contexte

Le jour de la Grande Division naissent quatre factions : une dictature basée sur les principes de l’Institut qu’on avait connu ; une communauté qui fonctionne sous forme de vote et de code pénal ; un groupe retrouvé piégé dans le bunker ; et une anarchie qui s’est ancrée en pleine Nature. Des tensions, étincelles existants déjà avant la Grande Division et la Révolution, ont fait naître une ambiance de guerre froide entre les factions. L’Institut Espoir n’existe plus, mais cette ambiance survivaliste, à qui l’emportera sur l’autre prend racine.

Il ne reste plus que l’Espoir. +

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Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Mar 13 Oct - 11:44
Amalia


Victor observa ses notes et se passa une main dans les cheveux, le regard sombre. Il tenait dans ses mains ses propres recherches et la publication de thèses qu'il avait imprimé avant l'isolement de l'île. Louée soit sa méfiance envers la technologie, utile, mais instable. Les lettres défilaient devant son unique oeil fonctionnel, chargées d'acronymes scientifiques pointus. LT4, NKT, TLR...Tout un florilège de termes immunologiques aussi fondamentaux que vains au regard de plus en plus consterné du Docteur Graham. A la consternation se mêlait l'irritation, car Victor ne pouvait ressentir l'émotion même qui aurait pu caractériser l'état d'esprit de tout homme dans sa situation :

Le désarroi.

Les notes qu'il observait constituaient ses informations récentes quant à l'état de santé de sa patiente, Katerina. Et les résultats étaient en chute libre. Si la jeune femme avait pu reprendre vie au cour de la dernière année, elle était en train d'en perdre depuis que le traitement élaboré par Victor se faisait rare. En effet, non seulement la réserve d'anti-viraux n'était pas éternelle, mais l'immunothérapie CAR-T était de plus irréalisable dans les conditions actuelles. Victor utilisait donc des méthodes plus rustiques en guise de substitut, se référant à des thèses plus ou moins anciennes et plus ou moins efficaces qu'il combinait avec le génie qui était le sien, mais force était d'admettre qu'il n'était pas immunologue et qu'il ne possédait pas le matériel adéquat sur cette île abandonnée des dieux mêmes.

Victor reposa rageusement ses papiers sur la table, dans un grand fracas de bois et de feuilles froissées. Le marquis avait fait déplacer son bureau dans l'une des larges pièces du troisième étage, à proximité de ses appartements. En réalité, son bureau constituait même la plus grande pièce de cet étage, ce qui était bien plus cohérent avec son statut que son lieu de travail d'antan. La décoration y était semblable, peu chargée en ornements, dotée d'une très large bibliothèque et de nombreux dossiers. L'endroit était lumineux, paré d'une grande fenêtre dont la lumière blafarde venait illuminer le bleu d'un tapis persan. Le cadre était ainsi idéal pour le travail, intimidant pour les étrangers, fascinant pour les érudits.

Mais l'observer de ses yeux verts ne suffisait pas à apaiser Victor.

Il se releva et se dirigea vers sa veste qu'il enfila par dessus le gilet de son complet. Tout en vérifiant ses boutons de manchette, Victor ouvrit la porte en grand, décidé à se changer les idées. Il avait quelques analyses à réaliser pour ses recherches, il savait que se plonger dans son travail et sa passion serait bien plus productif que se lamenter sur la situation critique de l'Institut. Et alors peut-être p-...

Plongé dans le train infernal de ses pensées, le marquis ne vit pas Katerina devant lui et il lui rentra dedans. Bien plus grand qu'elle, il ne fit que trébucher, mais la jeune femme tomba. Dans un réflexe, Victor la retint par le bras et l'enferma contre lui le temps qu'il retrouve son équilibre. Sans s'étendre sur ce contact importun, il se redressa et écarta la patiente de lui, l'observant avec une certaine colère, furieux d'avoir été surpris de la sorte.

-Fais attention ! tonna-t-il, cinglant.

Une fois la surprise passée, il se reprit et soupira, irrité mais calmé. Sa patiente était frêle, il avait craint de lui faire mal et cela avait attisé son mécontentement déjà grand qu'on se tienne sur sa route.

En revanche, le choc avait déréglé la prothèse oculaire de Victor. Il la sentait le démanger, elle était probablement légèrement tournée sur le côté. Le marquis se détourna pour dissimuler son regard et remit en place l'objet, tout en demandant d'un ton sec quoique plus calme, voire las :

-Quelle idée de se tenir sur mon chemin. Que fais-tu là, Katerina ?

Victor Graham
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Katerina Soukhovo-KobylinSecrétaire de Victor
Mer 14 Oct - 16:46
Katerina regardait le jeune homme qui se pensait soi-disant capable de suivre une formation de premier soin avec intransigeance, le sourcil levé sous l’agacement. S’il n’avait pas répondu à sa question d’ici quelques secondes, elle le renverrait étudier. Elle n’avait pas une réputation de tendre auprès de ceux qui se frottait à cette formation, mais la base était la base. Elle n’avait pas de temps à perdre avec des idiots. 3, 2, 1… Elle se leva sans un mot, les lèvres pincées et lui indiqua la porte en silence. S’il voulait un jour pratiquer, il faudrait déjà qu’il prouve avoir la motivation pour la partie théorique.

Elle ne pouvait raisonnablement pas bâcler son travail, malgré la pénurie de médecins et d’infirmiers. Elle connaissait celui-là, cette humiliation silencieuse le motiverait à revoir son travail à la hausse. Elle jeta un œil à la montre murale. Son aiguille était arrêtée, la batterie de cette dernière avait été réquisitionnée pour servir à des choses plus utiles. L’énergie était un bien précieux. Presque autant que les médicaments.

