Aeden se reprenait doucement. Il avait quitté son rocher, face à la mer. Il n’avait pas fait grand-chose encore mais il essayait de se donner les moyens de devenir une meilleure personne. Pas pour les autres. Il devait oublier les autres sinon il se perdrait encore. Juste pour Elizabeth. Et Wendy.

Elizabeth lui avait dit qu’elle essayerait de lui pardonner. Qu’ils pourraient se revoir. Mais il n’avait pas encore revu Wendy. Et tout lui semblait si fragile… Il avait peur que le moindre faux mouvement ne fasse s’effondrer l’idylle comme un château de carte. Et puis, il y avait Donatien Elpida et le Bunker. Wendy y était en sécurité, et elle s’était adaptée à ce nouvel environnement. Jamais le médecin n’accepterait d’y voir Aeden, il en était certain. Pour ça, le jeune surdoué essayait de mieux manger, il voulait au moins être présentable. Peut-être qu’il aurait une chance ? Même s’il en doutait.

C’est la fumée qui attira son attention.
En quittant son rocher, il s’était mis à marcher plus loin, redécouvrir qu’il y avait un monde au-delà de la plage. Il avait découvert le cimetière. Il ne s’y était jamais rendu tout ce temps. Ça avait été un moment difficile. Plus qu’il ne l’aurait pensé. Il allait plus souvent au lac aussi. Il buvait plus d’eau et se lavait plus souvent. Il se reprenait quoi. Ni plus ni moins… Il aperçut la fumée. Loin de la plage, du Village, de l’institut Graham… De la fumée présageait un feu… Et un feu de forêt… Ils n’avaient pas besoin de ça en ce moment. Il s’était donc précipité dans la direction de la fumée pour en avoir le cœur net.

Il avait couru, il fallait agir vite. Une fois arrivé devant le feu de camp, il s’arrêta, le souffle court. Il se sentait idiot. Il avait encore le cœur qui battait à du milles à l’heure. Tout ça pour un feu de camp parfaitement maitrisé… Il reprit une respiration plus normale, les mains sur les genoux. Il se demandait quand même qui était l’inconscient qui lançait des feux qu’il ne surveillait pas.

Il contourna le feu, s’emmêla les pinceaux dans ces pieds, en fait, c’était plutôt dans une branche mais le résultat était le même, manqua de tomber mais se rattrapa in extremis. Cela lui arrivait assez souvent pour qu’il ait acquis des réflexes plutôt bons en la matière. Un bruit l’alerta et il vit rouler une fille en bas de la bute au pied de laquelle il se trouvait. Une fille emballer dans son sac de couchage comme une chenille. Incroyable. Dormait-elle en haut de la butte ? Drôle d’endroit pour ça…

Surprenante rencontre… Il ne comprenait pas comment elle avait pu se mettre à glisser comme ça… Un mystère qu’il ne chercha pas à résoudre, trop soucieux que la jeune femme ne se soit blessée. Il s’agenouilla aussitôt auprès de la blonde, pour s’assurer qu’elle n’avait rien et lui demanda, inquiet :

- Ça va ? Tu ne t’es pas fait mal ?

Elle se releva, toujours enrouler dans sa couverture comme un saucisson. Seul sa tête dépassait à peine. Elle ne semblait pas blessée. Aeden eu un léger sourire. Si elle était aussi maladroite que lui, rien d’étonnant. Les maladroits avaient un très bon instinct de survie quand il se ramassait… Probablement la seule chose qui leur permettait de ne pas s’empaler ou s’ouvrir la tête sur un truc stupide.

- Je vois que j'ai le droit à un visiteur !

