« La beauté du ciel est dans les étoiles, la beauté des femmes est dans leur chevelure »

Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

Cela fait quelques semaines que je suis ici et je commence à bien m’intégrer dans l’institut. Je ne suis pas entièrement d’accord avec leur mode de fonctionnement concernant les patients et les cours mais je me contente de faire ce qu’on me demande, pour ne pas éveiller les soupçons. Les cours se passent plus ou moins bien, et j’arrive à gérer les enfants. Ils ne sont pas méchants après tout, et puis, il ne faut pas que j’oublie leurs pathologies. Ça ne doit pas être facile pour eux non plus. Je ne peux pas me plaindre, je suis déjà bien contente de voir la majorité réceptive à mes cours.

J’essaye de rester douce, de ne pas les juger et de m’adapter à chaque cas. Ce n’est évidemment pas facile tous les jours, mais je sais que ça deviendra plus facile avec le temps. Il suffit de continuer les efforts et d’être patiente. Mais ce qui me perturbe le plus… ce sont ces numéros, qui les déshumanise tellement… Ça me met mal à l’aise quand je dois interroger l’un deux. Il va falloir t’y faire Lilith… Ce n’est pas toi qui décide. Je pousse un soupir alors qu’ils sortent tous de la salle. Je les observe partir, leur souhaitant une bonne journée et me tourne pour effacer le tableau, dans mes pensées. Il faut que j’en sache plus… J’aimerais parler avec eux… mais jusqu’à maintenant, je n’ai pas vraiment pu… me retrouvant souvent face au Dr.Elpida…

Je finis d’effacer le tableau quand j’entends quelqu’un cogner à la porte. Je sursaute. Encore lui ? Mais quand je croise le regard de mon interlocuteur, je suis surprise de voir le directeur. Oh ! Euh ! Je me reprends, prise au dépourvue, et essuie ma robe noire de mes mains pour me rendre plus présentable.
 

▬ Mademoiselle O'Brien, bonjour. Tout se passe comme vous le voulez ?

Je descends de l’estrade pour me rapprocher de mes affaires et lui souris poliment. C’est… gentil de sa part de s’inquiéter pour mon intégration. C’est surprenant aussi. Je pensais qu’il aurait mieux à faire que de s’inquiéter pour une pauvre professeure. Je veux dire… je n’ai pas vraiment un rôle primordial dans cet hôpital. Il est important ! Je ne dénigre pas mon métier mais… Les médecins sont hiérarchiquement au-dessus dans ce cas. Alors forcément, je m’interroge. Alors, gardant mon masque sur le visage, je lui réponds avec le sourire, faussement touchée par sa prévenance.
 

▬ Monsieur Barrabil ! Bonjour ! Euh oui. Tout se passe à merveille, merci. Les enfants sont très attentifs et actifs. Je n’ai pas à me plaindre. J’ai… juste un peu de mal avec les numéros mais ça va venir.

Je ris doucement et lui souris poliment, remettant une mèche de mes cheveux derrière mon oreille pendant que je range mes affaires. Je récupère tous mes livres pour les organiser dans mon sac et une fois tout récupéré, je glisse la lanière sur mon épaule pour finalement me tourner vers le directeur. Je dois avouer qu’il est bel homme, et j’ai été surprise quand il est venue m’accueillir au port. Je m’attendais à un vieil homme grincheux pour finalement me retrouver face à un beau jeune homme d’à peu près mon âge.
 

▬ Vous avez besoin de quelque chose ? Je peux peut-être vous aider.

Je ne sais pas s’il est simplement venu pour prendre de mes nouvelles ou pas, alors je préfère demander. Ce n’est pas que je trouve louche toutes les personnes qui viennent me parler mais… il faut que je reste sur mes gardes. Il faut que je me protège.