Elle abandonna son bureau pour passer dans la salle de laboratoire primitive qui se trouvait non loin. Sans courant ou électricité, difficile de faire beaucoup d’expérimentation. Elle jeta un coup d’œil à ce qu’elle avait réalisé la veille au soir. Réunissant quelques papiers ainsi qu’un livre d’anatomopathologie que son mentor lui avait prêté, Katerina se dirigea à grandes enjambées en direction du bureau de son supérieur. Elle devait parler au docteur Graham des résultats d’analyse qu’elle avait obtenus, et peut-être lui faire un contre rendu du déroulement de la formation qu’elle mettait en place afin de rendre des incompétents un peu moins idiots. Il aurait certainement quelques astuces à lui prodiguer à ce sujet.

Plongée dans ces pensées, elle évita de justesse la porte d’entrée du bureau du docteur Graham lorsque celle-ci s’ouvrit à la volée. Impossible par contre de ne pas percuter le médecin qui ne semblait pas l’avoir remarqué. Katerina tomba en arrière. Elle n’eut pas le réflexe de placer ces mains en arrière pour se rattraper, de peur de lâcher le précieux livre du docteur Graham. Lorsqu’il la rattrapa par le bras, il glissa malgré tout de ces mains et percuta le sol, ainsi que ces autres papiers. Elle s’accrocha à son mentor, rentrant l’espace d’un instant au contact avec sa chaleur rassurante avant qu’il ne s’écarte. Si ce contact n’avait été un accident, il aurait pu être considéré comme un geste paternel que la jeune russe n’attendait plus.

La colère qui suivit, transparaissant sur le visage du Marquis était plutôt exagéré, mais la jeune russe savait que sa mauvaise humeur influençait parfois ces émotions. Elle avait eu quelques mois pour s’en apercevoir. Elle ne savait pas ce qui le mettait dans cet état, mais ce n’était pas juste cette collision. Elle commençait à le connaitre à force de le côtoyer, mais surtout, il l’aidait à développer son sens de l’observation. Un bon médecin était capable de rester alerte en toutes circonstances.

-Fais attention !


Elle leva les yeux vers le visage de son mentor, qui commençait déjà à s’adoucir. La jeune russe ne pouvait que notifier que la prothèse oculaire de son médecin s’était déplacée sous le choc, étant donné que son iris verte ne se déplaçait plus en accord avec celle de son œil voisin. Le docteur Graham se dissimula avec pudeur pour le replacer, ce qui surprit quelque peu la jeune russe. Il savait que cela n’aurait pas incommodé sa patiente, elle qui suivait un cursus médical sous son aile. Et de toute manière, le Marquis ne s’encombrait pas du ressentit des autres lorsqu’il s’agissait de geste qui ne le concernait que lui. Cette pudeur signifiait autre chose. Elle n’eut pas le temps de s’en préoccuper :

-Quelle idée de se tenir sur mon chemin. Que fais-tu là, Katerina ?


La jeune russe se rappela alors de l’existence de ces notes éparpillées sur le sol, mais aussi et surtout du précieux livre de son mentor. Elle se baissa promptement pour le ramasser ainsi que ces papiers, tout en répondant au docteur Graham :

- Docteur Graham, veuillez excuser ma maladresse. Je vous amenais les derniers résultats des analyses réalisés sur vos différents patients. J’aurais souhaité parler avec vous des résultats inquiétants de M. Reheinart, il serait intéressant de procédé à un suivis psychologique.


Ce garçon était atteint de la maladie de Charcot. Anciennement sous un traitement expérimental qui avait montré quelques résultats encourageants, sa santé se dégradait désormais rapidement. Il n’y avait plus aucuns doutes sur l’issus vers laquelle il dérivait désormais. Et lorsque la médecine ne pouvait plus rien, il ne restait plus qu’une chose à faire. L’aider à partir dans les meilleures conditions possibles. Dieu merci, le livre du Marquis n’avait rien. La jeune russe se redressa, essayant de remettre de l’ordre dans ces documents avec une certaine maladresse.

- Et je souhaitais vous ramener votre livre.


Elle allait à l’essentielle, comme le Marquis le lui avait demandé. Elle savait qu’il n’aimait pas perdre son temps, et depuis qu’il était à la tête de l’Institut, il avait beaucoup à faire.
Katerina Soukhovo-Kobylin
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] Katou_10Fiche personnage : Le passé lointainEspace personnel : Le passé plus procheGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/02/2018Age : 28
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Mer 28 Oct - 11:20
Amalia


-Docteur Graham, veuillez excuser ma maladresse. Je vous amenais les derniers résultats des analyses réalisés sur vos différents patients. J’aurais souhaité parler avec vous des résultats inquiétants de M. Reheinart, il serait intéressant de procédé à un suivis psychologique.

Katerina avait changé, elle ne se confondait pas en excuse comme autrefois elle l'aurait fait. Elle ressemblait de plus en plus à une dame, et de moins en moins à une patiente. Victor était étonné de la rapidité avec laquelle ce changement s'était effectué, mais il se réjouissait qu'elle ait perdu de sa naïveté et de sa sensibilité. Une partie de lui regrettait toutefois, sans qu'il ne l'admette, que sa déference ostentatoire soit de plus en plus réduite. Cela avait toujours eu un côté touchant.

Lorsqu'il eût achevé de remettre sa prothèse avec soin, Victor se retourna vers elle et plongea ses yeux d'émeraude dans ceux de nacre de la jeune fille. Elle avait l'air déterminée, et ne s'encombrait pas d'un coulis d'empathie pour le patient dont elle parlait. Le Docteur Graham n'avait, d'ailleurs, pas la moindre idée de qui elle parlait, il ne retenait pas les noms des Inutiles, même lorsqu'ils faisaient partie de son Institut. Victor aperçut alors ses notes, alors qu'elle les ramassait, et lorsqu'elle se redressa il tendit la main et s'en empara prestement. Son regard les parcourut tandis qu'elle continuait :

-...et je souhaitais vous ramener votre livre.

Victor ne releva pas le regard vers ce dernier, il savait déjà de quoi il s'agissait. Katerina avait mis du temps à le terminer, mais ses notes semblaient correctes.

