contexte

Le jour de la Grande Division naissent quatre factions : une dictature basée sur les principes de l’Institut qu’on avait connu ; une communauté qui fonctionne sous forme de vote et de code pénal ; un groupe retrouvé piégé dans le bunker ; et une anarchie qui s’est ancrée en pleine Nature. Des tensions, étincelles existants déjà avant la Grande Division et la Révolution, ont fait naître une ambiance de guerre froide entre les factions. L’Institut Espoir n’existe plus, mais cette ambiance survivaliste, à qui l’emportera sur l’autre prend racine.

Il ne reste plus que l’Espoir. +

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Margaret ; Rose
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Donatien

Eizenija ; Solveig
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Katerina ; Jessy ; Béryl
bébé modo

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Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Mar 5 Mar - 23:45
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


Victor terminait de lire les dernières publications d'une thèse sur la chirurgie du segment antérieur de l’œil quand son téléphone sonna. Un bref regard sur l'engin qui vibrait sur son bureau l'informa qu'il s'agissait de son avocate, probablement au sujet du procès que Victor avait lancé contre un de ses anciens salariés le mois dernier - à moins qu'il ne s'agisse encore d'une vaine tentative de son ex-femme pour lui faire signer les papiers de divorce ? Dans tous les cas, le marquis n'avait pas envie de répondre, la voix nasillarde de l'avocate l'ennuyait profondément, et il se demandait d'ailleurs s'il ne devrait pas changer de défenseur juridique. Quitte à jeter régulièrement une somme absurdement élevée par les fenêtres tous les mois, autant que ce soit pour quelqu'un qui ne lui fasse pas lever les yeux au ciel à chaque appel. Mais dans l'immédiat, Victor se contenta de regarder de travers son téléphone jusqu'à ce qu'il cesse de sonner, son café encore fumant dans sa main droite.

A défaut d'avoir réussi à le joindre, l'avocate l'avait déconcentré dans sa lecture. Victor s'adossa contre son grand siège de cuir, tapotant pensivement ses doigts contre la tasse qu'il portait à ses lèvres. Son bureau, à défaut d'être aussi grand que celui qu'il possédait également dans son château natal, avait l'avantage d'être calme et lumineux. Les dossiers étaient méticuleusement classés sur de lourdes étagères, et de nombreuses notes étaient gribouillées sur un tableau que la lumière du soleil frappait indolemment. Victor aurait pu aimer ce bureau...s'il ne l'avait pas jugé indigne de lui. Il était si petit ! Plus petit encore que les salles d'examens dans lesquels Victor préférait travailler en temps normal, et minuscule si on le comparait au laboratoire que le marquis trouvait déjà bien trop étroit. Peut-être devrait-il proposer une aide financière au Directeur pour arranger cela ? Malgré les dires de son banquier - un imbécile, comme tous les autres - qui s'égosillait en voyant Victor dilapider son héritage, ce dernier était convaincu que sa fortune était encore aussi grande qu'au premier jour, surtout grâce aux études auxquelles il avait participé - et certainement pas grâce au misérable salaire qu-...

Le train de la pensée de Victor fit siffler sa locomotive mentale tandis qu'il écarquillait les yeux. Le directeur !! N'était-ce pas Donatien qui le remplaçait depuis quelques mois ? Il avait souvenir avoir entendu circuler cette information, mais il ne prêtait pas attention aux racontars des Inutiles. Enfin, Donatien n'était pas vraiment un Inutile. C'était un POI, un Person Of Interest, aux yeux de Victor qui aimait tant catégoriser les autres. A son arrivée à l'Institut, le marquis de Graham l'avait trouvé ridiculement arrogant, en plus d'être bien trop jeune pour être son supérieur hiérarchique - ce terme lui donnait des aigreurs, comment pouvait-on être son "supérieur" ? - mais avec le temps, Victor avait fini par davantage tolérer l'étrange médecin, d'autant qu'il appréciait l'ordre qu'il faisait régner contre toutes attentes. Tant qu'il le laissait faire ce qu'il voulait de ses patients, le Docteur Graham ne prêtait guère attention à ses étranges manies avec les siens : c'était une forme de cohabitation, en un sens.

Mais par dessus tout, le marquis avait beaucoup apprécié la fermeté avec laquelle Donatien avec traité les rebelles découverts. C'était d'ailleurs un sujet dont il souhaitait traiter.

Victor se releva, reposant sans délicatesse sa tasse. A regrets, il abandonna son travail pour sortir en grandes pompes de son bureau, ayant préalablement pris soin de lisser ses vêtements déjà impeccables, comme d'habitude. Coïncidence ou preuve du talent incommensurable de Victor Graham ? :  Ledit Donatien Elpida circulait justement dans le couloir tandis que le marquis verrouillait sa porte. Difficile de ne pas le reconnaître, en revanche très facile de le confondre avec un spectre tant le blanc semblait être sa non-couleur de prédilection. Il dégageait quelque chose de très caractéristique, même le marquis ne pouvait pas le nier -même si pour rien au monde il ne l'aurait reconnu.

-Docteur Elpida, le salua alors Victor en se retournant vers lui comme si c'était Donatien qui cherchait à l'aborder et non le contraire. Je voulais justement vous parler.

Son œil valide passa pensivement sur lui, sans préambule. Victor n'aimait pas perdre de temps, il n'en avait pas à gaspiller, alors il n'y allait pas par quatre chemins. Pas de politesses inutiles, pas de marque de respect particulière : "docteur" et "vous" étaient déjà bien plus que ce que la plupart des gens recevaient de sa part. Mais encore une fois, Donatien était un POI.

-Puisque vous êtes directeur, j'aurai à discuter avec vous de finances administratives possibles, et -dans un tout autre registre- des échos qui me sont récemment parvenus au sujet d'une possible...

Il cracha ses derniers mots plus qu'il ne les prononça tant son mépris était palpable :

-...sédition de patients.

"Echos" et "sédition" étaient de biens grands mots, des "bruits de couloirs sur des patients indociles" serait une expression plus appropriée. Mais Victor Graham aimait faire dans le théâtral.

Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Ven 8 Mar - 20:13


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

voir

L'ambiance était à la concentration dans l'office de Donatien Elpida. Les plans d'une nouvelle salle sur le bureau, l'architecte en face de lui, il étudiait avec sérieux la proposition papier de celui qu'il avait engagé. Il faisait confiance au type. C'était le même qui avait imaginé la morgue et l'asile. Il n'y avait que lui, leur constructeur de prison dorée, qui pouvait avoir dans les mains le pouvoir créatif de la salle spéciale que désirait Donatien.
Après tout, cette pièce, c'était un cadeau d'anniversaire ... Les dix-huit ans d'une jeune femme précieuse à ses yeux. Il fallait y mettre les moyens.

- Vous êtes sûr qu'il n'y aura aucun moyen d'ouvrir de l'intérieur, à moins d'avoir les clés ?
- Affirmatif, monsieur Elpida. C'est le même type de serrure que pour votre chambre.

Donatien lui posa encore quelques questions avant de valider la commande. Parfait, ce serait parfait.
Une fois seul dans son bureau, il réfléchit à cette date du onze mars qui approchait. Plus on y venait, e plus Lys s'écartait. Il la visualisait pourtant, pas plus haute que trois pommes, galérant à faire rouler son fauteuil. Son sourire éblouissant, sa voix guillerette, ses pommettes, sa joie, son innocence. Sa pureté.
Il ouvrit le tiroir de son bureau, le dernier. Là, il y vit la mèche brune qu'il lui avait emprunté en guise de promesse. Un nœud était lié au bout afin de garder l'ensemble des cheveux entre eux. Cette promesse ... Elle devait lui débusquer l'auteur du Journal Clandestin. Le seul bémol dans son lieu idyllique. Si seulement ce fichu papier n'existait pas... Il n'aurait pas eu à blesser sa patiente, à couper les ponts avec sa secrétaire, à craindre la perte de son Paradis.
Il avait besoin de prendre l'air.
Il remarqua qu'il était pieds nus et enfila des chaussures à contre-cœur, repensant aux conseils d'Agnès concernant le port de vêtements. Elle avait toujours semblé bienveillante... Et on lui avait affirmé que ça ne pouvait être Agnès l'auteur de ce cruel Journal... Alors pourquoi ces doutes ?
Il passa une main sur son visage fatigué et sortit de son bureau. Une promenade entre les racines gelées lui ferait du bien. Une brise glaciale pour lui brûler le visage et il serait requinqué.
Il emprunta le couloir. Ce dernier était relativement calme, ce fut agréable. Pas de médecins qui se précipitaient vers lui pour lui demander telle ou telle chose. Il était déjà bien sollicité en tant que médecin en chef, alors depuis qu'il avait provisoirement pris le poste de son père, c'était pire. Et sa secrétaire en payait les conséquences aussi. Qu'est-ce qu'il avait bien pu prendre à son père pour tomber malade ? Il ne pouvait pas faire ça un autre jour ? Certes, Donatien appréciait son statut de dirigeant, mais il n'en aimait que le pouvoir. Les contraintes à côté, ils les auraient bien mises à la poubelle.

