourd’hui pas de matériel de soin, pas de savon, pas de ressources, pas de douceurs. Le ciel était terne, annonciateur de pluie mais l’air était vivifiant, lui rappelant sa virée à l’extérieur en t-shirt dans la neige. Katerina avait pleuré ce jour-là. Il l’avait porté à sa chambre et ce qui s’annonçait une triste soirée était en fait merveilleuse. Pourquoi la suite de l’histoire ne pouvait pas être tout aussi magnifique ?

Lorsque la porte s’ouvrit sur le visage radieux de Lucy, Nevrabriel ne fit rien d’autre que la regarder sans aucunes expressions. Il resta planter là, fixant son œil unique pendant ce qui semblait être une minute interminable. Il voyait sa bouche s’ouvrir et se refermer mais ne l’entendait pas vraiment. Elle lui avait surement dit « bonjour » ou « bonsoir » et le reste sera à jamais indéchiffrable.
Lorsque Lucy fit un mouvement ver lui, sans un bonjour ou un sourire, il demanda à sa vieille amie :

_Tu veux bien te promener avec moi ?

Ce n’était peut-être pas très malin pour une femme enceinte de sortir sous un temps couvert qui annonçait peut-être de la pluie mais Nevrabriel ne voulait pas être enfermé, il se sentait déjà bien trop enfermé en lui pour regarder quatre murs l’étriquer. Le jeune homme se résigna très vite dans ses envies cependant. Il ne voulait pas mettre la santé de Lucy en danger à cause de son besoin de respirer.

_Ou si tu ne veux pas, parlons d’ici.