-Ton étude de la CIVD est partielle, fit remarquer le marquis en relevant finalement les yeux. C'est pourtant nécessaire à la compréhension de nombreuses pathologies. Au lieu de te concentrer sur les thromboses, sujet basique, penche-toi plutôt sur ce sujet. Page 253, il me semble. Garde le livre pour le moment, au lieu de tenter de t'en débarasser.

Il s'était exprimé sévèrement, et lui rendit ses notes tout aussi séchement, ne conservant que celles concernant le patient, encore agacé de s'être laissé surprendre. Pourtant, il reprit comme s'il n'avait rien dit, parcourant le dossier rapidement :

-Charcot, je vois. En phase terminale de la maladie, apparemment. Avec le matériel dont nous disposons, il n'y a...

Il s'interrompit et fronça soudainement les sourcils, puis reporta son regard sur son ancienne patiente avant de lui montrer ses propres écritures. On pouvait y lire les résultats de dosage hépatique aux côtés d'une indication concernant une ponction lombaire irréalisable en vue des conditions actuelles de l'Institut.

-...c'est toi qui a pris cette initiative ? C'est...plutôt...

Malin. C'est le mot qui lui pendait aux lèvres, mais qu'il se refusait à prononcer par habitude mégalomane et par retenue aristocratique. Alors il se reformula :

-...intéressant.

Victor songea qu'il était décidément un excellent professeur, et que Katerina n'était pas une trop mauvaise élève, pour qu'elle soit parvenue à pallier les difficultés auxquelles les médecins étaient actuellement confrontés. Une lueur nouvelle brilla au fond de son regard et y effaça les traces d'irritation, mais Victor se reprit vite.

-Nous ne disposons pas de psychologue actuellement, mais tu peux réquisitionner un de tes étudiants pour réaliser le suivi. Autre chose ?

Il était évident qu'il avait d'autres préoccupations plus importantes.

Victor Graham
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Katerina Soukhovo-KobylinSecrétaire de Victor
Lun 2 Nov - 2:06
Victor lisait ces notes avec attention, le verdict ne tarda pas à tomber :

-Ton étude de la CIVD est partielle, fit remarquer le marquis en relevant finalement les yeux. C'est pourtant nécessaire à la compréhension de nombreuses pathologies. Au lieu de te concentrer sur les thromboses, sujet basique, penche-toi plutôt sur ce sujet. Page 253, il me semble. Garde le livre pour le moment, au lieu de tenter de t'en débarrasser.

Elle hocha la tête, baissant les yeux. Elle se sentit décourager pendant quelques secondes seulement. Le travail s’amassait toujours plus et elle n’en voyait jamais le bout. De plus, chaque fois qu’elle venait montrer quelque chose au médecin, elle finissait par tout recommencer. Elle n’aurait su dire si c’était lui qui ne faisait que se montrer plus exigeant chaque fois ou si c’était juste elle qui manquait toujours de précision. Elle se ressaisit cependant bien vite. Elle avait la chance d’être formée par Victor Graham en personne. C’était un honneur dont elle devait se montrer digne, il n’y avait pas meilleur médecin que lui. Elle récupéra donc ces notes, hochant sagement la tête. Elle travaillerait plus tard ce soir, ce n’était pas comme si elle avait autre chose de prévu... en tout cas, rien en dehors de ces rendez-vous nocturnes avec Nevrabriel Erskine.

-Charcot, je vois. En phase terminale de la maladie, apparemment. Avec le matériel dont nous disposons, il n'y a...


Son froncement de sourcil n’allait pas pour la rassurer. Pas plus que son geste vers les résultats qu’elle avait soigneusement noté.

-...c'est toi qui a pris cette initiative ? C'est...plutôt...


Elle sentit son cœur battre. Elle essaya de dompter son visage qui reflétait une certaine nervosité. Allait-il la réprimander ? Elle n’aurait peut-être pas du gaspiller ces produits sur un patient condamné…

-...intéressant.


Katerina fut surprise. Elle se sentit encore davantage rebooster dans son travail. Victor Graham lui avait dit que son initiative était intéressante ! Elle avait presque envie de sauter partout tellement cela la rendait heureuse. Evidemment, elle n’avait plus 5 ans. Et le Marquis n’apprécierait pas ce genre d’exubérance. Elle se contenta d’un léger sourire, irrépressible.

-Nous ne disposons pas de psychologue actuellement, mais tu peux réquisitionner un de tes étudiants pour réaliser le suivi. Autre chose ?


Elle hocha la tête, elle avait déjà un nom en tête. Un de ces étudiants qu’elle trouvait particulièrement habile sur le sujet et qui avait suffisamment de compétence sociale pour mener cette mission à bien. Elle ferait avec lui une séance récapitulative ainsi qu’un essai pour s’assurer qu’il en soit vraiment capable bien évidemment. Il n’aurait pas une semaine facile. Mais elle se refusait à voir la moindre erreur apparaitre chez ces apprentis. Elle n’avait jamais oublié. L’importance d’une réputation.

Des restes de timidité dont elle n’avait pas encore su se débarrasser la firent hésiter, laissant s’écouler le précieux temps du Marquis alors qu’elle s’apprêtait à lui parler de cet autre chose interrogatif. Elle avait promis à Sheila de voir avec lui cela dit.

- Je souhaiterais vous demander une faveur. Lors de l’une de mes… marches réflectives, j’ai croisé une jeune femme. Elle venait se recueillir le long de la falaise, où son am-alliée est morte cet été. J’aurais aimé que la milice la laisse traverser la frontière lorsqu’elle s’y rend.

Katerina savait que le Marquis n’appréciait qu’à moitié de la savoir trainer dehors, et même sous l’appellation de « marche réflective » elle doutait qu’il ne voit ces sorties d’un meilleur œil. Surtout maintenant que le temps doux de l’été n’était plus au rendez-vous. C’était une imprudence étant donné ses résultats médicaux. Elle aurait probablement dû rester enfermée ici. Surtout qu’elle allait maintenant lui annoncer qu’elle avait discuter avec un nid à microbes sur pattes :

- Il s’agit d’une réfractaire.