- Docteur Elpida. Je voulais justement vous parler.

Oh, une voix dans son dos. Une interpellation qui fit naître un faux sourire sur le visage creusé d'Elpida. Ainsi il était "Docteur", et non "Directeur". Ce serait une demande avec le professionnel de la santé, et non l'administrateur. Il préférait cela, encore balbutiant concernant son nouveau poste.

- Puisque vous êtes directeur, j'aurai à discuter avec vous de finances administratives possibles ...

La mine de Donatien s'assombrit. Loupé.
Blasé, il se tourna vers son interlocuteur spontané. Cependant, bien qu'il affichait un air agacé, il se détendit en constatant que c'était le docteur Graham. Un des rares collègues dont il avait retenu le nom. Il fallait dire que le bonhomme travaillait sur sa chère île depuis une paire d'années et Donatien lui reconnaissait une certaine valeur en tant que professionnel. Que ce soit en réunions, ou à travers ses écrits, Graham paraissait être un rouage important pour l'Institut. Mais bon, mis à part cela, si Donatien venait à le croiser un dimanche soir dans son salon, il ne lui accorderait pas le moindre regard. Cet homme en valait la peine, certes, mais uniquement entre les murs du bâtiment.

- ... des échos qui me sont récemment parvenus au sujet d'une possible... sédition de patients.

Donatien ne lisait jamais. Il était pauvre sur le plan culturel et littéraire. Il considérait l'art et autres comme des futilités. A ses yeux, ce n'était que des tentatives pour se faire voir de personnes cherchant l'attention. Un ouvrage, une sculpture, une peinture, tout cela ressemblait juste à une forme de journal intime. L'art et la littérature c'était l'avis des autres. Or, Donatien se fichait bien d'autrui.
C'était pour cela qu'il resta aphone un moment car, pour la énième fois dans sa vie, il ne comprenait pas ce qu'on lui disait. Sauf que ce n'était pas à cause du fond des propos, mais plutôt de leur forme.
Alors après de longues secondes silencieuses, il fit entendre sa voix rauque :

- N'essayez pas de frimer avec vos termes que plus personne n'emploie.

Il n'en ajouta pas plus puisque, en bon nombriliste qu'il était, il pensait évident que c'était le vocable "sédition" qu'il fallait rectifier. Il attendait, bien sûr, de son compère qu'il corrigeât sa sentence.
Ce fut dans cette attente qu'une lumière se réveilla dans son cerveau. Inconsciemment, il essayait de replacer le docteur Graham. Quelle spécificité ? Ophtalmologie. Pourquoi Graham avait-il bien pu attirer son attention plus qu'un autre ophtalmologue, hormis son ancienneté ? Il s'occupait d'un cas difficile. Qui était ce cas difficile ?
Soixante-Six...
Dit Amalia Reano,
dit Y66,
dit sa Nemesis.
L'or de ses yeux sembla noircir tandis qu'il se souvenait avoir discuté du cas de Soixante-Six et de son nouveau médecin récemment. Cette peste ...

- Vous êtes le médecin d'Y66.

Ce n'était pas une question, juste un constat fait à haute voix.
Un rictus narquois accompagna le voile sombre tombé à l'instant sur son visage.

- Maintenant que vous l'avez rencontré : à quoi ressemble l'Enfer ?

Clairement, cette fille avait un potentiel incroyable pour sortir Donatien de ses gongs. Jamais quelqu'un n'avait réussi à lui extirper d'aussi mauvaises émotions. S'il pouvait la détruire...


Docteur Elpida
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) VythFiche personnage : Sa fiche personnageEspace personnel : Son espace privéGroupe : La FamilleDate d'arrivée à l'Institut : 12/09/2008Age : 34
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Sam 9 Mar - 19:41
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


Donatien Elpida n'était pas des personnes les plus expressives qu'il avait été donné à Victor Graham de rencontrer. Au contraire, il faisait partie de ces gens qui abordaient continuellement un masque, qui contenaient la réalité de leurs émotions - à supposer qu'ils en éprouvent - derrière une digue mentale des plus restrictives. Mais quand le blanc médecin se tourna vers Victor, ce dernier aurait pu jurer que son expression pourtant si lisse était morose. Cela n'aurait pas vraiment intéressé le marquis en temps normal, mais sa réponse quant à elle fut bien plus retentissante :

- N'essayez pas de frimer avec vos termes que plus personne n'emploie.

Il était rare d'atteindre Victor à travers le brouillard épais de son propre ego. Mais cette réponse était si incongrue, surtout de la part d'un directeur d'institut, que le grand médecin cilla légèrement, stupéfait. Lui ? Frimer ? Outre le fait que ce n'était pas son genre - généralement, il ne faisait qu'énoncer des faits sur sa propre grandeur - il ne comprenait pas quel terme gênait son interlocuteur. C'était donc deux sources de surprise pour lui : que Donatien lui réponde cela, et que Victor ne comprenne pas quelque chose malgré son immense intellect. C'était "sédition" qu'il ne comprenait pas...? Cela ne pouvait être que ça, parce que si le terme "écho" ou "administratives" lui posait problème, le marquis allait commencer à se poser de réelles questions sur l'intelligence de son supérieur hiérarchique - bon sang, comme il haïssait ce titre.

Et puis la surprise céda place à un léger mécontentement. Victor était habitué aux excentricités du médecin en chef, ce qui expliquait qu'il ne soit pas plus contrarié. Néanmoins, il prenait la peine de venir s'adresser à Donatien, et c'était ainsi qu'il lui répondait ? En le reprenant sur son vocabulaire soutenu ? Fallait-il qu'il parle en monosyllabes pour que le médecin en chef soit satisfait ? Comme c'était décevant de la part d'Elpida.

Le grand médecin s'aperçut qu'il s'était raidi sous le coup de la surprise puis de l'agacement, et croisa les bras dans son dos dans une allure presque militaire pour que sa crispation soit plus confortable. Il n'allait pas laisser Donatien dominer la conversation pour si peu : ce serait trop facile.

- Vous êtes le médecin d'Y66, reprit le blanc médecin tandis que le marquis réfléchissait à un moyen de reformuler sa phrase de la manière la plus infantilisante possible.

Les yeux verts de Victor se plantèrent dans l'or pâle de son interlocuteur. Ce dernier avait un regard très particulier, qui d'ordinaire satisfaisait l'ophtalmologue pour sa couleur assez rare et pourtant agréable à observer. Mais cette fois, ce mordoré avait des nuances aigres aux yeux du Docteur Graham qui ne savait plus où donner de son mécontentement. Après l'avoir repris sur son vocabulaire, Donatien le réduisait au rôle de médecin d'Amalia ? Est-ce que c'était une blague ? Il fallait bien que ce jeune insolent soit en train de faire de l'humour pour ainsi se moquer ouvertement du grand ophtalmologue, alors même qu'il venait lui faire une proposition financière. Est-ce qu'il...

- Maintenant que vous l'avez rencontré : à quoi ressemble l'Enfer ? ajouta Donatien d'un ton narquois.

Ah. C'était donc ça. Victor, jusque là à peu près impassible, eut un rictus moqueur à son tour, mais pas pour les mêmes raisons. Le nouveau directeur était peut-être un gamin sans vocabulaire, incapable de se concentrer sur l'important, mais Victor était presque rassuré de constater que la raison à l'irrespect de Donatien était probablement qu'il avait un passif avec Amalia. Cette dernière lui avait effectivement rapporté avoir joué de sa pathologie avec le médecin en chef ! Si elle avait semblé indifférente à cette expérience, il semblait bien que le ressenti de Donatien soit tout autre.

Cette amusante pensée permit au mécontentement de Victor de se dissiper, et il accepta mentalement de donner une chance à son interlocuteur. Il ne pouvait pas le blâmer d'être moins intelligent et de moins bien s'exprimer que lui, ce n'était pas le premier après tout. En revanche, qu'il ne s'avise plus de lui parler de frime quand lui-même s'habillait en blanc, avec des cheveux blancs, le tout accompagné d'un teint aussi pâle que le cul de la mort elle-même pour que le monde doive prendre des lunettes de soleil pour le regarder !

Se penchant légèrement vers Donatien, le marquis lui glissa d'un faux ton de confidence, ne pouvant s'empêcher une petite pique qui passait presque pour un trait d'humour :

-Si vous pensez qu'Amalia porte l'Enfer avec elle, c'est que vous n'avez jamais été marié.