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Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

Je ne m’attendais pas à avoir la visite du directeur et une petite part de moi est un peu inquiète. Que se passe-t-il ? Il y a un problème ? Ou vient-il vraiment pour avoir des nouvelles et savoir comment se passe mon intégration ? Je suis prise au dépourvu. Mais j’avoue préférer sa visite à celle du docteur Elpida. C’est donc après qu’il m’ait demandé si tout se passe bien, que je lui réponds tout en rangeant mes affaires. Je ne peux être qu’honnête pour le moment, ce n’est pas une question bien compliquée. Mais je lui avoue avoir quelques soucis avec les numéros des enfants. C’est si étrange de devoir les appeler par des numéros si… déshumanisant. Je me souviens du numéro de Mia… c’était A18. Et rien que de penser qu’on ait dû l’appeler comme ça pendant plusieurs années c’est… en est-elle arrivée à oublier son véritable prénom ? Toutes ces pensées me rendent terriblement triste, mais maintenant que je suis sur le lieu de sa mort, je ne peux pas m’empêcher de les avoir…

Le directeur me confie que lui aussi, il avait un peu de mal et je dois avouer que ça me perturbe. Si le directeur même n’y arrivait pas, pourquoi les garde-t-il ? À quoi servent-ils ces numéros exactement ? Je ne comprends pas. Mais je me contente de lui sourire poliment et de glisser mon sac sur mon épaule pour me tourner vers lui. Bon ce n’est pas tout mais… il veut quoi exactement ? Gardant mon masque poli, je lui demande en quoi je peux l’aider et il me sourit pour finalement me signifier qu’il n’a besoin de rien d’un signe de tête. Sérieusement ? Mais alors qu’est-ce qu’il fait là ? Pas que je n’apprécie pas sa présence, qui n’apprécierait pas la présence d’un bel homme comme lui. Lilith ! Qu’est-ce que tu racontes ?! Mais… enfin… j’ai possiblement des choses à faire comme… corriger les exercices !

 

▬ Je me demandais si vous aviez du temps à m'accorder. Et vous pouvez parfaitement dire non, je viens un peu à l'improviste donc je comprendrais si vous avez déjà des plans.

Du temps à lui accorder ? Surprise, je l’observe interdite. Qu’est-ce qu’il veut dire par là ? J’avoue que je suis un peu perdue. Je pensais qu’il y avait un problème, mais si c’était le cas, il me demanderait de venir dans son bureau, non ? Je cligne des yeux, serrant ma main sur la lanière de mon sac alors qu’une petite voix dans ma tête me murmure qu’il tente de me draguer. Je renvois cette pensée indécente au loin rapidement. Non. Ce n’est pas possible. C’est mon patron enfin ! Il ne peut pas vouloir me draguer… c’est… Enfin je veux dire…

 

▬ Ça fait plusieurs semaines que vous êtes parmi nous et je voulais m'assurer que tout se passe comme vous le voulez. Que ce soit au niveau des enfants, des collègues, de l'ambiance générale. Et si vous avez des suggestions pour améliorer votre classe ou d'autres choses.

Oh ! Une boule se forme dans mon ventre alors que je ne sais pas si je suis soulagée ou déçue. C’est entièrement pour des raisons professionnelles ! Bon… c’est mieux ainsi, je ne vais pas mentir, je ne suis pas ici pour me faire des amis, et encore moins pour trouver l’amour. Surtout que trouver l’amour avec mon patron est tout simplement surréaliste. Alors je suis sauvée. Je préfère ça !... Et bien sûr, j’ignore le petit sentiment de déception qui grandi dans mon ventre pour répondre rapidement.

 

▬ Oh oui ! Bien sûr ! Avec plaisir ! J’avais juste prévu de corriger les exercices mais ça peut attendre un peu, je suppose !