Elle n’aurait su dire qui des réfractaires ou des membres du Village Victor avait le plus en horreur. Mais elle ne douta pas une seconde qu’il puisse refuser. Victor Graham était l’homme le plus droit qu’elle connaisse. Jamais il n’interdirait l’accès à un lieu de recueillement. Il respectait le chagrin d’un deuil, elle était certaine qu’il ai du connaitre cela dans sa vie. Elle serra le livre du docteur, ainsi que ces notes, contre elle
Katerina Soukhovo-Kobylin
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] Katou_10Fiche personnage : Le passé lointainEspace personnel : Le passé plus procheGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/02/2018Age : 28
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Mer 18 Nov - 12:10
Amalia


Katerina sembla hésiter à ajouter quelque chose, et bien ce laps de temps fut court, Victor s’impatienta.

-Eh bien ? insista-t-il.

-Je souhaiterais vous demander une faveur, déclara alors la jeune fille. Lors de l’une de mes… marches réflectives, j’ai croisé une jeune femme. Elle venait se recueillir le long de la falaise, où son am-alliée est morte cet été. J’aurais aimé que la milice la laisse traverser la frontière lorsqu’elle s’y rend.

Victor arqua un sourcil, surpris par cette demande et par sa formulation. Katerina semblait avoir compris les leçons du marquis, elle préférait désormais le terme d’allié à celui d’ami, mais il s’agaçait de voir sa patiente se faire l’avocat du diable pour une autre si cette notion était réellement assimilée. On n’enfreint pas les règles pour un allié, mais on peut le faire pour un ami, ce qui montre bien la vacuité de cette valeur.

- Il s’agit d’une réfractaire, ajouta alors Katerina d’une petite voix.

Un rictus de mépris passa sur le masque aristocratique du marquis. Sa réponse fut sans appel.

-C’est hors de question.

Il croisa les bras et l’observa durement.

-Si cette patiente tient à faire son deuil, j’ai déjà consenti à la création d’un cimetière dans cet objectif. Si elle tient absolument à visiter les falaises, elle n’a qu’à rejoindre l’Institut Graham. Je ne pensais pas avoir besoin de t’expliquer ce simple raisonnement.

Son mépris était désormais palpable. Victor se demandait véritablement comment une élève aussi prometteuse que Katerina pouvait encore être capable de telles interrogations. Peut-être était-elle trop sensible. Trop influençable.

Trop peu grahamienne.

Victor soupira, entre irritation et lassitude.

-Les morts n’ont que faire de notre deuil, Katerina, déclara alors Victor. J’espère que tu en as conscience. Je sais que tu as perdu des êtres chers…

Il l’avait lu dans son dossier, mais il ne lui en avait jamais parlé. Il n’estimait pas que cela soit utile, après tout il ne se souciait pas des autres, encore moins lorsqu’ils étaient morts. Mais si sa patiente se montrait trop émotive dès que l’on faisait appel aux spectres de son passé, elle ne pourrait jamais atteindre son potentiel. Et cela, le marquis ne pouvait le tolérer.

Cela dit, Victor n’avait jamais eu une grande compréhension émotionnelle de la psyché de ses pairs.

-Je dois savoir si le deuil d’Andrei affecte ton jugement, Katerina, annonça alors le marquis en l’observant intensément.

Il avait conscience qu'il s'agissait d'un sujet sensible, mais il n'était pas de ceux qui se taisent par scrupules. Il avait tout pouvoir, après tout.

Il était le Marquis de Graham.

Victor Graham
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Katerina Soukhovo-KobylinSecrétaire de Victor
Mer 18 Nov - 22:36
Les notes toujours contre son cœur. La réponse tomba.

-C’est hors de question.


Elle aurait souhaité en discuter avec lui, lui expliquer… Mais on ne discutait pas avec un homme comme Victor Graham. En tout cas, pas lorsqu’il était aussi net dans sa réponse. Elle ne se résolvait pas à remettre son jugement en question. Le malentendu ou le problème venait forcément d’elle.

-Si cette patiente tient à faire son deuil, j’ai déjà consenti à la création d’un cimetière dans cet objectif. Si elle tient absolument à visiter les falaises, elle n’a qu’à rejoindre l’Institut Graham. Je ne pensais pas avoir besoin de t’expliquer ce simple raisonnement.


Une évidence… Elle baissa les yeux. Elle se sentait stupide… C’était évidemment ce qu’elle aurait dû faire depuis le début… Si Sheila refusait de rejoindre l’institut Graham… Elle savait ce que cela signifierait, mais elle détestait cette idée.

Le poids du regard du Marquis sur elle était trop imposant. Elle se sentait écrasée. Mais c’était nécessaire… Il fallait qu’elle comprenne. Qu’elle arrête de se tromper de chemin. Elle voulait être à la hauteur. Elle finirait par être à la hauteur. En tout cas, elle s’épuiserait à être à la hauteur jusqu’au bout d’elle-même. Elle s’apprêtait à s’excuser quand il reprit :

-Les morts n’ont que faire de notre deuil, Katerina. J’espère que tu en as conscience. Je sais que tu as perdu des êtres chers…


Le visage de la brune se ferma. Elle ne parlait pas de ce genre de sujet avec Victor Graham. Ce n’était jamais arrivé. Et c’était mieux ainsi. Elle aurait eu trop peur de déborder. De se laisser rattraper par le passé devant lui. Elle savait qu’il méprisait ceux qui n’étaient pas capable de contrôler leurs émotions. Qu’il méprisait ceux qui laissaient trop parler leurs sentiments. Elle connaissait ces lacunes… Ces lacunes immenses sur tout ce qui touchait au relationnel. Et elle ne savait pas ce qu’il pourrait penser de toute cette histoire. Elle se souvenait des réactions du jury lorsque l’affaire était passé en justice. Le dégout… Les yeux du marquis la dévisageaient avec une telle intensité… Elle redoutait la suite…