Il  ricana dans sa barbe et se redressa. Haussant les épaules, sa voix se fit plus badine.

-Mais si par "enfer", vous entendez son caractère des plus assurés mélangé à son étrange pathologie, alors je vous dirai que c'est l'enfer le plus intéressant qu'il m'ait été donné de fréquenter. Je pourrais vous parler des heures de ses expériences et des miennes, mais non seulement je n'en vois pas l'intérêt parce que vous risquez de ne pas comprendre mon vocabulaire technique (cette remarque lui arracha un sourire et il se demanda distraitement ce que Donatien ferait à Amalia s'il apprenait qu'elle lui avait raconté leur petite mésaventure), mais en plus nous avons plus intéressant à discuter. Comme par exemple, voyons...

Il fit mine de réfléchir.

-Ah oui ! Une prétendue "révolution" de patients et une potentielle "aide à financer votre institut", par exemple ?

Il avait volontairement pris le temps d'articuler les mots importants pour qu'ils rentrent dans la caboche de son interlocuteur. Victor avait fait de son mieux pour ne pas laisser son mécontentement prendre le dessus, il ne voulait pas que Donatien se braque : ce serait dommage de se mettre le nouveau directeur à dos, d'autant qu'il restait un POI aux yeux du marquis. D'un autre côté s'il continuait à jouer l'enfant, Victor ne voyait pas pourquoi il le traiterait autrement.



En bonne fan de Kaamelot, voilà ce qui m'est passé par la tête quand Dodo n'a pas compris "sédition:
Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Dim 10 Mar - 14:45


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

voir

Graham se pencha vers Donatien. Alors sentant son espace envahi, le directeur provisoire se courba légèrement vers l'arrière.

- Si vous pensez qu'Amalia porte l'Enfer avec elle, c'est que vous n'avez jamais été marié.

L'autre ricana, et Donatien cligna des yeux à plusieurs reprises. Le mariage était comparable aux Terres de Satan? En quoi ? Quand on jette un œil aux cérémonies, les tourtereaux respirent la niaiserie. On croirait même voir des petits anges au dessus d'eux saupoudrer leur amour de pétales de rose.
Donatien pensa à ses parents, mariés pendant un court laps de temps. Il ne connaissait pas de mariage heureux dans son entourage, en fait. Alors peut-être que Graham avait raison. Après tout, Donatien n'était nullement intéressé par ce type d'acte. Il se complaisait très bien dans son célibat.

- Mais si par "enfer", vous entendez son caractère des plus assurés mélangé à son étrange pathologie, alors je vous dirai que c'est l'enfer le plus intéressant qu'il m'ait été donné de fréquenter. Je pourrais vous parler des heures de ses expériences et des miennes, mais non seulement je n'en vois pas l'intérêt parce que vous risquez de ne pas comprendre mon vocabulaire technique, mais en plus nous avons plus intéressant à discuter. Comme par exemple, voyons...

Donatien fronça les sourcils, et se redressa - puisqu'encore un peu penché suite à la façon dont il avait voulu éviter l'invasion de son interlocuteur. Comment ça ils avaient plus intéressant à discuter ? L'homme savait ce qui était intéressant, et ce qui ne l'était pas. Hors, discuter du cas de Soixante-Six, et d'une potentielle destruction de celle-ci, était plus passionnant qu'un vulgaire apprentissage de vocabulaire. Il n'y avait que ceux qui manquaient d'intelligence qui employaient des termes pompeux. Moins on sait de choses, plus on essaie de paraître intelligent. Comme pour cacher le défaut de conception, celui de son manque de matière grise. Actuellement, Donatien voyait en son collègue l'expression suivante : "La culture, c'est comme la confiture : moins on en a, plus on l'étale."
En plus, maintenant qu'il avait sorti tout son stock de pseudo-intelligence, il devait s'interrompre pour réfléchir à ses phrases. Ça ne devait pas être facile de ne savoir anticiper ses propres sentences.
Mais il avait le mérite d'être un bon médecin, alors Donatien ne le méprisait pas tant que ça.

- Ah oui ! Une prétendue "révolution" de patients et une potentielle "aide à financer votre institut", par exemple ?

Donatien plissa les paupières, perplexe. Qu'est-ce que sous-entendait son collègue ? Il voulait amener un soulèvement ? Ou alors il se pensait si riche qu'il pouvait financer l'institut ?
Donatien recouvra un peu de bon sens : sans ses nombreux partenaires, l'institut aurait bien du mal à subvenir à ses besoins financiers. Toute proposition était la bienvenue.
Il balaya l'air de la main, comme voulant effacer les propos du Docteur Graham.

- L'institut n'a besoin de financements actuellement.

Et surtout, Donatien avait encore du mal à gérer cela. Les budgets et autres bilans, il les laissait à Madame Dubois. Il n'avait pas étudié la comptabilité à l'école, ou l'économie. Et ces chiffres composait un nouveau dialecte. Et comme Donatien détestait ne pas maîtriser quelque chose, surtout si cela concernait son précieux institut ... Ce sujet de conversation l'épuisait déjà.

- Et il n'y a pas de révolution de patients. Ils sont très heureux ici. La seule fois où il y a eu une tentative, elle fut étouffée dans l’œuf.

Naïf qu'il était Donatien ne pouvait imaginer, malgré les preuves évidentes, qu'on puisse se retourner contre son bâtiment. Il préférait nier une vérité douloureuse, cet idiot.
Ainsi, pour lui la tentative de discussion de Graham était louable, mais bien inutile. Par contre, Graham était encore et toujours le médecin de Soixante-Six. Là, ça pouvait devenir intéressant.

- Donc, nous parlions de Y66 ; à quoi ressemble vos interventions ? Vous a-t-elle évoqué notre récente altercation ?

Des palpitations lui nouèrent l'estomac. Il tenait peut-être un moyen de s'amuser avec Soixante-Six. Un moyen de la faire taire. Un moyen de gagner contre elle.


Docteur Elpida
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) VythFiche personnage : Sa fiche personnageEspace personnel : Son espace privéGroupe : La FamilleDate d'arrivée à l'Institut : 12/09/2008Age : 34
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Lun 11 Mar - 23:03
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


La manière avec laquelle Donatien observait Victor rappelait à ce dernier le regard de certains oiseaux lorsqu'ils hésitent entre s'envoler pour fuir un danger quelconque ou rester sur place pour grappiller quelques miettes : l'or de ses yeux était confus, mais toujours aussi vierge de sentiments qu'à l'ordinaire. En fait, Victor avait la désagréable sensation de ne pas être véritablement écouté, et encore moins compris.

-L'institut n'a besoin de financements actuellement, répondit finalement le blanc médecin en éloignant de lui les paroles de Victor d'un geste de main.

Le marquis contracta la mâchoire.

- Et il n'y a pas de révolution de patients. Ils sont très heureux ici. La seule fois où il y a eu une tentative, elle fut étouffée dans l’œuf.

A la colère qui montait vicieusement dans la poitrine de Victor céda une stupéfaction si forte que le grand médecin écarquilla les yeux, presque littéralement bouche bée. Est-ce qu'il avait bien entendu ? Le médecin en chef se voilait-il la face à ce point ? Le marquis s'adossa contre sa porte, abasourdi, puis il passa une main fébrile sur sa barbe pour masquer son rire naissant. Bon sang...Quelques instants plus tôt il était contrarié par le comportement de son "supérieur", mais à présent l'absurde de ses paroles menaçait de déclencher un rire jaune chez l'ophtalmologue. Il avait la soudaine envie de prendre Donatien et de le secouer comme la poupée de porcelaine qu'il était. Après tout, son corps était si frêle en comparaison avec celui de Victor, il ne ferait pas le poids, et cela pourrait le réveiller du rêve naïf dans lequel il semblait vivre. Comment pouvait-il être aussi aveugle ? Bien sûr que son établissement avait besoin de financements (sinon Victor aurait eu droit à un plus grand bureau, évidemment) ! Mais pire que tout, il était évident que les patients grondaient dans l'ombre. Pas tous, bien sûr. Mais suffisamment pour qu'un journal circule en toute clandestinité...

-Vous et moi vivons dans deux mondes bien différent dans ce cas...finit-il par répliquer en dardant sur Donatien un regard narquois, encore teinté de son rire refoulé.

Le médecin en chef ne sembla pas se départir de son idée précédente pour autant, et reprit comme si rien ne s'était passé :

- Donc, nous parlions de Y66 ; à quoi ressemble vos interventions ? Vous a-t-elle évoqué notre récente altercation ?