Je m’approche de lui de ma démarche naturellement chaloupée, pour me diriger vers la porte de sortie de la salle de classe puis l’invite à sortir à son tour pour, ensuite, fermer la salle derrière nous. Je ne sais pas vraiment où il veut qu’on s’installe. Dans son bureau sûrement, c’est ce qui me parait le plus logique mais j’avoue que… Cela me mettra un peu mal à l’aise. Et puis… il y a cette petite envie au fond de mon esprit, ce désir d’en apprendre un peu plus sur cet homme séduisant, d’être sûre que ses intentions sont vraiment professionnelles. Car, il faut l’avouer, je n’ai pas été insensible à son charme la première fois que l’on s’est vu et j’ai toujours ce petit doute qui plane au-dessus de ma tête. Et c’est peut-être pour cela que j’ai, honnêtement, été déçue de savoir que ses raisons sont… exclusivement professionnelles.

 

▬ Vous… Où voulez-vous qu’on s’installe pour discuter ? Dans votre bureau ? La salle de repos, peut-être ?

Ou… en ville ? Je ne sais pas ce que je peux lui dire exactement. Je ne sais pas si j’ai le droit de l’inviter à boire un verre alors qu’on est censé parler de chose lié au travail. Et puis, je n’ai pas envie de passer pour l’employée qui drague son séduisant patron ! Et encore moins si je me trompe totalement sur ses véritables intentions…

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Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

J’avoue être un peu intimidée. Je ne peux pas dire que M. Barrabil n’est pas beau, et le fait qu’il soit mon patron et qu’il soit venu me parler de mon travail, ainsi que s’inquiète de mon intégration dans l’institut, me touche vraiment. Alors mon sourire n’est plus un simple sourire de façade. Je suis, bien sûr, toujours méfiante. C’est le directeur, alors il doit forcément être au courant de tout ce qu’il se passe ici… D’ailleurs… en y pensant, je pourrais peut-être avoir des infos si je m’en sors bien ! Me trouvant une nouvelle raison de lui parler, et me voilant sûrement la face vis-à-vis de mes véritables envies, je garde mon sourire et le suis, tenant fermement la lanière de mon sac, lui demandant poliment où il veut s’installer pour discuter.

 

▬ Je vous propose qu'on abandonne le vouvoiement, ça a tendance à rendre les rendez-vous moins naturels.

Je cligne des yeux, surprise par cette demande alors qu’il me sourit chaleureusement, mon cœur ratant un battement. Il veut que… je le tutoie ? Je peux vraiment faire ça ? Ce n’est pas… un peu déplacé ? Un peu trop… enfin, on ne se connait pas vraiment… Je ne lui ai jamais parlé avant et… Enfin… Légèrement rougissante, et peut-être un peu heureuse qu’il propose une chose qui met moins de distance entre nous, j’hoche timidement la tête et souris à mon tour, détournant le regard.
Je n’arrive pas à comprendre ce que je ressens. J’ai toujours été dans mes études, j’ai eu quelques expériences mais je ne suis jamais vraiment tombée amoureuse. J’ai toujours eu en tête qu’il fallait que je venge ma petite sœur, et j’en ai négligé ma vie amoureuse… Et puis… Est-ce que je peux vraiment ? Il faut que j’en sache plus. Et il y a le Dr.Elpida… il faut que je me rapproche de lui… Est-ce que je peux de permettre d’écouter mes envies ? Non… Non Lilith, ce n’est pas bien ! Il est ton patron ! Et rien ne te dit qu’il soit à ta portée…

 

▬ Et pourquoi pas dans la cour extérieure ? Je ne sais pas toi, mais j'ai besoin de prendre l'air après être resté enfermé toute la journée.

Je sursaute légèrement en l’entendant me tutoyer. C’est… étonnamment plaisant. Je pensais que je préférerais mettre de la distance mais… J’ai l’impression de le connaitre un peu plus alors que ce n’est pas le cas. C’est fou comme ça change des choses ! Et… j’aime bien. Je me mets à sourire et hoche la tête. Mais est-ce que je peux vraiment me permettre de faire la même chose ? Je sais qu’il m’a dit que oui mais… Allez Lilith~ Avoue que tu en as envie !

 

▬ Ça me va ! C’est vrai que ça me ferai du bien… Ce sera plus agréable.