Elle avait un accent scandinave assez prononcé. Dommage, il avait un peu oublié les quelques mots qu’il avait pu apprendre dans cette langue quand il s’amusait à retenir des gros mots dans les différentes langues… Remarque qu’apprendre les gros mots n’avait pas été son idée la plus judicieuse de l’époque… Il avait été un sacré gamin quand même… Les seules langues germaniques qu’il connaissait correctement était l’allemand et le luxembourgeois. Enfin… cela faisait longtemps qu’il ne les avait plus parler.
Son interlocutrice fit tomber sa couverture, et le surdoué détourna les yeux quand elle entraina partiellement son t’shirt à glisser aussi. Décidemment… Il remarqua qu’elle avait fait tomber des jumelles. Que faisait-elle avec ça, en haut d’une butte ? Le surdoué se le demandait…

Il attendit qu’elle reglisse sa couverture autour de ces épaules pour la regarder. Alors qu’elle se retournait pour se diriger vers une cabane qu’il n’avait pas aperçu, il remarqua que les cheveux de la jeune demoiselle venaient de subir un sacré accident. Au moins, il n’était pas le seul à subir depuis qu’il était coupé du monde, d’un point de vue capillaire. Ces cheveux qui avaient toujours été indomptable avaient carrément pris leurs aises depuis. Impossible d’en faire quoi que ce soit.
Elle leva un bras et il regarda sa cabane, la découvrant finalement. Elle n’avait donc pas piqué un somme en haut de cette butte…

- Bienvenue dans mon maison !

Il ne se formalisa pas de ses petites erreurs de conjugaison. Il se demanda juste quel âge elle avait pour parler un anglais aussi approximatif. Les pays scandinaves étaient en général assez tournés vers l’apprentissage de l’anglais, et possédait souvent un anglais très lisse et fluide. D’autant que tout comme les langues scandinaves, l’anglais était une langue germanique possédant des similitudes qui permettait un apprentissage relativement aisé. Le jeune homme en savait quelque chose puisqu’il était lui-même né dans un pays favorisant l’apprentissage des langues. Il supposait donc son interlocutrice plutôt jeune, même si elle paressait plus âgée qu’il ne le supposait, malgré sa couette qui lui servait de cape.
Il était impressionné par sa cabane. Elle avait fait tout ça toute seule ? Ou alors peut-être qu’elle avait une coloc ou un coloc qui trainait lui aussi enroulé comme une chenille, jumelle à la main, un peu plus loin. Mais qui était cette fille qui vivait dans la forêt et dont il n’avait jamais entendu parler, et qui l’invitait chez elle sans la moindre méfiance ? Il ne savait pas qu’il existait des électrons libres qui ne dormait pas dans la grotte. Cette idée ne lui avait même jamais effleuré l’esprit.

Aeden se pencha pour ramasser la paire de jumelles de la jeune femme qu’elle semblait avoir oubliée ou juste abandonnée dans l’herbe. Il la lui tendit pour qu’elle puisse récupérer son bien, tout en commentant cette cabane dont il découvrait l’existence :

– Elle est incroyable ! Je ne savais pas qu’il y avait des patients qui vivaient dans la forêt…

Puis, il continua, la mettant en garde sur le danger de faire confiance à n’importe qui :

– Tu sais, tu ne devrais pas inviter n’importe quel inconnu à rentrer chez toi.

Il ne fallait pas tomber dans la parano bien sûr, mais Nevrabriel avait prévenu Aeden que Jessy trainait dans la nature et qu’il était un vrai danger pour les autres.

La jeune chenille semblait très fière qu’il ne complimente sa cabane. Il y avait de quoi en même temps. Elle fit demi-tour pour l’observer lorsqu’il lui fit remarquer un truc basique que ces parents semblaient ne pas lui avoir dit… Ne pas parler aux inconnus et toutes ces conneries. Elle semblait perplexe, comme si c’était la première fois qu’elle découvrait l’existence de cet adage.

Elle rebroussa finalement chemin pour s’approcher de lui, les yeux plissés comme si elle cherchait à l’inspecter. Elle tenait sa main sous son menton comme si elle mimait qu’elle allait l’interviewer ce qui était… improbable ? Il la regarda s’approcher sans trop comprendre. Ce fut son œil plissé plus que l’autre qui lui fit pensé que son faux micro était peut-être plutôt une fausse loupe… une seconde de plus et il aurait essayé de parler dans son faux micro pour lui faire plaisir… il avait frôlé une situation aussi incompréhensible qu’idiote.