Cette fois, Victor ne put se retenir et il eut un bref éclat de rire. Ce n'était pas un rire réellement moqueur même s'il en était teinté, c'était un rire très court, aigre, qui suffit au marquis pour évacuer son ébahissement. Quand il se tourna vers Donatien avec un sourire, il avait retrouvé son calme habituel, et abordait le regard amusé de celui qui a accepté de se prêter au jeu d'un enfant :

-Décidemment, Y66 vous a marqué, Docteur Elpida...déclara-t-il en croisant nonchalamment les bras. Vous lui accordez plus d'importance qu'à mes paroles. Je devrais peut-être être offensé.

C'était une demi-vérité : d'un côté Victor était rageusement outré que Donatien lui manque ainsi de respect, et de l'autre...Il se rendait compte qu'il ne parlait pas à un adulte, mais à un enfant, un de ceux qui a une idée en tête et qui n'en démord pas. Cela expliquait son aveuglement, son manque de vocabulaire et son entêtement. Le marquis se demanda si son interlocuteur avait toujours été comme ça, auquel cas cela avait échappé à sa vigilance, mais cela lui faisait réaliser qu'il n'allait devoir compter que sur lui-même pour remettre l'Institut à flot. Comme d'habitude, il était le seul être capable de ce monde.

En un sens, c'était jouissif d'avoir toujours raison.

Fort de cette pensée, Victor décida nonchalamment de se prêter au jeu : il n'avait plus rien à tirer de cet enfant blanchâtre qui le regardait. Et puis, de toute façon, il n'allait pas se plaindre d'avoir à parler du métier qu'il aimait et de la patiente qui le passionnait.

-Mais soit, parlons de cette chère Amalia puisque telle est la volonté de notre nouveau Directeur. Que dire... reprit-il en reprenant l'air sérieux qu'il abordait dès qu'il était question de travail. J'ai décidé de l'autoriser à tester les limites de sa pathologie sur les autres patients. Il s'avère qu'elle récolte bien plus d'information sur le sujet seule que tous les infirmiers et médecins que je pourrais débaucher (il haussa les épaules). J'envisage cependant de prochainement réaliser des expériences plus approfondies sur son oeil, mais je réfléchis encore à un protocole, puisque c'est le premier cas où je souhaite que mon patient garde la vue après échantillonnage.

Ses yeux brillèrent sous l'ardeur de sa passion. Victor pouvait sentir son sang bouillir en imaginant les données qu'il allait récolter de cette expérience.

-Quant à votre altercation...Je suis au courant de votre rencontre infortune avec elle, il y a quelques mois, et je sais que vous l'avez récemment soumis à un test - je suis son médecin, après tout, et mieux que quiconque vous savez qu'un bon médecin est au courant de tous les faits et gestes de ses patients. Mais Y66 et moi ne parlons pas en profondeur de ses rencontres et sujets d'expérience : elle en a trop, vous comprenez.

Le marquis avait dit l'entière vérité, même s'il n'avait pas approfondi ce qu'Amalia lui avait dit. Avec la curiosité du scientifique, il aurait aimé voir la réaction de Donatien en apprenant qu'aux yeux de la jeune femme il s'était révélé être un sujet d'expérience médiocre, mais une partie de Victor refusait de mettre en danger Y66 : il ne voulait pas que sa patiente pâtisse des lubies puériles de Donatien, cela serait néfaste pour l'étude que réalisait le Docteur Graham sur sa pathologie.

En plus il commençait à penser qu'Amalia méritait davantage son attention que Donatien Elpida. A voir si ça allait s'arranger, après tout Donatien était un meilleur médecin que directeur, c'était certain.

Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Dim 17 Mar - 13:12


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

voir

L'autre géant - Donatien n'aimait pas qu'on soit physiquement plus grand et plus costaud que lui - fut secoué d'un bref rire. Donatien en resta de marbre. Il entendait toujours les gens rire à certains propos qui n'étaient pourtant pas des blagues. Sa secrétaire lui avait appris que l'hilarité n'était pas uniquement une réaction face à quelque chose de drôle. Mais Donatien ne savait différencier un rire jaune, d'un amer ou d'un de joie. Alors pour ne pas montrer ses faiblesses sociales, il se contenta de ne pas réagir.

- Décidemment, Y66 vous a marqué, Docteur Elpida... Vous lui accordez plus d'importance qu'à mes paroles. Je devrais peut-être être offensé.
- Sûrement. Mais si vous n'en valez pas la peine, ce n'est pas de votre faute, je vous rassure. Et ne vous inquiétez pas, vous avez tout de même votre valeur personnelle.

Sinon Donatien ne serait pas là, à lui accorder de son temps alors qu'il avait prévu de se ressourcer tranquillement. Il n'avait plus beaucoup de temps à consacrer au cadeau d'anniversaire de Lys. Il devait se dépêcher.
Ainsi, le docteur Graham lui résuma ses premières séances avec Soixante-Six. Apparemment, il avait fait testé sa singulière pathologie sur d'autres patients. Bonne idée. Donatien avait déjà était confronté à ce maudit œil, et sa fichue magie noire lui avait ravivé de mauvais souvenirs.
Par réflexe, il posa une main sur son bras. Ses expériences de lycée, sa découverte de lui-même à travers une auto-mise en danger, et la soudaine sensation qu'il n'était peut-être que le seul à croire à son importance.
Ce souvenir inconfortable lui arracha un frisson. Puis il y avait eu ce premier janvier. Son humiliation. Cette peste ne payait rien pour attendre. Il la tuerait. Oui, c'était son objectif : la tuer. Et de ses propres mains.
A peine Graham eut-il fini son discours, que Donatien enchaîna aussitôt :

- Dès que vous avez trouvé sa faiblesse, faites-m'en part.

Sur ce, il fit quelque pas en avant. Il avait parlé de ce dont il avait besoin. Fin de l'histoire. Maintenant il était temps de se reposer là où une végétation prenait naissance.
La démarche lente et semblant désarticulée, comme si ses os glissaient entre eux lorsque Donatien marchait, au lieu de rester emboîtés les uns dans les autres, il filait tranquillement. Mais ce fut alors que son inconscient, maltraité puisque Donatien le refoulait, se décida à se faire entendre et fit remonter une des paroles de Graham. "Une prétendue "révolution" de patients et une potentielle "aide à financer votre institut", par exemple ?"
Donatien s'arrêta net. Des bribes de souvenirs refirent surface : un genre de journal clandestin qui avait pourri son existence. Il avait été contraint de charger Lys d'en apprendre plus, un patient l'avait abordé à ce sujet, et sa secrétaire était devenue sa suspecte numéro un. Ce journal, sûrement en lien avec une sorte de Révolution, était la pire chose qui pouvait exister. Un vrai cancer qui se propageait entre les murs de son cher établissement. Qui devenait métastases. Et qu'on finirait par ne plus pouvoir éradiquer.
Alors Donatien pivota.

- Suivez-moi.

Cette conversation ne pouvait avoir lieu dans ces couloirs aux oreilles qui traînent. Donatien savait que des commères aimaient être à l'écoute du moindre ragot. Hors de question de leur laisser de quoi alimenter leurs conversations à la pause café.
Ainsi il se dirigea vers son bureau, où il invita son collègue à entrer. Peu de personnes avait le droit d'y entrer, Donatien n'aimant pas trop amener des extérieurs dans sa bulle. Mais, sans vraiment s'en rendre compte, il considérait tout de même Graham comme quelqu'un méritant de faire quelque pas dans son monde décalé.
Là, il s'installa dans son large fauteuil en cuir - fallait pas déconner, c'était quand même son trône, et il voulait le montrer -, et l'air sérieux, demanda :

- Dites-moi ce que vous savez sur cette ... "Révolution". Et ce que vous avez à me proposer.

On disait qu'il était dur de soigner le cancer. Mais certains étaient plus facile à éliminer que d'autres. En s'y prenant bien, Donatien saurait s'en débarrasser.

Docteur Elpida
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) VythFiche personnage : Sa fiche personnageEspace personnel : Son espace privéGroupe : La FamilleDate d'arrivée à l'Institut : 12/09/2008Age : 34
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Jeu 28 Mar - 23:32
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


Alors que Victor se demandait s'il devait prendre au sérieux les paroles insultantes de son "supérieur", ce dernier amorça un mouvement en avant, prêt à partir sur quelques mots insignifiants. Victor se redressa, arquant un sourcil. Donatien était-il en train de fuir la conversation ? Décidément, il se réfugiait bel et bien dans son rôle de l'enfant capricieux. Pauvre homme, enfermé dans un personnage pour dissimuler ses fêlures internes que tout le monde voyait de toute façon. Jamais il ne serait venu à l'idée du marquis de se construire une façade enfantine plus ou moins volontaire, voire une façade tout court ! Et puis il n'en avait pas besoin, il était parfait.