Tu racontes n’importe quoi !! Reprends-toi ! Certes, il te plait, mais il reste ton patron ! Même s’il te demande de le tutoyer, et que c’est compliqué, il faut que tu restes professionnelle ! C’est pas le moment de chercher à draguer ! Surtout que t’es pas très douée pour ça… Je pousse un petit soupir, frustrée par mon incapacité à avoir une conversation normale. Je n’ai jamais été dans le social… enfin… surtout avec les gens de mon âge. J’ai toujours préféré les enfants… ils sont plus honnêtes. D’ailleurs… Il a quel âge ? Il n’est pas jeune pour être directeur ? Je sors de mes études et pourtant, j’ai l’impression qu’on est de la même génération… Il doit être vraiment doué... !
On continue de marcher en silence, pour finalement arriver dans la dite « cour extérieure ». Je ne sais pas trop quoi dire… je suis un peu perturbée par sa présence… Et c’est lui qui veut me parler, non ? Alors… Curieuse, je tourne la tête pour le regarder avec un petit sourire, cherchant peut-être à sondé ce qu’il veut vraiment.

 

▬ Et donc… Vous… Je veux dire tu !- voulais que je donne des suggestions pour améliorer les conditions en classe, c’est ça ?

Je réfléchis un instant à ce qui m’a le plus dérangé mais pour l’instant, il n’y a pas grand-chose. Les enfants sont gentils, d’autres suivent moins que d’autres mais c’est normal… Et les niveaux sont plus ou moins homogènes… Donc pour moi, ce n’est pas un problème. Et pour ce qui est des conditions de classe, il n’y a pas vraiment de problèmes… Il y a des feutres qui fonctionnent… Et puis… Ah ! Si !

 

▬ Il y a eu un problème avec le vidéoprojecteur aujourd’hui ! Il ne voulait pas se connecter à mon ordinateur… Ce n’est peut-être qu’un problème informatique… je ne suis pas très douée avec ce genre de chose… Il va falloir que je le regarde un peu plus concrètement si je veux utiliser un support internet…

Dans mes pensées, je réfléchis à ce que je pourrais faire pour comprendre comment ça fonctionne. Peut-être prendre un temps pour tout installer avant le cours ? Oui. Sûrement. Je pense qu’il faudra que j’installe tout en amont pour être sûre de ne pas être prise au dépourvu au moment du branchement… Oui… c’est la meilleure solution.

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Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

Je ne sais pas quoi dire. J’ai l’impression de dire n’importe quoi… Je ne suis pas ridicule ? Je l’impression de l’être. Est-ce que ce n’est pas cramé qu’il me plait ? Si ça l’est alors je n’aurais qu’à me cacher dans mon lit pendant plusieurs mois, le temps qu’il m’oublie pour ensuite reprendre mes fonctions comme si de rien était. J’ai l’impression d’être une gamine ! Une gamine de 24 ans ! C’est pas possible… Il faut que je me reprenne, que je sois adulte, élégante, mature… Je suis tout ça ! Je le sais. Mais sa présence me met mal à l’aise ! Je n’arrive pas à savoir sur quel pied danser. Je meurs d’envie de me rapprocher de lui, discrètement, mais le fait qu’il soit mon patron… et ma vengeance contre le Dr. Elpida m’en empêche. Je ne sais pas quoi faire… J’ai envie d’écouter mes envies pour une fois… Pour une fois que je rencontre un homme qui… indéniablement… me plait…
Je n’ose pas vraiment le regarder dans les yeux mais je me force tout de même pour chasser cette timidité presque enfantine qui me prend les tripes. Sois adulte Lilith. Assume-toi ! Tu peux le faire ! Vous être sur un pied d’égalité ! Même si… tes expériences… se limitent à une personne… En arriverais-je à regretter de m’être focaliser sur mes études pour en négliger la vie privée ? Oui. C’est incontestable…
J’essaye donc de faire la conversation, répondant à cette question qu’il m’avait précédemment posée. Les conditions de travail ! Il acquiesce en silence et je réponds après une certaine réflexion que le vidéoprojecteur ne fonctionne pas bien. Mais… quelle imbécile !! Il s’en moque ! Je me mords la joue, regrettant mon commentaire si peu constructif… Et quand, timidement, je pose mon regard sur son visage pour le voir surpris et…interdit, je me maudis d’avoir parlé. Ce n’est pas possible !!