Il observait la chenille qui le regardait dans le blanc des yeux, beaucoup trop prêt pour que ça ne le mette pas mal à l’aise. Il regarde quelques secondes ses grands yeux noisette avant de détourner le regard, intimidé. Elle était presque aussi grande que le surdoué, ni l’un, ni l’autre ne devait baisser le regard pour se contempler à même hauteurs.

Elle attrapa une des mèches rebelles du garçon du bout des doigts, comme si elle tenait un objet qui était une preuve à conviction. Ce dernier sentit le rouge lui monter aux joues alors qu’elle continuait d’empiéter sur son espace personnel, son visage si prêt qu’il pouvait en détailler les pores de peau. Cette inspection devenait vraiment gênante. Le jeune homme se sentait sous le feu des projecteurs, et il n’aimait pas ça du tout. Dommage qu’il n’était pas venu avec Nev… ça lui aurait au moins éviter d’être le seul à se faire inspecter sous toutes les coutures.

Finalement est-ce que ce n’était pas lui qui faisait trop facilement confiance aux gens ? Si ça se trouve, c’était Solveig la psychopathe qui allait le haché menu dans sa cabane perdue dans la forêt…
Elle recula finalement, faisant mine de ranger sa loupe invisible. Aeden lui se remit à respirer. Parce que oui, il n’avait pas remarqué qu’il était pratiquement en apnée depuis qu’elle avait pénétrée dans son espace personnel.

- Solveig, enchantée ! Et toi ?

Il serra la main, lui renvoyant un sourire timide en réponse au sien, qui illuminait son visage. Il s’emmêla les pinceaux, n’ayant pas prit le temps de préparer ce qu’il allait dire, bien que s’était supposer couler de source :

- Solv-heu-Aeden.

Solveig eut un air triomphal :

- Et voilà, tu n'es plus un inconnu. Tu peux donc venir chez je.

CQFD… Elle rigola, ce qui ne manqua pas de tirer un sourire au jeune garçon. Ce n’était pas exactement ce qu’il avait essayé de lui faire comprendre mais bon… Il l’a suivi, curieux de voir l’intérieur de sa cabane. Une fois à l’intérieur, il se demanda sérieusement s’il y avait eu une tempête cette nuit dont il n’aurait pas été au courant. Il y avait des post-it et des cadavres de vêtements partout, dans un joyeux bordel qui ne semblait pas déranger Solveig plus que ça.

Le surdoué lui ne savait même plus où pauser les yeux. Il aperçut un manuel de survie de zombie -où en tout cas il supposait que ça l'était vu la tête de la couverture. Est-ce qu’elle se basait sur ça pour survir… Il se demanda comment cette fille qui paressait encore plus gauche que lui était parvenue à construire tout ça… Il attrapa finalement le livre de survie zombie et le feuilleta. La lecture lui manquait un peu, avoir un livre dans les mains lui faisait du bien. Dommage qu'il était en suédois et que le garçon n'en captait pas le moindre mots. Bon puisqu’elle ne le considérait pas comme un inconnu, il lui demanda, le livre toujours entre les mains :

- Tu habites toute seule ici ?

Vu le capharnaüm il supposait que oui, mais ça lui paressait tellement improbable de venir s’isoler dans la forêt comme ça… Il lui jeta un coup d’œil. Surtout qu’elle paressait plutôt gentille comme fille… N’avait-elle donc pas d’amie ou d’ami dans l’une des factions ?

- Oui ... malheureusement ...

Il releva les yeux pour la dévisager. Elle semblait sincèrement triste de vivre ici toute seule… Alors pourquoi ? Elle n’avait pas un ou une amie avec qui partager cette cabane ? Elle semblait plutôt gentille pourtant. Bordélique et maladroite mais gentille.

- Det här är min favoritbok.

Aeden cligna des yeux surpris. Elle lui avait parlé Norvégien ou Suédois, c’était une certitude. Il se surpris à comprendre ce qu’elle lui disait sans grand effort. Enfin… surprenant mais pas tant. Si Aeden aimait les sciences et qu’il avait toujours eu tendance à s’orienter vers ces branches là -un peu contraint par ses parents- il y avait une autre matière dans laquelle il avait de bonne compétence. Les langues. La diversité de sa famille, les pays aux multiples langues nationales dans lesquels il avait vécu avait forgé cette facilité sans qu’il n’ai jamais vraiment à la travailler.