Cette conversation était bel et bien stérile : non seulement Donatien refusait de discuter de sujets importants, aveuglé sur l'état de son institut, mais en plus il ne cherchait même pas à parler médecine avec son collègue. Victor s'aperçut qu'il était tellement résigné à observer un enfant à la place d'un médecin qu'il ne trouvait aucune trace de mépris dans sa poitrine ; enfin, pas plus que d'habitude. En revanche, la désillusion envers son interlocuteur ne faisait que croitre, mais moins douloureuse qu'au premier abord. C'était presque de la pitié qu'il ressentait désormais : pitié envers un être aveuglé, incapable de voir la grandeur sublime lorsqu'elle lui faisait face - oui, Victor pensait à lui-même - ou bien la noirceur quand il avait le nez dessus - celle de la colère rampante de ses patients.

Alors que le marquis suivait des yeux le blanc médecin, un léger sourire condescendant accompagnant ses pensées, ce dernier se tourna à nouveau vers lui. Son expression avait changé - même si Donatien n'était pas vraiment expressif - et un léger empressement s'y distinguait.

-Suivez-moi, ordonna-t-il au Docteur Graham.

Et sans même attendre de réponse, il prit la direction de son bureau. Pendant quelques secondes, Victor resta accoudé à sa propre porte, crispé. Il n'appréciait guère être ainsi hélé comme un vulgaire toutou, mais il devait bien admettre être intrigué de ce retournement de situation. L'enfant devenait-il adulte ? Voilà qui était digne de son intérêt ! Quelque chose vibra dans sa poche. Un bref coup d'oeil l'informa qu'il s'agissait de son avocate, une nouvelle fois. Levant les yeux au ciel, l'ophtalmologue raccrocha avec agacement.

Suivre Donatien valait mieux que dix coups de téléphone avec cette femme.

Victor emboita donc le pas d'Elpida, et même si son pas n'était pas pressé, il avait son habituelle allure rapide, dévoilant l'importance que le marquis accordait au temps et à comment il le dépensait. En entrant dans le bureau, cependant, deux pensées le fulgurèrent :

Ce bureau était bien plus grand que le sien.

Ce bureau était horriblement blanc. Bon sang, comment peut-on autant aimer cette couleur ?

Mais surtout, ce bureau était plus grand que le sien.

Victor eut un rictus où son déplaisir se manifestait légèrement, bien qu'il tentât de le contenir. Avant qu'il ne puisse lâcher une réplique acerbe, Donatien prit à nouveau la parole. Victor remarqua qu'il trônait en maitre au milieu de son bureau, ayant pris la peine de s'asseoir sans proposer au marquis de faire de même - de toute manière, ce dernier préférait rester debout pour dominer de sa taille l'endroit. Ainsi, les rapports de force restaient équitables aux yeux de Victor, même s'il savait que la balance pencherait toujours en sa faveur, évidemment. Mais ce jeu de pouvoir et cette intimité peu familière au blanc médecin le rendait encore plus curieux quant à savoir ce dont il voulait lui parler.

- Dites-moi ce que vous savez sur cette ... "Révolution". Et ce que vous avez à me proposer.

Victor cilla, sincèrement surpris. Il ne s'était pas attendu à ce que Donatien décide de parler à nouveau de ce sujet. Il lui vint alors à l'idée qu'il avait peut-être mal jugé le médecin : ce n'était peut-être pas toujours un enfant, mais ce rôle le prenait simplement à intervalles irrégulier. Ainsi, voilà qu'il aurait repris le masque du médecin ferme et impitoyable, celui que Victor avait appris à respecter depuis un ou deux ans ! Par ailleurs, cela signifiait que Donatien n'avait pas été hermétique à ses paroles précédentes, il était simplement long à la détente. Un sourire carnassier vint flotter sur les lèvres du marquis, dissimulé derrière sa barbe.

Donatien remontait dans son estime. Voilà qui était plaisant.

-Vous changez vite d'opinion, très cher, mais je suis ravi que vous me posiez la question.

Victor s'approcha et posa les mains sur le dossier de la chaise, restant toujours volontairement debout. Son regard flotta quelques instants sur les plans qui recouvraient le bureau d'Elpida. Une nouvelle construction était-elle prévue ? Il n'était pas au courant. Les yeux verts du marquis se firent pensifs quelques instants, mais il ne releva pas : il ignorait combien de temps Donatien allait parvenir à rester concentré sur un même sujet, surtout aussi crucial que celui-ci.

-Les mesures que vous avez prises suite à la dernière "révolte" de patients étaient des plus fermes, je tiens tout d'abord à vous reconnaître cela. Il n'y a rien de pire qu'un dirigeant atteint de la maladie de compassion.

Victor passa une main sur sa barbe, réfléchissant à toute allure à ses prochains mots. Bien sûr, il savait s'exprimer avec une fluidité stupéfiante, mais le Docteur Graham devait veiller à ne pas user d'un vocabulaire trop élevé. C'était inhabituel, mais pour le bien de ses plans, il pouvait faire ce sacrifice.

-J'ai passé plusieurs années dans l'armée, et j'ai pu assister à comment on y mâtait les rebelles. La base de toute rébellion, c'est le temps. Et vous, Docteur Elpida, en laissez dangereusement trop à vos patients. On raconte qu'un prétendu "Journal Clandestin" circule dans l'institut. Mais pour qu'un tel instrument de révolution puisse s'établir, il faut du temps : celui de l'écrire, et celui de propager sa parole.

Victor marqua un temps pour laisser ses paroles imprégner l'esprit de son interlocuteur.

-J'ai donc deux propositions à vous faire : tout d'abord, réduisez le temps libre mis à disposition des patients. Au lieu qu'ils se tournent les pouces en attendant leurs consultations ou de reprendre les cours, faites les travailler, fatiguez-les à la tâche et rendez les utiles : avec les mains et l'esprit occupés, nul n'aura plus le temps de lire ou d'écrire un journal.
Mon autre proposition est plus...Drastique. Faites d'un des patients votre bouc émissaire. Prétendez qu'il est un des fidèles du Journal et qu'il mérite donc la Grande Sanction. Si l'auteur du Journal ne se dénonce pas pour le sauver, alors il - ou elle - passera pour un donneur de leçon immoral, c'est à dire ex-ac-te-ment ce à quoi il - ou elle - prétend s'opposer. Il y a de fortes chances que non seulement vous fassiez peur aux autres lecteurs, mais qu'en plus vous leur fassiez perdre foi en l'auteur si celui-ci ne se dénonce pas.


Victor sourit et se redressa, croisant les bras avec assurance.

-De mon expérience, ces deux techniques n'échouent jamais à affaiblir les plus rebelles. L'Institut est un havre de paix, alors hors de question qu'il devienne un enfer à cause de misérables insectes.

Le mépris de ses dernières paroles était tangible. Victor pensait chacun de ses mots : s'il y avait une chose qu'il ne pouvait et ne voulait pas reprocher à Donatien, c'était qu'il avait fait de l'Institut un lieu exemplaire pour ses recherches. Il ne voulait pas que cela change, et était prêt à tout pour cela.

C'était la loyauté grahamesque.


Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Mar 9 Avr - 17:56


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

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- Vous changez vite d'opinion, très cher, mais je suis ravi que vous me posiez la question.

Donatien fronça les sourcils. Etait-on en train de l'accuser sur sa volatilité concernant ses opinions ? Etait-on en train de le critiquer ? Et ce "très cher" sonnait à ses oreilles comme un "mon poto"... Arf.
Cependant Donatien ne grinça pas trop fort des dents : il ne souhaitait pas montrer son agacement. Restons courtois et écoutons ce que l'allié avait d'intéressant - ou non - à dire.
Restant bien soudé à sa chaise, le directeur temporaire écouta son collègue fleurir sa réputation et mettre en avant ses habilités concernant la gérance d'une Révolution. Surtout qu'il n'avait pas tort. Donatien n'avait jamais pu prendre le temps de gérer ce Journal Clandestin, trop occupé avec ses propres patients, son statut de médecin en chef et autres. Et surtout il avait fait confiance à son Lys qui lui avait promis d'enquêter. C'était elle qu'il fallait blâmer, pas lui.

- J'ai donc deux propositions à vous faire : tout d'abord, réduisez le temps libre mis à disposition des patients. Au lieu qu'ils se tournent les pouces en attendant leurs consultations ou de reprendre les cours, faites les travailler, fatiguez-les à la tâche et rendez les utiles : avec les mains et l'esprit occupés, nul n'aura plus le temps de lire ou d'écrire un journal.