 

▬ Ah oui, je demanderai aux mécaniciens d'y jeter un œil.

Voilà… preuve que mon commentaire n’était pas intéressant ! Une demande faite aux mécaniciens et c’est réglé… Je me sens bête. Après, je ne peux pas mentir, je n’ai pas encore énormément d’expériences. Je sors tout juste de mes études. Je sais que je suis capable de le faire, je serais une bonne professeure pour ces enfants, c’est aussi mon but et je l’accomplirai, mais il me faut tout de même un temps d’adaptation…
De nouveau silencieuse, je marche, regardant devant moi, serrant nerveusement la lanière de mon sac. Je ne sais pas quoi dire. J’ai envie de lui parler… J’ai envie d’en apprendre plus sur lui mais… ce serait déplacé, non ? Je n’arrive pas à savoir ce que je peux ou dois faire en sa présence… Personne n’est aux alentours, seulement quelques patients qui passent par là et ne font pas véritablement attention à nous…

 

▬ Tu ne regrettes pas d'être partie du continent ? Peu rentrent régulièrement voir leur famille ou amant. Je sais que ça peut être pénible, le manque de voir ses proches.

Je lève les yeux vers lui, surprise par cette question. Il me pose des questions sur mes proches ? Ça… l’intéresse ? Pourquoi ça l’intéresse ? C’est étrange en tant que directeur… C’est peut-être un directeur qui fait aussi attention au bien-être mental de ses employés ? Oui c’est possible ! Ça me parait logique finalement. Je le suis, souriant timidement, heureuse malgré tout qu’il s’intéresse un peu à moi, et je n’ai pas le temps de répondre qu’il ajoute.

 

▬ Pour ma part, même si ma famille et amis me manquent, je ne regrette pas d'être ici. Je veux dire, je fais un métier que j'aime et j'ai rencontré des personnes incroyables. Agnès, ma secrétaire par exemple, ou même Hyppolite. Si tu veux te faire des amis, ces deux-là sont les personnes les plus douces et compréhensives que j'ai rencontré.

Sa réponse me fait sourire. Un sourire sincère, peut-être le premier depuis que je suis ici, se dessine sur mon visage. Peut-être que je pourrai me détendre un peu ? Peut-être que je pourrai parler sincèrement ? Bien sûr, je n’aborderai pas la véritable raison de ma venue ici mais… je peux parler sans soucis, non ? Alors, continuant de marcher, je lui réponds avec un doux sourire.

 

▬ Merci pour les conseils… Il m’est déjà arrivé de croiser Mademoiselle Dessanges, elle a effectivement l’aire très gentille. Pour te répondre… non. Je ne regrette pas. J’ai toujours voulu enseigner à des enfants en difficultés alors je n’ai aucun regrets. Et puis… pour être honnête. Il n’y a pas grand monde qui me retient sur le continent. Peut-être mes parents… mais c’est tout.

Accélérant un peu le pas pour le devancer un peu, je me retourne pour lui faire face, tout en marchant à reculons, un sourire aux lèvres. C’est étrange de parler de soi… Ce n’est pas commun chez moi, mais… je dois avouer que c’est agréable. J’aime à penser qu’on puisse parler de manière égale et que la conversation continue de manière naturelle pour qu’on puisse devenir amis. De véritables… amis. Je n’ai pas pour habitude de parler de moi. Je suis secrète et souvent impulsive… Ce qui fait souvent fuir les gens mais… j’aimerais vraiment me rapprocher de lui… J’espère simplement qu’il ne fait pas partie de ces gens fous qui seraient responsables des mauvaises actions de l’institut… J’en serais vraiment déçue. Puisqu’alors… il deviendrait mon ennemi. Marchant toujours à reculons, je continue donc la conversation, me permettant de lui parler comme n’importe qui parlerait à un collègue… J’espère simplement qu’il ne trouvera pas ça déplacé…

 

▬ Tu es ici depuis longtemps ?