-Je dois savoir si le deuil d’Andrei affecte ton jugement, Katerina,


Elle se sentit pâlir. Elle se doutait qu’il savait… S’il avait lu son dossier en détails, il savait aussi que la mort d’Andrei n’était pas naturelle. Elle avait été forcée de voir une psychologue pour ça. Elle avait été forcée de mentir encore et encore, prétendre avoir assister au meurtre de son tuteur sans y avoir participer. Prétendre qu’Ivanna les avaient surpris. Elle et Andrei. Que c’était sa nourrice qui l’avait frappé…

Elle avait dû tenir le coup, ne pas craquer. Une psychologue envoyée par l’Etat. Si elle craquait, si elle était inculpée, l’Etat récupérait l’argent d’Andrei. Un sacré paquet de fric. Le seul qui savait. Le seul à qui elle s’était confiée en dehors d’Ivanna… Hyppolite.  Elle étouffa les souvenirs qui remontaient. Elle devait garder son calme même si la question du Marquis réveillait en elle une tempête qui n’attendait qu’une seconde de faiblesse pour la noyer. Elle parlait mais entendait à peine sa propre voix, dans son oreille un souffle insupportable. Beaucoup trop fort..

- Andrei Soukhovo Kobylin m’a offert un avenir que mes géniteurs étaient incapables de me donner.


Il l’avait sauvé. Elle aurait dû lui pardonner. Elle aurait du tout lui pardonner… Elle s’en voulait toujours. Andrei ne lui avait jamais voulu de mal. C’était juste un homme seul. Brisé. Plus fort… Elle devait parler plus fort.

-  Il m’a permis d’hériter d’un nom, d’une éducation, d’un suivi médical irréprochable. Il a fait de moi la personne que vous avez rencontré l’année passée. Il aurait fait mieux avec plus de temps… Je lui dois tout ce que je suis.  

Elle avait manqué de conviction à une époque. Elle avait douté du bien qu’Andrei lui avait offert. Elle avait laissé les mauvais moments l’emporter, mais il y avait tous les autres. Son tuteur n’était pas toujours en colère. Il n’avait pas toujours été pris de ces pulsions effrayantes. Elle devait croire en ce qu’elle disait… Elle devait se montrer reconnaissante. Essayait-elle de convaincre Victor Graham que son tuteur était une bonne personne et qu’il méritait qu’elle le pleure ou essayait-elle de se convaincre elle-même ? Plus pâle que jamais, elle continua :

- Je me sens responsable de sa mort.

Son souffle. Le livre. Les anges. Le sang. Son regard vide…

Elle était incapable de dire qu’elle était responsable. Elle ne pouvait se résoudre à avouer à Victor Graham ce qui s’était réellement produit ce soir-là… Elle ne saurait lui mentir mais elle ne pouvait lui dire l’entière et immonde vérité. Sa réputation… Essayait-elle de se cacher derrière les enseignements de son mentor ? Ces mains seraient si fort le livre qu’elle tenait contre elle qu’il semblait qu’elles allaient fusionner avec le bouquin.

Elle savait que cela décevrait le Marquis. Elle détourna le visage, le regard, incapable de l’affronter. Si elle y avait lu de la déception, encore, elle aurait pleuré sans aucun doute. Elle détestait cette sensibilité qui lui donnait l’impression que son cœur était en train de bruler à petit feu. Elle ne pouvait se résoudre aux mensonges. Elle ne pouvait pas toujours se cacher derrière son imposture.

- Je ne peux donc pas nier qu’il arrive que… Son deuil affecte mon jugement.


Elle lui devait la vie, au même titre qu’elle devait maintenant le prolongement de cette dernière à Victor Graham. Elle savait qu’il n’aimait pas les détours. Peut-être aurait-elle juste du lui répondre oui. Un oui tout nu. Un oui sans fioritures. Elle en aurait été incapable tout simplement. En faisant cela, elle aurait éclaté en morceaux. Là, elle retenait son souffle, comme si ce dernier risquait de déraciner le peu de self-control qui lui restait. Elle avait trop besoin de convaincre le Marquis qu’elle avait la capacité de passé outre cet évènement.

- Je… veillerai à régler cela...


Elle n’avait pas la moindre idée de la manière dont elle s’y prendrait, mais elle n’avait pas d’autres choix. Une larme un peu plus rebelle que les autres roula sur sa joue. Elle fit mine de l’ignorer. Le visage à moitié tourné, elle pouvait échapper au regard de son mentor.  

Sans Victor Graham. Sans lui, elle n’était plus rien.
Katerina Soukhovo-Kobylin
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] Katou_10Fiche personnage : Le passé lointainEspace personnel : Le passé plus procheGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/02/2018Age : 28
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Ven 20 Nov - 1:26
Amalia


Katerina blêmit si fort que Victor crut qu’elle allait faire un malaise. Elle serrait le livre contre elle au point qu’il craignit qu’elle ne le déchire.

-Andrei Soukhovo Kobylin m’a offert un avenir que mes géniteurs étaient incapables de me donner, murmura-t-elle avant de se reprendre. Il m’a permis d’hériter d’un nom, d’une éducation, d’un suivi médical irréprochable. Il a fait de moi la personne que vous avez rencontré l’année passée. Il aurait fait mieux avec plus de temps… Je lui dois tout ce que je suis.

Sa voix était si ténue que Victor l’entendait à peine. Il continua de l’observer, indéchiffrable, notant l’assombrissement de son regard au fil de la décoloration de sa peau. Il ignorait qui elle essayait de convaincre, car Victor n’avait que faire de cet Andrei Soukhovo Kobylin. Il avait doté sa fille adoptive d’une éducation correcte et d’un nom respectable, soit, mais à quoi bon s’épancher en gratitude et regrets larmoyants ? Et pourquoi le faire de manière si accablée ? Soit Katerina pleurait encore la mort de cet homme, soit elle préférait éviter de penser à lui pour Dieu-sait quelle raison. Dans les deux cas, le marquis n’aimait pas cela, pas plus qu’il n’appréciait de voir sa patiente dans cet état.

