Des arbres, des arbres et encore des arbres. Enfin, pas tout à fait. Surtout des bébés pour le moment. Mais n’empêche que c’est quand même hyper répétitif. C’est la routine, je devrai avoir l’habitude mais je suis pas faites pour ce genre de chose moi. Pas pour rien que je voulais être danseuse à la base. Si on a aussi une routine, les chorégraphies changent. Et ça c’est cool! Planter des arbres moins… Enfin, ça l’est pour la nature et tout, l’oxygène ce genre de chose. Très noble activité! Mais c’est tellement lassant! Il se passe rien. Il fait trop chaud. On peut pas discuter avec les gens. C’est tout le temps les mêmes gestes. J’en ai marre. J’ai envie de faire autre chose! C’est terrible comme je m’ennuie en ce moment! J’aimerai qu’il se passe un truc un peu sympa genre… Je sais pas. Une soucoupe volante qui atterrit pas loin! Ou non, mieux! Une sorte de petite météorite en ferraille qui se crash dans le coin avec une montre à l’intérieur! Ouais je sais, ça c’est le début de Ben Ten. Quoi? Laissez-moi rêver! C’est beaucoup trop cool cette montre qui te permet de te transformer en Alien! Sérieux, vous avez pas déjà eu envie de vous transformer en créature cristalline totalement indestructible? Non? Alors un brasier ambulant! Toujours pas? Vous êtes pas marrants…
Je pousse un léger soupir en passant ma main sur mon front. J’ai chaud… Et j’ai bien envie de me rafraîchir un peu. Je regarde autour de moi. Une petite voix me souffle de tout envoyer valser et de m’enfuir tandis qu’une autre me demande de ne pas faire de vagues.
Hm……..
Hmmmmmmmmm……
Bon, décidez-vous l’ange et le démon là! Ça doit faire dix minutes que je phase avec ma pelle dans la main sans rien faire! Je sais pas ce qui est le plus inquiétant…. Une nana qui regarde dans le vide pendant un temps indéterminé sans bouger ou bien se dire que c’est parce qu’elle «entend des voix» qu’elle est dans cet état. Enfin j’entends pas vraiment des voix, c’est une métaphore, hein. Je ne suis pas encore folle!
Bref. Je secoue la tête. Non, faut pas que je me fasse trop remarquer.
A nouveau je reprends mon travail de jardinière. Je vais bientôt devenir experte en la matière et ça me fait un peu râler. Avec cette histoire j’ai de moins en moins de temps pour danser… Si je pratique pas, je sais que je vais perdre mon niveau et ça m’attriste honnêtement. Heureusement qu’on a nos sessions violon / danse avec Katou pour contrebalancer un peu.
…
J’en ai maaaaaaaare.
Je regarde une nouvelle fois autour de moi, le plus discrètement possible. Ceux qui nous surveillent ont l’air d’avoir relâché légèrement la surveillance. Je peux voir à leur couleur que certains sont dans la lune, rêvassent un peu ou bien sont beaucoup trop détendus. Donc. J’ai peut-être une chance…..?
Je l’ai déjà fais. Je peux le refaire en théorie, non? Doucement, je fais un pas de côté, faisant mine d’aller vers mon voisin récupérer des graines. Puis je fais un nouveau pas. J’esquive un autre patient dans une ondulation puis sifflote à peine. Puis je me baisse pour creuser un peu le sol. Diversion, diversion. Je suis un ninja, héhé.
Toujours la pelle dans la main, je finis par atteindre un buisson et me glisse derrière. Là je peux souffler. Ok, je suis cachée, on va pas me trouver! A la limite on peut remarquer mon absence -merci ma couleur de cheveux et mes yeux vairons- mais pas avant quelque temps. Je garde la pelle avec moi histoire que ça me grille pas. Vous imaginez un outil mais sans humain qui le manipule? Ben ouais je serai directement soupçonnée! Donc je l’embarque avec moi. Et comme ça si je croise un loup je pourrai me défendre!
Je marche une bonne petite demi-heure -surtout à cause du fait que je me perds. Fichu sens de l’orientation!- pour finalement arriver à une petite plage de sable. La mer à l’air calme aujourd’hui même si y a pas mal de vent. Je m'avance en trotinant puis finit par m'étirer. Ah...! Ça fait du bien! Je ferme les yeux en respirant l'air marin, profitant de ma liberté temporaire.
Puis je secoue la tête pour sentir l'air dans mes cheveux et retire mes chaussures pour aller mettre mes pieds dans l'eau. Ça me rappelle nos sortie plage avec Kat... Enfin maintenant je suis seule. Et je serai seule aussi quand je sortirai de l'institut... Je soupire. C'est pas le moment de penser à cette rupture.