Je n’ai pas le temps de finir ma phrase que mon talon cogne contre quelque chose, me faisant perdre l’équilibre vers l’arrière.

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Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

Honnêtement, je ne sais pas si je dois maudire cette racine ou la remercier. Mon cœur bat à la chamade alors que la peur de tomber et de me faire mal m’envahit. C’est comme si tout s’était passé lentement. Je trébuche, puis sans une main puissante empoigner mon bras pour me ramener et m’empêcher de tomber. Puis son autre main se glisse au niveau de mes reins pour d’abord me maintenir contre lui et je sens mon cœur manquer un battement. Son odeur masculine emplit mes narines et j’ai comme la tête qui tourne. Les mains contre son torse, je ne bouge plus, le regard rivé sur le col de sa chemise alors que je sens mes joues chauffer à cause de notre proximité. C’est…agréable. Je sens sa force qui maintient bien contre lui et c’est… un peu embarrassant mais… Enfin…

Mais rapidement, il m’éloigne de lui, me tenant par les épaules et j’essaye de reprendre mes esprits. Mais son regard rivé dans le mien me laisse suffocante. Je… Mon cœur ne se calme pas. C’était la peur… Oui. C’est sûrement la peur. Il n’y a pas d’autre explication possible. Enfin… C’est la seule explication que je peux accepter.
Il me demande alors si je vais bien, si je ne suis pas blessée, et j’hoche silencieusement la tête, incapable de dire quoique ce soit. Je suis si embarrassée par cette soudaine maladresse que je sais que je vais balbutier… Et c’est hors de question ! Il faut que je reprenne mes esprits. Tout va bien ! Il s’inquiète simplement pour moi.

 

▬ Ta cheville va bien ?

Retrouvant doucement mon attitude habituelle, mais mes joues gardant cette rougeur insupportable, je m’éloigne un peu de lui et lui souris timidement. Il faut que je le rassure. Je suis une adulte. Je peux très bien gérer ce genre de chose ! Même si… sa proximité me perturbe.

 

▬ Tout va bien. Je ne l’ai pas tordue. C’est simplement la racine…

Je tourne la tête pour regarder la coupable et pousse un soupir avant de me retourner vers lui, riant nerveusement.

 

▬ Merci de t’être inquiété pour moi. Ça va. Je vais… arrêter de marcher en arrière. C’était stupide de ma part.

Je suis complètement débile ! J’aurais dû me douter qu’il y aurait des racines ! On n’est pas véritablement en ville… Je m’éloigne alors encore, écoutant mon cœur se calmer doucement. J’espère que je ne l’ai pas dérangé… On était quand même plutôt proche, et rien que d’y penser, son odeur me revient en mémoire. Il sent bon. Est-ce qu’il met du parfum ? Je pense qu’il pourrait être ce genre d’homme. Enfin, ça ne m’étonnerait pas. Après, peut-être que c’est son odeur naturelle et dans ce cas… Oh mon dieu. Je rougis encore et reprend nerveusement la marche, faisant désormais attention où je mets les pieds.
Bon… J’en étais où ? Ça va m’être étrange de lui parler sans vraiment le regarder mais avec le sentier et mes talons, je n’ai visiblement pas trop le choix.

 

▬ Donc… Je disais. Tu travailles ici depuis longtemps ?

En fait, s’il pouvait oublier ce passage embarrassant… ça m’arrangerait. Je ne suis initialement pas quelqu’un de maladroit, et je n’ai pas envie qu’il se fasse une mauvaise image de moi… Il me plait… Vraiment, et je n’aimerais pas que quelque chose de si stupide gâche tout. Je ne sais pas jusqu’où ça pourrait aller avec lui. Je ne suis pas une habituée des romances et des petites dragues alors j’avoue que ça m’intrigue. Mais c’est quand même mon patron… Est-ce que je peux vraiment faire ce que je veux ? Et puis, ça se trouve, il est déjà pris ?! Ce ne serait pas étonnant… Un bel homme… brillant…fort… et possédant une si bonne odeur… C’est impossible qu’il soit célibataire. Mais je ne peux pas me résoudre à lui demander.