Ce qu’elle disait avec des consonances luxembourgoise « Dëst ass mäi ». Favoritbok était pour ainsi dire de l’anglais. Le mélange aurait signifié qu’elle lui disait que ce livre là était son préféré. Il le referma, détaillant une nouvelle fois sa couverture. Donc Solveig aimait les histoires de zombies ? Alors qu’il allait lui répondre qu’il ne parlait pas vraiment sa langue, elle se mit à descendre de la cabane. Il passa la tête par la porte, l’observant interrogatif, puis la suivit finalement sans mot. Mais alors qu’il allait lui poser plus de questions sur elle, essayé de comprendre pourquoi elle vivait ici toute seule si cela la rendait malheureuse quand elle se mit à se déshabiller à côté de son seau d’eau qui était maintenant chaud… Aeden détourna les yeux, le rouge montant de manière fulgurante à ces joues. Elle n’allait pas se laver là, comme ça devant lui quand même ? Il fit un pas de côté, pour que son regard ai plus facile à fuir la scène, allant s’abriter pudiquement au fin fond de la forêt.

Le surdoué sentait son cœur battre très fort pour aucunes raisons, et se sentait stupide, planté au milieu de la forêt avec une inconnue à moitié nue. Il se demanda même s’il ne devait pas juste partir et la laisser se laver tranquillement. Il entendait le bruit de l’eau du seau que l’on remuait et il n’osait même pas imaginer ce qui se déroulait à quelques pas de lui. Oui, Aeden avait 19 ans, mais non, il n’avait pas vraiment l’habitude de voir des corps féminins et cela le mettait étrangement mal à l’aise.

- Om du vill njuta kan du! Det är väldigt varmt.

Kan du ? kan dat ? Il pouvait quoi ? La suite de la phrase lui faisait penser qu’elle disait que c’était chaud... Qu’est-ce qui était chaud ? L’eau... le feu ? Solveig ? Oh non merde certainement pas. Il doutait d’avoir compris ce qu’elle lui voulait, il savait ce qu’il voulait cela dit... Fuir ? Plus ou moins ouai. Il tourna quasiment le dos à Solveig, trop gêné par la situation, supposant que c’était ce que n’importe quel garçon aurait fait à sa place et répondit finalement en anglais :

– Désolé mais je parle p-pas le...

Suédois ? Norvégien ? Peut-être même le Danois...

- Enfin j’ai p-pas de notion en langue Scandinave quoi...

Il ne comprenait pas pourquoi elle s’était mise à lui parler dans une autre langue comme ça... Cette fille était un mystère. Il la décevait certainement, et le surdoué détestait ça, mais impossible de lui mentir même pour lui faire plaisir sur ça. Elle aurait très vite fait de s’en rendre compte par elle-même de toute manière. Ca lui faisait bizarre de parler à quelqu’un de dos comme ça. Il avait presque l’impression de causer à l’arbre qui se situait pas loin en face de lui.

Il laissait la jeune femme s’agiter, attendant plus ou moins son signal pour se retourner, bien qu’elle ne lui en ait donné aucun lorsqu’elle s’était préalablement déshabillée. Mal à l’aise, même de dos, il ne savait pas où poser son regard. Une nouvelle fois, pour ne pas changer, il ne savait ni quoi faire de son corps, ni de la situation. Il se contentait donc de se triturer les mains, comme le grand stressé qu’il était.

- Attention

Il voulut se tourner, cherchant à comprendre de quoi la jeune demoiselle l’avertissait, le cœur battant à deux mille à l’heure, quand un jet d’eau chaude l’éclaboussa. L’eau était très chaude comparé à l’air glacé de l’hiver. Surpris, le surdoué opta pour une posture défensive, se protégeant de l’eau. Il fallut que la jeune Solveig rigole pour qu’il comprenne. Qu’il ne devait pas s’inquiéter de se faire attaquer par une jeune suédoise qui aimait les zombies, parce qu’elle ne lui voulait pas de mal, parce qu’elle jouait. Il eut alors un sourire et tenta même de lui renvoyer de l’eau en secouant les mains dans sa direction. Bien mineur par rapport à la vague qu’il venait de subir.