Donatien écoutait avec attention son collègue. Les coudes sur le bureau, les mains jointes entre elles pour soutenir le menton du dirigeant, il ne cillait pas. Tout son corps était ouvert dans ce que lui racontait le bien trop grand médecin. Dire que Donatien avait voulu engager des espions pour éradiquer ce journal. S'il avait su, il aurait recruté Graham bien plus tôt. Malgré sa frime injustifiée, Graham en avait dans la caboche. Donatien l'avait tout de suite repéré, et c'était pour cela qu'il lui avait accordé son attention dès le début.

- Mon autre proposition est plus...Drastique. Faites d'un des patients votre bouc émissaire. Prétendez qu'il est un des fidèles du Journal et qu'il mérite donc la Grande Sanction. Si l'auteur du Journal ne se dénonce pas pour le sauver, alors il - ou elle - passera pour un donneur de leçon immoral, c'est à dire ex-ac-te-ment ce à quoi il - ou elle - prétend s'opposer. Il y a de fortes chances que non seulement vous fassiez peur aux autres lecteurs, mais qu'en plus vous leur fassiez perdre foi en l'auteur si celui-ci ne se dénonce pas.

Bien que rien ne changea véritablement sur le visage de Donatien - son regard dur, son expression figée dans un air sérieux -, une lueur vint animer le fond de sa pupille. Il savait déjà qui tiendrait ce rôle.
Concluant son discours - en plus d'avoir des idées, Graham avait une prestance orale stupéfiante : le médecin blanc ne s'était même pas senti happé par la discussion -, Donatien respira de nouveau. Il laissa planer un silence, prenant le temps de réfléchir à ce qui venait de se dire.
Puis il tourna le dos à Graham, faisant face à sa fenêtre, tel un personnage de théâtre dramatique soudainement inspiré. Encore des décisions de directeur à prendre... Mais pour une fois, c'était plutôt facile.
De sa place, Victor ne devait sûrement voir que la manche de chemise blanche de son patron appuyée contre l'accoudoir.

- Je vous offre une prime, Graham, si vous devenez un des bourreaux de ce dit-patient bouc émissaire. Plus la personne choisie paraît forte, plus les patients de ce journal seront effrayés. Alors autant être efficace.

Il se retourna lentement, son fauteuil en cuir gémissant dans le mouvement - Donatien était plutôt une drama Queen qui aimait soigner ses effets.

- Y66. Elle sera parfaite. Et vous serez justement gratifié si vous lancez le mouvement. J'engagerai quelqu'un pour faire suivre. Mais en tant que son titulaire, votre rôle est important là-dedans.

Donatien préférait employer le présent plutôt que le conditionnel car, lorsqu'il avait une idée en tête, il était difficile de la lui retirer.

Docteur Elpida
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Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Sam 4 Mai - 10:18
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


Victor Graham avait toujours su comment captiver son audience, et aussi particuliers Donatien était-il, il n'échappait pas à cette règle : pas une seule fois il ne chercha à l'interrompre et son regard resta fixé sur la haute stature du marquis tandis qu'il finissait sa diatribe. Cette fixité avait même quelque chose d'inquiétant, et Victor ignorait si une quelconque pensée animait ces yeux d'or fondu ou si au contraire la tourmente de l'âme n'avait de cesse d'agiter l'esprit dérangé du nouveau directeur. Au fond, cela lui importait peu. Tant qu'il se savait écouté, le marquis de Graham était satisfait.

Evidemment, il appréciait tout autant qu'on lui donne raison. Peut-être plus, d'ailleurs.

Finalement, quelque chose changea dans l'attitude du Docteur Elpida. Difficile de dire quoi, puisqu'il restait absolument impassible et qu'il ne laissait rien transparaitre dans ses gestes, mais Victor était un ophtalmologue de génie : les yeux, c'était son domaine. Il savait distinguer la plus petite nuance de clarté dans un regard, et en particuliers, il savait y lire les plus petits éclairs d'émotions.

Il lui sembla alors que Donatien venait d'avoir une épiphanie.

Tandis que le Docteur Graham arquait un sourcil, le dos droit et les bras toujours croisés, la réponse du nouveau directeur ne se fit pas attendre. Tournant dramatiquement son fauteuil pour n'en offrir que le dos à l'unique oeil valide de Victor, Elpida déclara alors :

- Je vous offre une prime, Graham, si vous devenez un des bourreaux de ce dit-patient bouc émissaire. Plus la personne choisie paraît forte, plus les patients de ce journal seront effrayés. Alors autant être efficace.

Le rictus d'abord triomphant qui menaçait de flotter sur les fines lèvres du Docteur Graham ne s'épanouit finalement jamais, remplacé par un rictus circonspect. Il était évidemment satisfait que son interlocuteur approuve ses propos, ce qui était de toute manière une évidence, mais il n'appréciait guère qu'on le nomme vulgairement "Graham" comme s'il n'était qu'un des sous fifres du Docteur Elpida. Il était un marquis, que diable ! Pas un vulgaire faquin ! Heureusement le fil de sa reflexion l'entraina ailleurs avant qu'il ne puisse s'offusquer. En dehors de cela, il n'avait pas le temps de devenir le bourreau du bouc émissaire : il avait déjà trop à faire avec ses recherches actuelles. Cela dit, la perspective d'être craint et respecté par les patients, davantage qu'il ne l'était déjà, lui plaisait grandement. Victor était extrêmement talentueux dans l'art de briser psychologiquement ses opposants, c'était quelque chose que l'armée lui avait appris. S'il pouvait utiliser cette capacité pour sauver l'Institut et ainsi tout le travail qu'il avait pu entreprendre depuis plusieurs années, ce n'était finalement pas une si mauvaise idée.

Oui, être un bourreau ne le dérangeait en définitive pas tant que cela.

Néanmoins, deux choses le dérangeaient véritablement dans cette réponse : Tout d'abord, il ne voulait pas de prime. L'argent n'était pas un problème pour lui, il en avait suffisamment pour vivre riche jusqu'à la fin de sa vie - peu importe ce que son banquier lui disait à ce sujet. Ensuite, si Victor était d'accord sur le choix d'un patient psychologiquement fort, il avait le mauvais pressentiment - non, la certitude - que Donatien allait lui proposer Amalia. Après tout, ce type était un obsessionnel, alors le marquis serait très étonné si la jeune fille qui occupait ses sombres pensées depuis le début de la conversation avait quitté ses pensées.

Tandis que le Docteur Graham réfléchissait, Elpida se tourna à nouveau vers lui, toujours aussi dramatiquement, dans un froissement de cuir et de tissus. Victor se demanda pour quelle raison il s'était tourné dans un premier temps. Avait-il eu un étrange besoin de regarder par la fenêtre ? Ou aimait-il juste soigner ses entrées ?

- Y66. Elle sera parfaite. Et vous serez justement gratifié si vous lancez le mouvement. J'engagerai quelqu'un pour faire suivre. Mais en tant que son titulaire, votre rôle est important là-dedans.

Victor eut un sourire arrogant, voyant ses doutes être absolument confirmés. Donatien était un excellent médecin, mais l'intuition de l'enfant derrière le masque blanc n'avait toujours pas quitté le marquis de Graham et l'entêtement auquel il assistait lui confirmait toujours plus cela. Amalia n'avait pas raté son effet sur l'esprit du Docteur Elpida : ce dernier voulait bel et bien sa déchéance pure et simple. Victor se souvint alors qu'il avait découvert le dossier d'Y66 après avoir été encouragé par Donatien à prendre un nouveau patient : avait-il prévu qu'il s'intéresserait au dossier de la jeune femme aux yeux vairons ? Non, impossible : cela signifierait que la décision de Victor avait été influencée par un tiers, ce qui était absolument irréalisable.

Dans tous les cas, le grand ophtalmologue se trouvait devant un choix. En soi, bousiller la vie de sa patiente ne lui posait aucun problème éthique puisque seul son oeil lui importait. L'ennui, c'était qu'Amalia n'était nullement une patiente comme les autres. Elle avait un intérêt pour sa propre pathologie qui rendait l'étude de cette dernière par Victor bien plus simple. Aussi étrange cela était-il, le marquis n'avait aucun mal à admettre qu'il avait besoin de la complicité de la jeune femme dans ses recherches sur ce curieux oeil. Si elle se braquait, il n'aurait plus accès qu'à des données physiologiques et non psychologiques. Cela le retarderait grandement dans ses recherches, et si Victor n'aimait pas quelque chose, c'était bien le retard.

Par ailleurs, un autre point le chiffonnait. Amalia était certes connue pour son intransigeance, et sa déchéance terrifierait probablement les autres patients, mais à la connaissance de Victor, elle n'était pas DU TOUT appréciée par ces derniers.

La crainte de voir un monstre tomber était-elle plus forte que la satisfaction de voir un adversaire s'écrouler ? Voilà une question scientifiquement intéressante.