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Lilith O'Brien, c'est bien ça ?

Son contact m’avait électrisé, et c’est en un quart de seconde que j’ai su que j’allais en rêver ce soir… Cet homme me perturbe. Mais, au fond, une petite voix me dit de me reprendre. Je ne connais rien de lui. Je ne sais pas s’il fait partie des méchants ou non. Et honnêtement, j’espère qu’il n’en fait pas partie… Mais je ne suis pas venue ici pour vivre une petite amourette de printemps… Je suis venue ici pour découvrir ce qui est arrivé à ma sœur, et je n’ai pas le droit de me détourner de cet objectif. Alors calme-toi, mon cœur !!
J’inspire profondément, essayant d’ignorer les messages évidents que m’envoie mon corps et tente de relancer la conversation. Il faut que j’oublie. Je me suis embarrassée devant lui, même si… j’avoue que je ne regrette pas. Est-ce que j’aurais pu me retrouver dans ses bras, comme ça ? Si je n’avais pas trébuché ? Je ne pense pas. Alors non, je ne regrette pas, au contraire. Puis il répond à ma question, et je le regarde avec surprise. 5 ans ? Il est arrivé ici à quel âge exactement ? Il ne parait pas si vieux pourtant…

▬ Ça fait quelque chose de se dire que j'ai passé cinq années de ma vie ici. J'en ai fait du chemin depuis que je suis arrivé ici. Je ne pensais pas du tout pouvoir être Directeur par exemple.

Alors il n’a pas toujours été directeur. Ça me rassure un peu. C’est un peu plus logique. Je souris doucement l’écoutant. Il s’avance et je le suis, en silence. Je ne lui pose pas de questions sur son travail, j’aimerais, mais cette histoire de racine m’a un peu intimidée. J’aimerais lui partager mes années en tant qu’étudiante, mais je me retiens. J’ai peur de me mettre à parler de ma sœur, de sa venue ici, de son décès. Il faut que j’évite. Je sais que l’émotion prendra le contrôle et j’ai peur que ce bien-être, que je ressens à ses côtés, me fassent dire des choses que je regretterai. Après tout, c’est le directeur, il est sûrement au courant pour Mia.

▬ Il est temps de rentrer je pense. Une grosse journée nous attend demain.

Oh ? Déjà ? Je sens quelque chose tiré dans mon ventre. Comme de la déception. J’aurais aimé rester un peu plus longtemps… Mais il a raison. C’est le directeur. Il doit avoir énormément de travail alors, je lui souris et hoche la tête. Il a raison… Il faut rentrer.
Cette fois, je regarde où je marche pendant le trajet. Et quand je relève les yeux et regarde autour de moi, silencieuse, je reconnais le bâtiment des chambres des employés. Ça y est. C’est fini. Honnêtement, j’espère qu’on pourra se parler encore, je veux en savoir plus sur lui.
Il se place devant moi, et je lève les yeux vers son visage. J’ai du mal à respirer. Je déglutis discrètement et inconsciemment, mes dents viennent mordre ma lèvre inférieure. Qu’est-ce qu’il va se passer maintenant ? Puis, son sourire éclaire son visage et mon cœur manque un battement.

▬ Je te souhaite une excellente nuit, Lilith.

▬ O-oui… Bonne nuit.

Après un petit temps d’hésitation, je finis par tourner les talons et entrer dans le bâtiment. C’était quoi ça ? Pourquoi il me met dans cet état ? Je n’ai jamais ressenti ça… Est-ce parce qu’il est carrément mon type d’homme ? Je baisse les yeux, sans m’arrêter de marcher et sourire en coin, timidement, les joues rosies.

Fiche par Sánsa ; sur Never-Utopia