Solveig avait enfiler un gros pull et nouer un essuis autour de ces cheveux. Elle avait encore le visage rougit par l’eau chaude de sa casserole. Elle ne semblait pas en vouloir à Aeden de ne pas parler sa langue.

- Tu veux qu'on te faire une cabane ?

Il l’observa avec affection. Il avait presque envie de dire oui. Vivre dans la grotte était difficile. Vivre avec les autres étaient difficile. Peut-être que Sheila serait d’accord de venir vivre dans une cabane ici, avec lui et Solveig ? Il y aurait moins de monde. Moins de regard. Moins de conséquence. Mais sa place n’était pas là. Sa place était le plus prêt possible d’Elizabeth. Enfin… Il l’espérait en tout cas. De tout son cœur. Mais une chose le perturbait toujours. Que faisait cette petite toute seule dans les bois ? Elle ne semblait pas du tout fuir la présence des autres, c’était même le contraire vu qu’elle lui proposait de lui construire une cabane. Il s’approcha à son tour du bois, soucieux de lui montrer qu’il appréciait ces efforts.

- Et si on te construisait une porte d’abord ?

Il leva les yeux vers la cabane de la jeune femme. Elle était douée. Lui avait deux mains gauches. Ce n’était pas pour rien qu’il galérait autant depuis qu’ils avaient fini leurs folles aventures en Robinson Crusoé. Mais il supposait qu’avec une porte, elle aurait moins froid. L’air glacée de l’hiver lui était insupportable à lui. Alors certes, les arbres devaient un peu couper le vent, mais une porte n’aurait pas fait de mal à sa nouvelle amie.

- Et tu pourras en profiter pour m’apprendre quelques mots de ta langue ? Comment tu dis « Bonjour, je m’appelle Solveig ? » par exemple.

Après tout, Nevrabriel lui avait bien apprit le gaélique, peut-être pouvait-il apprendre quelques bricoles norvégienne ou suédoise, ou quelque chose du genre. Le surdoué avait toujours mit beaucoup d’efforts en place, lorsqu’il était question de se faire comprendre ou de faire un pas vers ces camarades.[/b][/b]

-Kon'nichiwa, watashinonamaeha sorubeigudesu

Il fronça les sourcils. Est-ce qu’elle venait de parler japonais ? Est-ce qu’il s’était gouré en pensant qu’elle parlait une langue nordique ? Ou est-ce que les nordiques disaient Kon’nichiwa aussi ? Ok il était complètement largué avec tout ça. Et puis, est-ce que c’était vraiment important ? Quelque soit sa langue, il pouvait bien l’apprendre. Donc Kon’nichiwa watashinonamaeha Aedenudesu ? Il allait lui demander, quand elle ajouta après s’être assise au sol avec une mine jusque par terre.

- Si tu veux partir, je ne te retenir pas. Tu n’es pas obligatoire de te forcer à me faire une conversation.

Obliger de lui parler ? Est-ce qu’elle pensait qu’il se forçait à lui parler ? C’était sa faute…. Qu’avait-il dit pour qu’elle pense qu’il ne veuille pas lui parler ? Il ne voyait pas… Roooh il devait être stupide pour ne pas s’en rendre compte. Est-ce qu’il était devenu débile depuis l’été ? Ou le froid avait eu raison de ces derniers neurones ? Pourquoi était-il incapable ne serait-ce que d’avoir une conversation avec quelqu’un sans dire une connerie ?

