Some Girlz Talk
Feat. Solveig
Sérieusement… Je crois que je commence sérieusement à regretter d’être venu ici. Mais c’est sûr que les petits secrets sombres qui pourraient faire fuir ne vont pas être écris en belle calligraphie sur leur site internet… Je pousse un long soupir en observant l’horizon, la tête appuyée sur ma paume, elle-même soutenue par mon genoux. Qu’est-ce que je suis en train de faire de ma vie eu juste ? Je voulais être gynéco… Coché. Je voulais être au contact des femmes… Décoché. Je voulais que ça se passe bien entre moi et mes patients et collègues…. Décoché déchoché. Une révolution. Sérieusement… Si M’man me voyait… Elle me dirait de rentrer directement en France pour trouver du boulot là où ma vie serait totalement simple et normale. Mais bon… Plus de réseaux… Plus de téléphone depuis des mois…
Soudain, ça me frappe. Est-ce qu’elle pense que je suis mort ?! Je me redresse alors que mon cœur se serre à cette pensée. Merde… J’aurais aimé la prévenir… Lui dire de pas s’inquiéter… Que je suis vivant et que je fais de mon mieux pour trouver un moyen de rentrer… De survivre. Et…en même temps, je sens que les femmes de l’île auront besoin de moi. Je suis grave partagé là. Plus de contraception… Plus de protection… Je vais être demandé, c’est certain ! Si je ne suis pas là pour les guider, qui le fera ? Ce sera un carnage ! Ce n’est pas pour rien que les chirurgiens ne s’occupent pas des césariennes et des accouchements !
Dans mes pensées, je fixe la mer, rêvant de plus. Babe… t’as 28 ans… Et t’es coincé sur une île… Sans électricité… Sans réseaux… Sans police… Tu pourrais faire absolument tout ce que tu veux. Et t’es là… crevant la dalle, à essayer de pêcher un pauvre poisson qui observe ton appât pourri en plissant ses yeux suspicieux… C’est…Pathétique.
Un nouveau soupir m’échappe. Avec l’hiver, je ne peux pas me permettre de me rabattre sur autre chose que du poisson…
- Putain mords, toi là ! On se les caille ici !!
Je veux rentrer dans la grotte… Retourner au chaud… Mais aussi chiant cela est-ce, je ne peux pas revenir bredouille. Poisson... C'est entre nous maintenant ! Et je vais être honnête... T'as vraiment pas envie que je m'énerve. Alors laisse-toi faire !
Some girlz talk
Solveig avait ses règles.
Elle s'était réveillée ce matin dans une mare de sang, et bien évidemment, son premier réflexe a été de vérifier si elle n'était pas blessée. Après tout, elle avait fait un rêve où un zombie - qui ressemblait beaucoup à Nev - la tuait avec un +4 de Uno. Et la douleur fulgurante dans son ventre l'avait ramené à la réalité.
Elle avait toujours été régulière dans son cycle, mais depuis qu'elle vivait dans sa cabane, ses hormones jouaient ses règles à pile ou face. Elle pouvait avoir un cycle de deux mois comme de trois semaines. Aujourd'hui, elles arrivaient après une longue traversée du désert. Tant et si bien, que la blondinette était incapable de savoir à quand remonter les derniers caprices de ses ovaires.
Elle s'était levée en constatant les dégâts : tous ses draps étaient tâchés ainsi que son pantalon de pyjama. Elle était bonne à tout laver. Au final ce n'était pas trop mal, elle n'était pas trop propre aussi. Ses cheveux étaient poisseux sur le haut de son crâne, voire luisant. Dommage, parce qu'une fois bien lavés, ils rayonnaient autour de son visage de poupée.
Elle s'emmitoufla dans un épais manteau, aussi grand et large qu'elle ressemblait à un bonhomme Michelin. Elle glissa une éponge dans sa culotte pour absorber le sang utérin puis descendit de sa cabane avec ses affaires tâchées de rouge. Elle prit également sa hache, elle en profiterait pour couper du bois.
Elle passa, guillerette, avec sa hache et son sang, devant le sapin de Noël qu'elle avait décoré avec ses copains. Son coeur se remplit de joie en repensant à ce moment avec eux, avant qu'un sourire triste ne vienne tout éteindre. Elle vivait quand même toute seule, et Aeden était parti ...
Elle se pinça les joues pour se redonner du courage et prit son chemin jusqu'à la mer. Elle débarqua dans son gros manteau blanc, traînant sa hache trop lourde dans le sable, laissant une trace derrière elle.