-Si Amalia semble certes forte, elle n'en est que plus détestée, fit finalement remarquer le Docteur Graham, plantant ses yeux d'émeraude dans ceux de pyrite de son interlocuteur. En faire un bouc émissaire, c'est également prendre le risque de satisfaire ses très nombreux ennemis, et que ces derniers n'y voit pas une sanction envers les rebelles mais une punition pour son comportement tendancieux. Cela les conforterait dans leurs idéaux.

Pour une fois, le ton qu'avait utilisé Victor était dénué de suffisance ou d'une nuance professorale. Il faisait part de sa réflexion comme un médecin à un autre médecin, chose extrêmement rare chez lui, mais le Docteur Graham prenait très au sérieux toutes perspectives scientifiques et tous moyens d'aider l'Institut.

En plus, maintenant que Donatien avait accepté ses offres, il confirmait son statut de POI malgré toutes ses étrangetés.

-J'avais une autre personne en tête : X111, le frère de feu-Z01. S'il y a une personne tenant un grief contre l'Institut, c'est bien lui, et après m'être renseigné, il s'est révélé assez bien entouré. L'accuser d'être un fidèle - voire l'auteur - du Journal serait non seulement cohérent, mais en faire un bouc émissaire pourrait atteindre tout son cercle privé.

Victor plissa les yeux et eut un sourire convenu derrière sa barbe.



Dernière édition par Victor Graham le Lun 27 Mai - 14:35, édité 1 fois
Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Sam 25 Mai - 17:30


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

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Imaginer Soixante-Six humiliée chaque jour de l'année étira un rictus de satisfaction sur le visage creusé de Donatien. Sa jugulaire palpitait d'excitation dans sa nuque et ses nerfs gonflaient ses tempes.

- Si Amalia semble certes forte, elle n'en est que plus détestée.

Donatien fronça les sourcils et son front se dégonfla. Soixante-Six n'était pas une Némésis unique ? Elle le serait pour tout le monde ? Décidément, Donatien ne connaissait pas ses patients. Il avait longtemps ignoré l'existence du Journal Clandestin, n'avait pas anticipé la fuite lors de la tempête de Z01, ou même encore l'incendie dans la forêt. Si sa jugulaire battait désormais, c'était d'irritation.
Il aurait été aveugle sur tous les points, vraiment.
Si Soixante-Six était haïe par tout le monde, alors en effet, le plan serait moins efficace. Le peuple préfère qu'on éradique la peste plutôt qu'on ne l'alimente.
A moins que cela ne permette à Donatien d'être encore plus apprécié par ses patients. Si on le voit mettre à terre une pareille vérole, on l’idolâtrerait !

- En faire un bouc émissaire, c'est également prendre le risque de satisfaire ses très nombreux ennemis, et que ces derniers n'y voit pas une sanction envers les rebelles mais une punition pour son comportement tendancieux. Cela les conforterait dans leurs idéaux.

Encore un point pour Graham. Si ce n'était pas pertinent, Donatien lui aurait fait ravaler ses paroles et lui aurait enfoncé ses yeux perçants dans leur orbite. Certes, Donatien aimait soutenir les regards de ses interlocuteurs car il avait la sensation qu'il était alors le meneur ; or, les rôles s'échangeaient par intermittence avec l'ophtalmologue.
Le médecin en chef croisa les doigts sous son menton et son visage se figea, comme soudainement glacé. Il était mal à l'aise et incapable de déterminer la cause de ce manque de confort dans la conversation. Pourtant, c'était clair comme de l'eau de roche : il n'était pas celui qui menait la discussion. Cela n'arrivait jamais.

- J'avais une autre personne en tête : X111, le frère de feu-Z01. S'il y a une personne tenant un grief contre l'Institut, c'est bien lui, et après m'être renseigné, il s'est révélé assez bien entouré. L'accuser d'être un fidèle - voire l'auteur - du Journal serait non seulement cohérent, mais en faire un bouc émissaire pourrait atteindre tout son cercle privé.

X111 ? C'était le numéro du frère de cette insolente de Z01 ?
Il avait déjà eu vent de ce numéro récemment. Mais dans quelle situation ?
Il secoua sa souris pour réveiller l'écran de son ordinateur. Il lui fallut plusieurs longues secondes d'attente pour comprendre que la machine était éteinte. Neutre, il se pencha vers sa tour pour l'allumer. Dans un silence rythmé par les bruits de automatiques du démarrage de l'ordinateur, Donatien attendait. Il n'avait pas la sensation de casser la conversation. Pour lui, il était tout à fait normal de faire patienter son interlocuteur.
Mot de passe. On arrivait sur l'écran d'accueil. Donatien se pencha en avant vers l'écran, les paupières plissées ; un vrai pépé. Il lui fallut cinq minutes pour fouiller dans les dossiers et ainsi trouver sa pépite. C'était bien cela : il avait déjà puni X111 récemment. Il ne voulait pas qu'on s'acharne sur lui. On le verrait comme un bourreau et ne serait plus adoré par les patients.

- Je ne suis pas certain que X111 soit le bon choix.

Il se détacha de l'écran en cillant frénétiquement. Il fallait vraiment qu'il demande à Agnès comment régler la luminosité de cette fichue machine, à chaque fois il avait l'impression de faire face à un néon.
Il fixa à nouveau son collègue, un point lumineux brouillant le centre de sa vision jusqu'à ce qu'il s'habitue à la lumière douce de son bureau.

- Nous l'avons déjà sanctionné récemment, et son comportement, à ce que je sache, n'a plus posé de problèmes. Si nous en faisons un bouc émissaire, on nous prendra pour des tortionnaires. Il faudrait quelqu'un ayant fauté pour qu'on justifie le rôle de bouc émissaire par une sanction. Soixante-Six n'a ... jamais était punie, en cela elle est idéale.

Donatien était un têtu. Il ne lâcherait pas l'affaire. Mais, d'ordinaire, il aurait achevé la conversation sur son choix et aurait sorti Graham de son bureau. Mais l'homme avait su soulever des points intéressants, et c'était pour cela qu'inconsciemment, Donatien ne s'entêtait pas trop.
Il ouvrit un tiroir de son bureau, en sortit une pile de dossiers. Les fiches des patients. Ce n'était pas un résumé détaillé puisqu'ils appartenaient aux titulaires, mais il y avait l'essentiel. Les feuilles étaient disposées en face de Donatien. Quelques-unes dépassaient, comme pour que Victor puisse piocher dedans à son tour. On y trouvait le dossier de présentation de Lys, Pavot, Edelweiss. De X111, de sa soeur, et du gamin qui les accompagnait souvent. De Soixante-Six. D'un enfant basané. Des jumelles, récentes. Des deux nouvelles patientes d'Ange.
Donatien s'arrêta un instant sur le cas de W56. Il posa son dossier à côté du clavier et chercha son numéro dans la base de recherche de l'institut. Bingo.

- W56. Elle a été prise au port à fouiller dans une des cargaison. Les patients doivent savoir qui elle est étant donné qu'elle ne passe pas inaperçu : une prothèse en fer au bras, ce n'est pas commun. Elle est à l'Institut depuis 5 ans, les patients savent qui elle est. Son médecin la décrit comme plutôt "tête brûlée". Bon profil.

Si Victor lui refusait encore son choix à lui, Donatien imposerait Soixante-Six. C'était lui le roi, le chef, après tout.




hors rp:
Docteur Elpida
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) VythFiche personnage : Sa fiche personnageEspace personnel : Son espace privéGroupe : La FamilleDate d'arrivée à l'Institut : 12/09/2008Age : 34
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Sam 15 Juin - 20:28
Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirft. Dodo


Donatien toisait Victor pendant toute sa réponse, mais ce dernier n'en avait cure. Il savait qu'il avait raison et Donatien devait également le savoir malgré son peu de jugeote. Etait-ce la haine envers Amalia qui l'aveuglait ? Ou simplement son ego ? Le marquis l'ignorait. Il espérait simplement que cela ne mettait pas en péril ses recherches sur la pathologie de Y66.

Finalement, le blanc médecin détourna ses yeux pâles du grand ophtalmologue, et il se pencha sans un mot vers son ordinateur. Victor le regarda faire, arquant un sourcil. Contrairement à son interlocuteur dont le dos s'arrondissait devant l'écran, le marquis avait conservé son dos droit et sa nuque altière, aussi sévère qu'à son entrée dans ce grand bureau. Un pli contrarié vint barrer ses lèvres et ses épais sourcils : il n'aimait pas qu'on le fasse attendre. Pire : il n'aimait pas perdre son temps. Pourquoi diable Elpida était-il soudainement si silencieux ? Victor lui avait-il ôté toute envie de trouver de nouveaux arguments contre Amalia ? A cette pensée, le médecin eut un léger sourire, ce genre de rictus qui conviendrait davantage à un serpent qu'à un être humain. Il se sentait toujours au contrôle de la situation, mais avec Donatien Elpida, un air de malaise et de jeux de pouvoir flottait toujours dans l'air, et Victor était loin de le trouver plaisant. Mais à la pensée d'avoir mouché le nouveau Directeur, l'ego surdimensionné du marquis lâchait un grognement satisfait, si bien que Victor regardait avec arrogance son interlocuteur se perdre dans la lumière de son écran avec une lenteur infinie. D'ailleurs, un jeune homme comme lui n'était-il pas censé être doué en informatique ? Ou en tout cas meilleur qu'un quadragénaire comme Victor.