- Je me sens responsable de sa mort. Je ne peux donc pas nier qu’il arrive que… Son deuil affecte mon jugement.

Victor arqua un sourcil. C’était donc cela : la culpabilité. Toute cette commisération pour une si simple conclusion. Victor ne se souvenait pourtant pas avoir lu une raison à cette émotion dans le dossier de Katerina. Il hésitait, incertain. Il n’aimait pas hésiter.

- Je… veillerai à régler cela...acheva Katerina.

Elle avait tenté de détourner le regard, mais Victor avait capté l’éclat de sa larme. Il passa une main dans sa barbe et se détourna à son tour. Il méprisait cette effusion de sentiments, mais il exécrait davantage se sentir très légèrement flancher à la vue de cette larme. Katerina ne voulait pas qu’il aperçoive sa faiblesse. Victor ne voulait pas qu’elle comprenne cette vulnérabilité.

Alors il fit ce qu’il savait faire de mieux dès que son masque aristocratique se fissurait : il se montra sévère.

-Je l’espère, répliqua-t-il durement. Je ne veux pas être ennuyé par les requêtes de chaque individu endeuillé de cette île.

Il marqua un temps, puis il soupira et rouvrit la porte de son bureau.

-Entre, Katerina. Inutile de te lamenter ainsi à la vue de tous. Les apparences sont primordiales, je pensais te l’avoir inculqué.

Il lui désigna un siège, et sortit d’un de ses tiroirs un fin mouchoir en tissu propre marqué de ses armoiries, avant de le lui tendre. Il s’adossa alors contre la surface du bureau et croisa les bras. Il se sentait le besoin d’en dire davantage. Peut-être parce que le son de sa propre voix l’apaisait. Peut-être parce qu’il aimait être écouté. Peut-être parce qu’il voulait chasser les spectres de sa patiente.

-Il ne sert à rien de t'apitoyer sur ton passé et ceux qui l’occupaient, déclara alors Victor. Andrei est mort, et il ne reviendra pas. Tu lui dois celle que tu étais. Tu me dois celle que tu es. Mais tu ne dois qu’à toi-même celle que tu seras. Dans tes erreurs. Dans tes niaiseries. Mais aussi dans tes réussites. Et ces dernières, tu ne les devras qu’à toi-même. Et aussi un peu à moi. Mais pas à Andrei. Car les morts sont les grands perdants des épreuves de nos vies.

Sauf si ces morts en question s’appellaient Victor Graham, mais cela lui semblait évident. Le marquis haussa les épaules.

-Certes, ton éducation témoigne des affres d’une certaine noblesse. Mais si cet Andrei avait été aussi digne de tes larmes, alors ce ne sont pas des regrets ou de la culpabilité que tu devrais ressentir.

Il replanta son regard dans celui de Katerina.

-C’est de la gratitude.

Et dans ce regard de nacre, il savait qu’il pouvait lire toute l’étendue de cette émotion pour sa propre personne.

Victor Graham
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Katerina Soukhovo-KobylinSecrétaire de Victor
Ven 20 Nov - 16:08
-Je l’espère. Je ne veux pas être ennuyé par les requêtes de chaque individu endeuillé de cette île.

Le marquis avait bien mieux à faire effectivement. Katerina s’en voulait de lui faire perdre son temps… Si seulement elle avait été plus capable de contrôler cette angoisse qu’elle sentait monté chaque fois qu’elle se souvenait. Elle aurait voulu être plus forte. A la hauteur de ce qu’on attendait d’elle. Serait-elle un jour à la hauteur ?

-Entre, Katerina. Inutile de te lamenter ainsi à la vue de tous. Les apparences sont primordiales, je pensais te l’avoir inculqué.


Elle aurait espéré fuir le Marquis. Exceptionnellement. Retourner à son bureau ou sa chambre. S’y enfermé. Pleurer. Elle hocha juste faiblement la tête, s’engouffrant dans le bureau de son mentor. Elle savait que les apparences étaient essentielles. Elle essayait sincèrement de les sauver…

Le Marquis lui désigna un siège. Elle s’y assit, penaude. Lorsqu’il lui tendit un mouchoir, elle voulut le remercier mais aucun son ne parvient à se dégager de sa gorge. Elle se contenta de poser ces notes et le livre du Marquis sur le bord du bureau, avant d’essuyer la larme qui s’était évadée. Elle reposa ensuite ces mains sur ces jambes, le mouchoir en tissu serré dans ses mains.

-Il ne sert à rien de t'apitoyer sur ton passé et ceux qui l’occupaient. Andrei est mort, et il ne reviendra pas. Tu lui dois celle que tu étais. Tu me dois celle que tu es. Mais tu ne dois qu’à toi-même celle que tu seras. Dans tes erreurs. Dans tes niaiseries. Mais aussi dans tes réussites. Et ces dernières, tu ne les devras qu’à toi-même. Et aussi un peu à moi. Mais pas à Andrei. Car les morts sont les grands perdants des épreuves de nos vies.


Peu importe ce qu’elle faisait, peu importe ce qui se passait, elle sentait l’ombre d’Andrei planer sur ces gestes. Cela paraissait si simple quand c’était Victor Graham qui en parlait. Ces réussites… Pensait-il réellement qu’elle en soit capable ? La réponse était évidente. Il n’aurait pas perdu son précieux temps avec elle sinon. Que se passerait-il le jour où elle serait à nouveau livrée à elle-même ?

-Certes, ton éducation témoigne des affres d’une certaine noblesse. Mais si cet Andrei avait été aussi digne de tes larmes, alors ce ne sont pas des regrets ou de la culpabilité que tu devrais ressentir. C’est de la gratitude.