Il passa une de ces mains trempées dans ces cheveux secs. L’eau s’y accrocha sans difficulté. Il ne savait pas quoi faire, mais il détestait voir cet air triste sur son visage. Il ne savait pas quoi faire. Il avait l’impression de voir un chiot qui était persuadé d’avoir fait quelque chose de mal alors que ce n’était pas le cas. Il s’approcha, libérant la mèche blonde de la jeune femme coincée dans une branche pour la glisser parmi le reste de ces cheveux. Il avait cassé la branche, qu’il garda en main, chipotant nerveusement avec. C’était à se demander comment Soveig prenait soin d’elle-même, et en même temps, ce n’était pas lui qui pouvait juger ça. Il s’assit à côté d’elle, ignorant la neige froide au sol, gardant une distance maladroite entre eux, les yeux fuyants. Il commença, parlant avec douceur :

- Si j’ai dit quelque chose de mal, faut p-pas m’en vouloir…

Il glissa ses doigts dans la neige, triturant les flocons froids. Machinalement, il la compacta jusqu’à former une boule qui ressemblait plus à une patate qu’autre chose. Il observa le bout de branche et la neige… Il adressa un sourire désolé à son interlocutrice, avant de continuer :

- J-J-Je suis probablement pas très doué pour faire la conversation, je m’exprime pas toujours très bien… mais si tu le permets, j’aimerais m’améliorer… Enfin si ça ne te dérange pas que je revienne te voir souvent ?

Il n’était pas question qu’il laisse Solveig toute seule au milieu de la forêt sans personne pour s’assurer qu’elle n’aille bien. Au pire il passerait régulièrement de loin juste pour être sûr qu’il ne lui arrivait rien. Au mieux, elle était d’accord qu’il revienne et ils pourraient apprendre à se connaitre. C’était claire qu’il avait pleins de choses à apprendre de la jeune blonde. Et puis, il n’aurait su dire pourquoi, mais il bégayait moins avec elle. Peut-être juste que cela lui changeait les idées de parler avec quelqu’un d’aussi… simple ? Dans le bon sens du terme bien sûr. Bon, il s’était demandé si elle comptait le couper en deux au milieu de la forêt au début, mais ça se voyait qu’elle ne ferait pas de mal à une mouche.

Il chercha des yeux quelques chose qui pourrait lui servir d’yeux. Mmmh… il ouvrit sa veste rapiécée qui était de toute manière trempée et tira sur sa chemise pour faire passer les deux premiers boutons de cette dernière par-dessus le col de son pull. Il tira dessus, s’aidant de ces dents pour venir à bout du fil qui les reliait encore à sa chemise. Il eut vite fait de les détacher.

Il les enfonça sur sa boule de neige informe. Cassa le bout de branche en deux et en planta un bout de chaque côté de sa patate de neige. Il poussa sa création vers la jeune femme, comme un gosse qui ne sait pas comment s’excuser. Lui adressa un nouveau sourire désolé.

- Tu me pardonnes Sorubeig ?

Solveig déposa un bonhomme de neige qu’elle avait elle-même confectionné durant les excuses du jeune homme. Il était parfait… En deux parties, des petits bras potelés en bois et une magnifique écharpe en lacet. Le surdoué eut un sourire. Ils étaient vraiment en train de construire des bonhommes de neige comme des enfants ? Il trouvait cela si simple. Bien plus simple que de discuter avec les autres. La jeune femme dans son enthousiasme rigola joyeusement, enlaçant le surdoué. Ce dernier, peu habitué à ce genre de manifestations amicales se laissa faire, tapotant le dos de Solveig, ne sachant pas trop quoi faire de ces bras. Mais il était content qu’elle ne lui pardonne sa maladresse.

- Ami ?

Il sera solennellement sa main, un léger sourire aux lèvres. En arrivant tout à l’heure, il ne pensait pas finir amis avec cette jeune fille très singulière qui avait atterrit à ces pieds enrouler dans un drap comme une petite chenille.

- Bien sûr ! Super méga amis !

Et pour prouver qu’il le pensait vraiment, il rapprocha M. Patate de M. Lacet afin que leurs petits bras de bâtons ne se touchent. Comme le ferait les petits bras de deux super méga amis probablement… Parce qu’il était venu ici avec toujours ce même poids sur le cœur et le gout de ne rien faire, et que pourtant, à présent, il se sentait un peu mieux. Rien que pour cette raison, Solveig lui apparaissait réellement comme une véritable amie. Ils auraient été dans la même cour de récréation en petite section, ils seraient probablement devenu meilleurs amis tout aussi vite.