- Je ne suis pas certain que X111 soit le bon choix, déclara soudain Donatien, rompant le silence.
Victor cilla. Il ne s'était pas attendu à cette réponse, tant il s'était déjà convaincu de la réussite de son discours.

-Plaît-il ? rétorqua-t-il en perdant son sourire.

- Nous l'avons déjà sanctionné récemment, et son comportement, à ce que je sache, n'a plus posé de problèmes. Si nous en faisons un bouc émissaire, on nous prendra pour des tortionnaires. Il faudrait quelqu'un ayant fauté pour qu'on justifie le rôle de bouc émissaire par une sanction. Soixante-Six n'a ... jamais était punie, en cela elle est idéale.

Victor n'y tint plus et leva ostensiblement les yeux au ciel, perdant patience. Comment avait-il pu croire que le Docteur Elpida entendrait raison ? Ce n'était plus de l'entêtement, c'était de l'obsession. Oui : Donatien était bel et bien un obsessionnel. Qui l'aurait-cru ?

-Je me permets d'insister, siffla-t-il en posant ses deux mains sur le bureau de Donatien et se penchant vers ce dernier pour se mettre à la hauteur de son regard, bien qu'il demeurât toujours trop grand pour cela. Amalia n'est...

Les mots moururent dans sa gorge au profit d'un regard vers les dossiers que le Docteur Elpida déposait devant lui. Victor reconnut leur format : c'était des dossiers de patients. Il se redressa, arquant un de ses épais sourcils, et observa Donatien feuilleter parmi les papiers. Etait-il en train...De chercher un nouveau bouc émissaire ? Le vert ardent du regard de Victor brilla quelques instants. Les noms défilaient, seuls quelques uns lui étaient familiers : Amalia, bien sûr, mais aussi Nevrabriel, ainsi que d'autres patients X que Victor avait déjà examiné. Un dossier attira son attention, il s'en saisit nonchalamment. Béatrice Dågmar. Il fronça le nez avec un certain mépris au souvenir de la silencieuse gamine au si incroyable regard, malheureusement inexploitable.

Donatien interrompit le train de ses pensées de sa voix trainante. Il avait dans les mains un dossier que Victor ne connaissait pas.

- W56. Elle a été prise au port à fouiller dans une des cargaison. Les patients doivent savoir qui elle est étant donné qu'elle ne passe pas inaperçu : une prothèse en fer au bras, ce n'est pas commun. Elle est à l'Institut depuis 5 ans, les patients savent qui elle est. Son médecin la décrit comme plutôt "tête brûlée". Bon profil.

Le Docteur Graham échangea le dossier qu'il tenait avec celui que lui conseillait Elpida, et feuilleta rapidement les notes des différents médecins. Zyra Shane ? Jamais entendu parler. Ce n'était guère étonnant, ses yeux étaient d'un mordoré des plus inintéressants d'après la photographie qui accompagnait le texte. Mais pour une fois, Donatien faisait preuve de bon sens : en vue de son profil psychologique et de son passif vis à vis de l'Institut, elle était parfaite. Les rebelles aux grandes gueules étaient monnaie courante dans l'armée, Victor savait comment s'y prendre avec eux.

-Effectivement, admit-il presque à regret. Il aurait préféré en avoir eu l'idée lui-même, mais il ne s'intéressait pas assez aux Inutiles pour cela. Utiliser une patiente récalcitrante dotée d'une certaine réputation ne peut nous être que profitable.

Il passa une main dans son impeccable barbe, songeur, puis son regard insondable revint sur le Docteur Elpida.

-Je peux être son bourreau, si vous le désirez. Mon expérience dans la matière m'est utile, mais je n'ai que peu de temps à lui consacrer. Si d'autres médecins l'avaient dans le collimateur, cela serait plus efficace - peut-être que le Docteur Barrabil pourrait se révéler efficace, sa réputation déjà entachée éviterait qu'une regrettable bévue ne retombe sur vous, en tant que Directeur.

Le marquis avait parlé d'un ton froidement logique, comme s'il venait d'expliquer la météo. Il jeta un regard à sa montre et constata avec effroi qu'il allait être en retard à une de ses consultations. Ce petit entretien avait duré plus longtemps qu'il n'avait semblé à Victor, lui d'ordinaire réglé comme du papier à musique. Il reposa le dossier.

-Je suis navré d'interrompre si abruptement cette discussion, mais je dois disposer : j'ai à faire. Je suis ravi d'avoir pu mettre au point certaines de mes idées avec vous - peut-être même devriez-vous reconsidérer ma proposition financière, à l'occasion.

Il lui tendit la main d'un geste courtois, attendant qu'il la serre pour sceller cette fructueuse conversation.

Victor Graham
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Docteur ElpidaChef de la Famille
Jeu 4 Juil - 20:44


Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas

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Le suspens n'était pas des plus insoutenables. Donatien savait qu'il gagnait la bataille. Après tout, il avait bien plus de puissance que Graham. Il reconnaissait à ce dernier un sens de l'élocution et une intelligence bien placée ; néanmoins, ce n'était pas suffisant face à Donatien.

- Effectivement. Utiliser une patiente récalcitrante dotée d'une certaine réputation ne peut nous être que profitable.

Donatien ne s'en rendit pas compte, mais ses muscles se détendirent. Il fut alors satisfait pendant une milliseconde de cette situation. Le reste ne fut qu'un long soupir : en effet, désormais il était question d'organisation. Il avait d'autres chats à fouetter. Au final, n'avait-il pas obtenu rien de ce qu'il voulait ? Premièrement, concernant Soixante-Six, rien n'avait été décidé. Secondement, il avait le droit à une surcharge de travail. Graham était-il vraiment de son côté ?

- Je peux être son bourreau, si vous le désirez. Mon expérience dans la matière m'est utile, mais je n'ai que peu de temps à lui consacrer. Si d'autres médecins l'avaient dans le collimateur, cela serait plus efficace - peut-être que le Docteur Barrabil pourrait se révéler efficace, sa réputation déjà entachée éviterait qu'une regrettable bévue ne retombe sur vous, en tant que Directeur.

Donatien refusait d'ores et déjà que son collègue Barrabil soit à nouveau le bourreau d'une adolescente. Il avait appris de ses erreurs. Mais il entendait les contraintes de Graham et réfléchirait à ce sujet.
Il ouvrit son agenda et écrivit qu'il fallait entamer les recherches d'un bourreau. A en discuter en réunion mardi.
Quoique, il imaginait bien la réaction d'Agnès. Elle serait contre.
Il referma l'agenda en se promettant d'y réfléchir. Pour l'instant, il devait consacrer toute son énergie à son Lys.
Il était sur le point d'écourter la conversation, mais son collègue le devança :

- Je suis navré d'interrompre si abruptement cette discussion, mais je dois disposer : j'ai à faire. Je suis ravi d'avoir pu mettre au point certaines de mes idées avec vous - peut-être même devriez-vous reconsidérer ma proposition financière, à l'occasion.

De mauvaises concordances firent de Donatien quelqu'un d'impoli. En effet, comprenant que Graham allait vaquer à d'autres occupations, Donatien s'occupait déjà à ranger les dossiers. Ainsi, il ne vit pas la main tendue de l'ophtalmologue. Il lui fallut trois longues secondes pour la remarquer. Sauf qu'il n'avait pas saisi l'occasion et se demanda ce que Graham voulait bien prendre sur son bureau. Décidément, il devenait louche ce barbu-là.

- Je verrais. Vous pouvez disposer.

Donatien lui fit un geste pour lui signifier de partir. Une fois seul, il vérifia que tout était bien en place. Dire qu'il n'aurait bientôt plus son agent d'entretien pour faire ce travail-là ...
Encore et toujours des tâches. Encore et toujours du travail supplémentaire. Si on continuait ainsi, il verrait laisser la place à quelqu'un d'autre. Il n'était pas fait pour diriger, en fait.





hors rp:
Docteur Elpida
Image : Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir (Donatien) VythFiche personnage : Sa fiche personnageEspace personnel : Son espace privéGroupe : La FamilleDate d'arrivée à l'Institut : 12/09/2008Age : 34
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