Il n’avait fallu que ce mot. « Gratitude ». Pour qu’elle s’écroule Que tout s’effondre. Ses yeux dans ceux de Victor Graham. Après toutes ces années… Après toutes ces années elle aurait cru que cela guérirait, que ce serait moins douloureux. Mais c’était comme le Sida. Insidieux. Ça la rongeait.

Il assistait à sa chute. Elle qui pensait pouvoir vivre avec cela. Garder cela à l’intérieur, enfermé pour toujours. Elle qui buvait la moindre de ces paroles ne parvenait à les assimiler complètement. Elle ne pouvait ressentir cette gratitude. Elle aurait voulu pourtant. Elle aurait tout donné pour ressentir cette gratitude. A la place, un vide. Intersidéral. Immense. Un vide si imposant qu’il aurait pu engloutir Katerina sans effort. Qui l’avait déchiré en deux. Incapable d’oublier les deux faces d’Andrei. Impossible de dissocier le bien du mal.

Des pleurs silencieux. Violents. Douloureux. Irrépressibles. Le Marquis devait la trouver pathétique. Entre ces respirations saccadées qu’elle tentait de maintenir muette, de bâillonner, des mots :  

- Je voudrais… ressentir de la gratitude… Vraiment… Mais je…

Appuyé sur son bureau, à portée de main. Katerina n’aurait jamais pensé avoir cette audace. Peut-être était-ce un geste désespéré… Mais elle se raccrocha à la main de Victor Graham. Sa main tremblante agrippa celle de son mentor, l’autre toujours en possession du mouchoir. Cette main pouvait la protéger de son passé. Elle pouvait le sortir de là. Le Marquis avait ce pouvoir. Sa chaleur tranchait avec la peau glacée de la jeune russe. C’était de cette chaleur-là dont elle avait désespérément besoin.

Son corps tressautait au rythme des larmes. Un torrent de larmes. Comme chaque fois que les vannes s’ouvraient. Elle en perdait le contrôle. Victor Graham allait la mépriser. L’abandonner. Elle n’était même pas capable d’avoir de la gratitude pour Andrei. Lui qui aurait tout donné pour elle. Lui a qui elle avait tout pris.

- …ne parviens pas à oublier…

Ces mains sur son corps, la violence de ces gestes. Son regard glacé qui s’excusait. Qui la suppliait de le comprendre. Combien de fois ? Des centaines… Trop pour qu’elle ne s’en souvienne. Et même après sa mort. Combien de fois l’avait-il touché encore ? Elle aurait dû endurer cela… Elle aurait du tout endurer. Au lieu de ça, son sang partout sur le tapis. Partout sur ces mains. Sur le livre…

- Je n’ai pas la force…

Elle n’était pas digne d’eux. Ils l’avaient élevée. Plus haut qu’elle n’aurait jamais pu espérer se trouver sans eux. Mais il lui manquait cette force. Cette force qui les rendait si parfait. Cette force qu’elle ne trouvait pas en elle.
Katerina Soukhovo-Kobylin
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] Katou_10Fiche personnage : Le passé lointainEspace personnel : Le passé plus procheGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/02/2018Age : 28
Victor GrahamDirecteur de l'Institut Graham
Ven 20 Nov - 22:55
Amalia


Victor avait pensé en finir avec ce sujet, mais sous ses yeux, Katerina éclata en sanglots. Le marquis la fixa, interloqué. Pourquoi continuait-elle de pleurer ? Ne venait-il pas juste de lui dire que cela ne servait à rien ? Devait-il encore une fois se montrer plus précis pour que ses pairs le comprennent malgré leur infériorité intellectuelle ?

Dans ce désordre de sanglots, il parvint à entendre quelques mots :

- Je voudrais… ressentir de la gratitude… Vraiment… Mais je…

Victor leva les yeux au ciel. Elle n'avait rien compris de ce qu'il venait de lui dire. Son irritation grandissait à mesure qu'il réalisait que dans l'état où elle se trouvait, sa patiente ne l'écoutait et ne l'écouterait pas. C'était quelque chose qu'il ne supportait pas : être ignoré.

Il sentit quelque chose sur sa main. Baissant les yeux, il s'aperçut que Katerina la serrait, frêle petite paume contre celle du grand marquis. Déconcerté, Victor fronça les sourcils. Il n'était pas habitué à être inclus dans de telles effusions d'émotions. Personne ne cherchait du réconfort auprès de Victor Graham, il fallait être imbécile pour s'imaginer qu'un mégalomane puisse se soucier d'un autre que de lui-même.

- …ne parviens pas à oublier…sanglotait Katerina. Je n’ai pas la force…

Elle pleurait à chaudes larmes désormais, sa main agrippant celle du marquis comme s'il s'agissait d'une bouée. Victor pinça les lèvres, embarrassé d'être témoin d'une telle disgrâce.

-Foutaises, grommela-t-il en retirant sèchement sa main. Tu ne m'écoutes pas. Sèche donc tes larmes, très chère, tu es ridicule.

Il avait l'impression de faire face à sa fille, lorsqu'elle avait deux ans. Sa femme lui reprochait souvent sa maladresse dès qu'elle se mettait à pleurer, et Victor avait alors le réflexe de se débarrasser du problème en envoyant une nourrice à sa place. Mais Katerina avait vingt ans de plus, et Victor n'avait personne à qui déléguer cet embarrassant problème. Il avait l'impression que sa patiente avait soudainement régressé, il n'y avait rien dans ces larmes de l'éducation qu'il avait cherché à lui inculquer. Mais tant qu'elle ne retrouvait pas ses esprits, il ne servait à rien de la sermonner ou de la rassurer, elle ne l'écouterait pas et Victor ne comptait pas user vainement de sa salive. Il soupira et passa une main sur sa barbe.

S'il avait été question de n'importe qui d'autre que de Katerina, le marquis aurait tourné les talons avec quelques piques mordantes pour marquer son mépris. Mais Katerina avait réussi à s'attirer la rare affection du Docteur Graham, bien qu'il ne le reconnaitrait jamais. Peut-être avait-il avait changé, depuis son retour à l'Institut.. La voir dans cet état le désolait et l'irritait de manière égale.