Elle remonta ses manches avec une expression déterminé - mais elles retombèrent sur ses poignets - et plongea ses affaires dans la mer froide. Elle frotta vigoureusement, langue tirée, sourcils froncés quand elle entendit une voix. Elle vit, un peu plus loin, un homme sur un rocher. Pas du genre mystérieux et sombre comme elle les aimait, mais vraiment mignon. Avec ses petites lunettes et sa canne à pêche, il avait l'air de pas trop de butin.
- Bonjour !, le salua Solveig d'une voix forte et gaie.
Joignant le geste à la parole, elle secoua sa main ensanglantée pour lui dire bonjour. Elle avait un grand sourire béat sur le visage : elle était toujours contente de rencontrer des personnes !
Some Girlz Talk
Feat. Solveig
Rapidement, je focalise de nouveau mon regard sur mon appât, inspirant profondément alors que mon cerveau fonctionne à toute vitesse. Est-ce qu’il vaut mieux l’ignorer ? Une hache… et du sang… et à son expression, ce n’est certainement pas le sien ! Sinon elle aurait mal quelque part et demanderait de l’aide, non ? Mais… Si elle a tué quelqu’un… elle ne serait pas aussi enjouée, elle essaierait de se cacher, non ? Quoique… il n’y a pas de police ici… c’est beaucoup plus simple d’assumer… Bref, fait genre que tout va bien, Bae !
Je me tourne de nouveau vers elle, après seulement quelques secondes de réflexion et lui rend son signe avec un sourire faux et contrit.
- Bonjouuuur. Qu’est-ce que… Qu’est-ce que tu fais ?
Bae. Ne bouge pas de ton rocher. Reste-là. Si elle est si enjouée, elle doit certainement assumer son acte et n’aura pas de problème à te répondre. Donc tu devrais savoir de quoi il retourne exactement, et assez rapidement. Bordel… Faites qu’elle n’a tué personne… que c’est le sang d’un animal… ou mieux, qu’elle n’a pas l’intention de me tuer moi… Faites que ce soit vraiment plus simple et débile, que je puisse en rire ! Parce que là, j’avoue que je suis tout sauf rassuré. Une hache contre ma…canne à pêche… On sait qui gagne. Je garde mon sourire, alors que mes mains se resserrent sur ma canne, sur mes gardes. Elle a l’air tellement mignonne… Mais en tant qu’ancien membre du personnel, je sais quel genre de personne rôde sur l’île. Il y a des patients… il peut donc y avoir des fous !! Règle numéro un, ne pas se fier aux apparences !
Some girlz talk
La politesse est règle d'or au Japon. Solveig a été éduquée dans cet dynamique, à toujours saluer poliment les autres. Son père l'aurait sûrement reprise pour ce signe de main un peu trop vulgaire selon lui, mais au moins elle disait bonjour !
Elle comptait s'arrêter là et se remettre à son linge, mais l'adulte - il avait l'air très mature, il devait être psy dans une école parce que tous les psys dans les écoles dans les jeux de drague ressemblaient à ça - la salua de la main aussi, et ajouta même un très beau sourire !
Il avait l'air amical ! C'était l'occasion de papoter !
Solveig s'approcha gaiement, laissant ses draps dans l'eau être emporté au grès des vagues ...
- Bonjouuuur. Qu’est-ce que… Qu’est-ce que tu fais ?
Il restait sur son rocher, en hauteur. Solveig, en contrebas, le contempla en mettant sa main en visière devant ses yeux pour se protéger du soleil froid de cet hiver.
S'il n'était pas psychologue, alors il était au moins un super-héros sous sa forme humaine. Il était plus que classe avec ses bouclettes dans lesquelles le vent se glissait pour leur donner du mouvement et ses lunettes derrière lesquelles se cachaient sûrement des yeux courageux. Elle, avec ses cheveux gras et sa doudoune, elle n'avait rien de la demoiselle en détresse ou de l'acolyte sexy. A la limite, elle faisait un très bon acolyte du méchant, les bouffons maladroits.
- Je nettoie mes ...
Comment disait-on "drap" déjà ? Bon, elle allait essayer un synonyme.
- ... du linge, répondit-elle dans un anglais haché. Et toi ? Tu fais quoi ? Je peux venir ?
Elle tendit la main pour qu'il l'aide à monter sur le rocher. S'il ne bougeait pas, alors elle essaierait d'elle-même. Après tout, elle savait escalader ! Il faudrait juste qu'elle évite de tomber, comme à Noêl.
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