En plus, il est encore en équipe avec l’autre pipelette là, il a oublié son nom. Mais c’est elle qui lui a filé le plus de tuyaux intéressants depuis son arrivée. En même temps, rien de moins étonnant vu le nombre de mot qu’elle aligne à la minute. Un véritable cauchemar. Deux fois déjà, il lui avait maladroitement filé des coups de pelles pour qu’elle se taise. Evidemment, il en avait profité pour l’amener à l’infirmerie et sécher le reste du jardinage. D’une pierre deux coups.
Et là…. Ça se voyait qu’elle n’avait rien d’intéressant à dire. Mais elle était si contente que quelqu’un fasse mine d’écouter, qu’elle était lancée au moins pour les deux prochaines heures. Pourtant, encore 10 minutes et Jessy l’enterrait à la place d’un arbre. Et encore, il était certain de surestimer sa patience. De temps en temps, il jetait des coups d’œil autour de lui, mais vraiment rien d’intéressant à signaler. Il se disait justement que si c’était pour patauger dans la terre comme un paysan, il ferait aussi bien de s’éclipser pour faire une sieste quand quelque chose attira son œil expert.
Une fille ou une espèce de bonbon rose sur pattes, il hésite encore sur le terme à employer. Elle se glissait entre les patients, et avait carrément l’air suspecte. Son air de ne pas y toucher, et ce mouvement latéral vers l’extérieur de la zone de travail était à la fois incohérent et splendide d’évidence. A qui allait-elle faire croire qu’elle plantait des graines là ? Avec une pelle à la main…Il jeta un coup d’œil vers les vigiles. Ça aussi ça l’atterrait. Pouvait on voir plus pathétique pour surveiller les patients ? Ils baillaient tous aux corneilles comme des bêtes à peine sorties de l’hibernation. Et leurs yeux vides d’idiot semblaient fixés des points au loin. Ils buvaient des coups et faisaient la fête tous les soirs ou quoi ? Pour avoir des têtes de bovins pathétiques.
Comme il s’y attend, la jeune fille se rapproche de plus en plus des fourrés. Un coup d’œil vers le moulin à parole à sa droite le conforte dans sa décision. Il choisit toujours de bosser sur l’extérieur de la zone. Facile alors de s’éclipser. Un, deux et trois pas et il avait fuit et les vigiles, et là gourde qui n’avait pas encore remarqué son absence. Nickel. Il trottina pour se rendre du côté que le bonbon rose avait emprunté, prenant un détour pour ne pas être vu. Il la perdit dans la forêt et du s’arrêter prêt d’un arbre pour reprendre son souffle. Et merde, depuis quand était-il devenu si mou ? Sérieux, vivre sur cette ile de dégénéré était en train de le rendre carrément léthargique. Il avait intérêt à se ré-entrainé plus sérieusement à la salle de sport. Il commencerait quelques exercices dans sa chambre aussi, il était temps qu’il se remue.
Hélas, il avait perdu le bonbon, mais au moins il était tranquille. Bah, ce n’était qu’un bonbon parmi les patients, il n’avait qu’à en profiter pour faire un petit tour du côté des côtes. Il ne faisait pas trop moche aujourd’hui, ça serait agréable. Le sable fin remplaça bientôt le sol caillouteux et terreux. Il s’installe discrètement sur un côté, de manière à pas se faire prendre par le premier vigile venu qui aurait décidé de profiter de la belle vue ou plutôt qui aurait voulu pisser dans le sable.
Et là paf ! le destin. Ou plutôt, le bonbon de tout à l’heure qui débarque, sans faire gaffe à rien bien sûr. En plus, elle a encore sa pelle en main… Miss bonbon s’étire, vire ces chaussures et va jeter son dévolu sur la mer. Jessy n’est pas très fan de la mer. Le sel, c’est pas bon pour la peau. Et puis après le sable colle, c’est désagréable. Mais bon, s’il veut continuer de sympathiser avec les patients de l’institut, il ferait aussi bien de la rejoindre. Alors, il retire ces chaussures et s’approche, profitant des quelques pas où le sables glissent encore sur sa peau, avant de pénétrer dans la zone humide.
- Hé ! Salut toi. Tu viens aussi prendre un bain de pied ?
Il lui adresse un sourire amusé, alors qu’il se rapproche.
(une pointe d’agacement –un peu d’indifférence et de flemme – beaucoup de confiance et de suffisance)