Alors il fit quelque chose qu'il n'aurait jamais cru faire.

Il posa une main à l'arrière de la tête de la jeune fille et l'attira contre lui, l'étreignant gauchement. Il leva les yeux au ciel, songeant que ses larmes allaient tacher le gilet de son costume, mais par ce contact, il se sentit étrangement plus présent et plus écouté que par ses paroles. Si c'était le seul moyen d'être écouté, alors ainsi soit-il : jamais un marquis ne passait inaperçu, de toute façon.

-Allons allons, déclara-t-il moins sévèrement en lui tapotant très légèrement le dos.

Si quelqu'un lui avait dit un jour qu'il étreindrait une patiente, il lui aurait ri au nez. Il n'avait aucune utilité pour les contacts physiques, s'ils n'étaient pas charnels. En temps normal, il aurait plutôt reproché à sa patiente de se comporter comme une enfant. Mais il lui restait encore quelques fibres paternelles, bien enfouies sous son égo.

Et puis, cela n'était pas si désagréable. Ce n'était pas plus intime qu'un coup de poing, l'émotion était juste différente. Car si Victor ignorait tout de l'affection, il s'y connaissait en colère.

Mais c'était une autre affaire.

De lui-même, il mit fin au contact et fit reculer Katerina d'un pas en la tenant par ses épaules, ce qui incitait également la jeune femme à se redresser. Il remit alors sa cravate en place.

-Nous en rediscuterons quand tu seras calmée, Katerina. Va, et remets de l'ordre dans ton apparence. L'apparence est le reflet de l'âme, ne l'oublie jamais.

Victor avait retrouvé une certaine sévérité dans ses paroles. Il croisa les bras dans son dos dans une posture militaire, ayant déjà retrouvé contenance comme si son acte avait été d'une normalité aberrante - ou qu'il n'avait jamais eu lieu -.

Victor Graham
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] 2ur6Fiche personnage : Biographie du Marquis Victor de GrahamEspace personnel : et son AlmanachGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/05/2013Age : 54
Katerina Soukhovo-KobylinSecrétaire de Victor
Sam 21 Nov - 13:55
-Foutaises. Tu ne m'écoutes pas. Sèche donc tes larmes, très chère, tu es ridicule.

La main du Marquis échappa à celle de Katerina. Sa chaleur la fuyait. Prévisible. Elle faisait peine à voir. Ridicule. Elle laissa sa main retomber sur ces genoux. Il n’y avait plus que les mains d’Andrei. Ces mains plus froides que la mort. Ces mains qui lui prouvaient qu’elle lui appartenait encore. Elle baissa les yeux. Elle avait voulu stopper le cauchemar, mais il n’avait pas de fin. Pas de fin heureuse. Pas de fin ou tout fini bien.

Une chaleur rassurante l’enveloppa alors. La main du Marquis l’attira contre lui. Elle ferma les yeux, enfouissant son visage dans son gilet. Et la présence d’Andrei s’effaça un peu. Et cette étreinte la soignait un peu même si elle ne s’en rendait pas encore compte, son visage encore trempé de larmes. Dans les bras du Marquis, rien ne pouvait lui arriver.

-Allons allons.


Elle se calma peu à peu. Comme n’importe quel être humain rassuré par une figure presque paternelle. Cette étreinte, elle ne l’aurait jamais espéré. N’aurait jamais cru qu’elle puisse exister. La seule qui s’était déjà comporter de la sorte à son égard était Ivanna. Et cela faisait des années qu’elles ne s’étaient plus vues.

Toutes les autres étreintes… Elles cachaient autre chose. Elle cachait un amour que Katerina ne comprenait pas. Elles cachaient le souffle d’Andrei sur son visage. Elles étaient plus faciles à obtenir, mais n’avait pas la saveur de celle-ci.
Victor Graham la prit par les épaules, lui faisant quitter ces bras. Elle s’exécuta, ses deux yeux bleus tournés vers lui. Elle le laissa lui imposer une posture plus correcte, plus droite, plus noble.

-Nous en rediscuterons quand tu seras calmée, Katerina. Va, et remets de l'ordre dans ton apparence. L'apparence est le reflet de l'âme, ne l'oublie jamais.


Elle hocha la tête, toujours pâle mais ces yeux plus secs. Il l’avait extirpé de ces souvenirs douloureux. Il avait été la main qui l’élevait. Malgré ces erreurs et malgré sa faiblesse. Il faudrait qu’elle se prépare à cette discussion, mais pas maintenant. Elle essuya ces larmes maladroitement avec le mouchoir en tissu que le Marquis lui avait donné, soignant son apparence avant de sortir du bureau. Récupéra le livre et ces notes. Il était beaucoup plus lourd que tout à l’heure. Il pesait sur son bras. Elle travaillerait dessus jusqu’à tard. Elle voulait le terminer. Rendre l’homme qui venait de la serrer dans ses bras fiers. Lui prouver qu’il avait raison de lui faire confiance.

Après avoir regretter de pénétrer dans le bureau de son mentor, elle regrettait maintenant de devoir le quitter. Elle regrettait de ne pouvoir se cacher dans les bras de Victor Graham éternellement. Elle croisa le regard de son mentor alors qu’elle sortait. Ces yeux verts souvent teintés d’agacement, de mépris, de colère. Un jour, elle lirait de la fierté dans ce regard. La fierté d’un mentor pour sa protégée. La fierté d’un père pour sa fille. En attendant, il fallait qu’elle apprenne à affronter son passé. Il faudrait qu’elle exorcise ces démons si elle voulait que Victor Graham l’élève plus haut encore.
Katerina Soukhovo-Kobylin
Image : Dans l'Ombre d'un Marquis [Katerina et Victor] Katou_10Fiche personnage : Le passé lointainEspace personnel : Le passé plus procheGroupe : Institut GrahamDate d'arrivée à l'Institut : 05/02/2018Age : 28
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